ÉVACUATION et DÉGUERPISSEMENT
 
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l e   d e r n i e r   b a r o u d   d ' h o n n e u r
Oasis - récit d'une évacuation

Jour  J   lundi 07 avril 2003 = 11h00

Une bise froide souffle vigoureusement d'un ciel bleu azur sur la cour extérieure du bâtiment de l'ancien hôtel-restaurant Oasis où plus de 20 personnes ayant pris fait et cause pour les habitants en les prêtant leur aide pour le déménagement, attendent assises par terre le retour des véhicules et leurs chauffeurs assurant le transport des effets personnels et divers pièces récupérées de la démolition. Les occupants vaquent tranquillement à l'intérieur du bâtiment à ramasser leurs petites affaires, à démonter les installations et tout semble calme.

Jour  J   = 12h00 - C'est trop tranquille !

Le déguerpissement devant avoir lieu ce lundi 7 avril à midi tapant, les autorités se sont amenés deux minutes avant l'heure et voyant ces jeunes assis parterre, ils ont été visiblement courroucés. Le commandant de police ayant demandé qu'un membre du Collectif des Habitants et des Usagers intercède auprès des occupants pour assurer que tout se passe dans le calme sans l'intervention des gendarmes, il se tenait prêt à discuter avec le groupe des autorités.

Jour  J   = 13h00 - Tout de suite le ton est donné !

Croyant voir chez les squatters peu d'empressement à se bouger et partir, le représentant de la Coop et celui de la justice les ont d'emblée menacés de faire intervenir les gendarmes pour qu'ils se hâtent. Nous sommes sommés de quitter les lieux immédiatement, sinon ce seraient l'expulsion forcée et comble, si les choses ne se passent pas bien, nous devrions supporter toutes les conséquences de l'évacuation dont les frais qui auraient été entièrement mis à notre charge. Un délai de quelques heures a été demandé mais devant la raideur et le refus obtus des représentants des autorités d'accorder une minute de plus, une longue épreuve s'est engagée. C'est tout juste si les représentants de l'ordre ont concédé à nous fournir un autre fourgon pour que le déménagement aille plus vite!

Jour  J   = 14h00 - Gare aux ménaces !

D'abord, nous avons dénoncé le caractère menaçant des injonctions qui toutes ont fait appel à l'intervention des forces de gendarmes anti-émeutes spéciales si notre volonté de partir était pris en défaut. Nous les avons demandé d'être un peu plus arrangeant et de mieux comprendre la situation, de voir que si les apparences pouvaient laisser croire que personne ne bougeait, en fait, le déménagement se déroulait normalement, même si cela pouvait paraître un peu lent à leur goût. Devant leur insistance à employer la manière forte, nous les avons carrément accusé de jeter de l'huile sur le feu et de chercher à empirer la situation et nous les avons fait remarquer que leur attitude ressemblait à si méprendre aux incantations d'un certain Bush.

Jour  J   = 15h00 - Résistence à une démolition programmée !

Les ouvriers de l'entreprise de démolition ont commencé leur travail de préparation de chantier selon les ordres des représentants de l'ordre régnant : pose du grillage de protection, trous de sondage, dépôt d'une benne par un camion. La résistance contre l'intrusion des engins de chantier n'a pas manqué de battre son plein - une équipe s'est assise juste dernier le camion qui tenta de reculer de force dans la cour pour déposer son énorme benne, une autre a fait tomber quelques pavés devant le marteau-piquer d'un ouvrier pour empêcher qu'un sondage devienne un grand trou ainsi que d'autres encore pour arrêter les ouvriers de nous enfermer complètement par les grilles de chantier. Ce qui a le don de faire s'énerver le huissier de justice qui appela le juge pour qu'il lui donne l'ordre de faire usage de la force.

Jour  J   = 16h00 - On calme le jeu ! !

Après avoir réglé le problème des polacks saouls qui hurlaient comme des possédés, celui des supporteurs zélés voulant trop bien nous défendre, celui des enfants des écoles qui voulaient tout voir et comprendre, une procédure de sortie s'esquissa mais elle fut avortée par l'excitation de l'huissier de justice qui, de guerre lasse, commença à nous ordonner pour que nous partions sans plus tarder. Ce début de parade se disloqua immédiatement et tout le monde s'est rassis par terre. Devant l'insistance de l'intercédant des occupants à démontrer que leur attitude était malgré tout pacifique et que leur désir de collaboration dépendait de la compréhension des autorités, les ayant montrer que leur comportement de trop grande fermeté était inadéquate et retardait le départ final, ayant demandé pour une dernière fois de suivre le rythme de progression des occupants et de regarder d'un peu plus près ce qui se passa réellement dans cette cour, le huissier se calma et il n'y a pas eu recours aux gendarmes.

Jour  J   = 17h00 - Et on s'en va, enfin presque . . . ! ! !

Enfin le cortège se reforma, banderole jaune "les logements appartiennent à ceux qui les occupent !!" en tête, suivi des tambours et djembes et de la cohorte des occupants et supporteurs, et après avoir fait déplacer une machine de chantier, la procession s'ébranla, sortit de la cour et descendit C.F.Ramuz dans un soleil couchant orange du plus bel effet. Une clé symbolique formée de quelques maillons d'une grosse chaîne fut transmis à l'architecte pour lui signifier notre reddition des lieux. Nous avons averti les autorités qu'il resta deux constataires particulièrement remontés contre la démolition qui se sont réfugiés dans le grand pin protégé où ils ont construit un abri de fortune. Et comme à leur habitude, les gendarmes ont, à leur tour, occupé les lieux avec force tenues anti-émeute, comme la grêle après la vendange !

Jour  J+1   = Épilogue, enfin presque . . . ! ! !

Après une nuit frigorifiée passée dans un magnifique pin dans la brise tempétueuse, après une longue journée de palabres apaisantes de la part du commandant de la police de Pully et son assurance que l'arbre n'allait pas être abattu, nos deux camarades ont finalement convenu de descendre de leur refuge. Ils n'ont pas été inquiété car la police ne leur ont pas demandé leurs papiers d'identité et ils ont reçu l'assurance qu'ils ne seront pas poursuivis par le propriétaire . . . !



Cette fois, c'est la fin . . . ! ! !

Et la démolition s'est poursuivi de plus belle, tant l'acharnement de "liquider" ce problème de squat à Pully fut patente. Maintenant un grand parking bruyant et laid s'étale devant les fenêtres des voisins qui ont préféré cette verrue accentué par le claquement des portières au local plein de vie communautaire qui s'y développa pendant plus d'un an et demi à la grande satisfaction des jeunes qui en ont fait un lieu de culture alternative très apprécié par de nombreuses personnes - artistes, musiciens, saltimbanques, étudiants, jardiniers . . .





Et que peut-on conclure ?

Et pas plus tard que le 16 avril, une quinzaine de personnes - parmi lesquelles d'anciens occupants du squat de l'Oasis de Pully - a investi les bâtisses de la rue du Mont-d'Or à Lausanne menacées par un projet immobilier. Ils veulent faire de ces maisons du XIXe siècle des lieux ouverts pour les gens du quartier, où pourrait se trouver une salle pour l'internet, pour la culture et pourquoi pas, pour une garderie !

Comme quoi, on peut toujours expulser des squatters par la grande porte d'un bâtiment abondonné mais ils reviennent par les fenêtres d'un autre . . .!! 




 

 
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end-fin-18.04.2003