Armée

Pacifisme, défense et paix


Débat  •  Le rôle de l'Armée en question

Pour l'historien Pierre Jeanneret, la Suisse ne doit pas s'interdire à priori toute défense de son territoire !


Son texte de réflexion sur les résultats des élections cantonales vaudoises paru dans le Gauchebdo du 4 mai 2007 contenait une allusion – sans doute maladroite – au Groupement pour une Suisse sans Armée (GSsA). Elle lui a valu une réponse indignée de Georges Tafelmacher (Gauchebdo N°18 et 19-20 des 4 et 11 mai). Il ne souhaite pas prolonger une polémique avec un camarade qu'il dit estimer mais comme en revanche il utilise cet incident pour engager un débat de fond sur le pacifisme, il lui fournit l'occasion de fourbir ses arguments antimilitaristes.

À la vérité, l'historien Pierre Jeanneret développe surtout les justifications militaires pour rendre acceptables l'armée même si c'est au détriment de la Paix...


Sommaire


compilation : Georges Tafelmacher



Jeanneret

Réflexion sur un rendez-vous manqué

Débat sur les élections cantonales - GH n°18, 04 mai 2007


Les récentes élections vaudoises, qui se sont soldées par un important recul du POP, donnent lieu à un débat large et ouvert. Pour entamer la discussion dans nos colonnes, nous publions la contribution de Pierre Jeanneret, membre du POP et auteur de l'ouvrage «Popistes» (éditions d'en bas, 2002) qui fait de lui un connaisseur privilégié de l'histoire de ce parti(...)

(...) Le cas échéant nous devons, sur ce plan, garder notre indépendance vis-à-vis de notre partenaire solidaritéS, au cas où il s'opposerait à une telle alliance de raison.

Alliance oui, mariage non

Rapports avec solidaritéS: tout en soulignant le caractère très positif des liens entre militant-e-s et sympathisant-e-s des deux formations pendant la campagne, et sans méconnaître les grandes qualités personnelles et la force du militantisme de plusieurs membres de solidaritéS, j'exprime, avec d'autres, mes doutes et réticences. Alliance oui, mariage non: solidaritéS, sous des apparences consensuelles, ne manque d'ailleurs jamais une occasion de se démarquer de nous. On perçoit l'agacement de certains popistes face au ton très "donneur de leçons" de ses intellectuels-théoriciens.

Par ailleurs, l'esprit de "l'entrisme" n'est pas mort chez tout le monde. Gardons-nous de "gauchiser" notre discours à l'extrême pour complaire à cet allié, au risque de se couper des aspirations réelles de l'électorat popiste !

De manière plus générale, le POP ne doit pas faire preuve de naïveté, et se laisser "squatter" et instrumentaliser par des organisations (souvent faibles prises isolément) comme le GSsA, dont les buts - défendables et honorables en soi - ne sont pas exactement les nôtres. En un mot: le POP doit veiller à ne pas se faire utiliser, voire manipuler par qui que ce soit.

Enfin une remarque à plus long terme et un peu marginale par rapport aux élections récentes, mais non étrangère à celles-ci. Quelles relations entre sections (essentiellement romandes) du PST? Celui-ci apparaît de plus en plus comme un ensemble atomisé de sections cantonales. Entraide? Luttes communes? Expériences à échanger? Rencontres et pas seulement au niveau des directions? etc. N'y aurait-il pas des synergies à exploiter ?

Propos tirés de l'article
© Pierre Jeanneret et GH.


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Tafelmacher

Concerne: article «Réflexions sur un rendez-vous manqué»

pg.2 du n°18 du Gauchebdo du 4 mai 2007

Au camarade Pierre,

Dans ton débat «Retour sur les élections vaudoises 2007», tu as écrit :

«...le POP ne doit pas faire preuve de naïveté et se laisser "squatter" et instrumentaliser par des organisations comme le GSsA*, dont les buts (...) ne sont pas exactement les nôtres. (...) le POP doit veiller à ne pas se faire utiliser, voire manipuler par qui que ce soit.»

Si je peux comprendre tes soucis vis-à-vis des organisations hautement politique comme "solidaritéS", je m'étonne que tu puisses citer le GSsA comme étant une organisation qui chercherait à "squatter et instrumentaliser" un POP "naïf" et abusé par des organisations dont les buts ne seraient pas "exactement les nôtres".

Le GSsA n'a jamais cherché, de quelque façon, à squatter, à instrumentaliser, à utiliser ou à manipuler le POP (ou le GeM) et tu ne peux pas accuser le GSsA de notre insuccès aux élections cantonales vaudoises d'autant plus que ses buts ne sont pas la manipulation, la ruse politique, l'instrumentalisation, bref et en général, la basse politique politicienne. La récupération politique n'est pas dans les habitudes du GSsA mais, d'après ton analyse, c'est comme si le GSsA t'avais manipulé à longueur de campagne.

Le GSsA déclare officiellement qu'il ne manipule personne, n'instrumentalise aucune formation politique, ne squatte pas les bureaux des partis, n'utilise pas le POP à des fins de pouvoir. Sa participation au GeM résulte de sa recherche de relais dans la politique combative pour faire avancer la cause de la Paix sur terre et d'une tribune pour atteindre NOS buts à tous, soit le "vivre ensemble" solidaire, pacifique et constructif. Tes remarques sur le GSsA ne vont pas dans ce sens et je m'étonne que tu puisses entonner ce discours très à droite de la "manipulation politique" !!

Je sais que le moment est mal choisi pour cette polémique mais l'ayant entamée, je me dois de protester d'autant plus que si nous sommes appelés à travailler ensemble dans le nouveau comité POP régional "Lavaux-Oron", il faudrait quand même un peu plus de sens commun et non ces accusations d'une portée explosive...

Georges Tafelmacher
POP/GeM - AGT!
GSsA/Vd
- PULLY -

* GSsA = Groupe Suisse sans Armée, mouvement apolitique pour la suppression de l'armée suisse...


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Pacifisme, défense et promotion de la paix

"Gauchebdo" n°26 du 29 juin 2007

Pour l'historien Pierre Jeanneret, la Suisse ne doit pas s'interdire à priori toute défense de son territoire.

Mon texte de réflexion sur les résultats des élections cantonales vaudoises contenait une allusion - sans doute maladroite - au Groupement pour une Suisse sans Armée (GSsA). Elle m'a valu une réponse indignée de Georges Tafelmacher (Gauchebdo N°18 et 19-20 des 4 et 11 mai). Je ne souhaite pas prolonger une polémique avec un camarade que j'estime. Cet incident fournit en revanche l'occasion d'engager un débat de fond sur le pacifisme.

Le pacifisme intégral est un idéal généreux et profondément respectable. En considérant par exemple l'évolution du général Jacques Pâris de Bollardière, héros de la Résistance, combattant parachutiste en Indochine, officier opposé à la torture en Algérie, et son adhésion à la non-violence, on se gardera d'utiliser des expressions outrageantes comme "pacifisme bêlant". A l'examen, le pacifisme révèle cependant ses limites.

Tout d'abord faut-il, comme il nous y invite, condamner "les armes" en bloc? Les armes ne sont que des outils (de mort certes), d'un degré technologique plus ou moins avancé, entre les mains des hommes. Elles peuvent être des instruments de conquête, de domination, d'asservissement. A contrario, elles peuvent être des instruments visant à la libération des hommes et à la restitution de leur dignité bafouée. Faut-il jeter l'opprobre sur la révolte de Spartacus contre le pouvoir esclavagiste romain, la résistance des Camisards protestants contre l'intolérance autocratique louis-quatorzième, le soulèvement du ghetto de Varsovie en 1943 (sans aucune perspective de victoire sinon celle de mourir en combattant), ou encore la rébellion algérienne contre le colonialisme français, du seul fait que tous ces sursauts de l'humanité outragée recoururent aux armes? Ce ne sont là que quelques exemples. Ils abondent dans l'Histoire.

Du soulèvement spontané d'un peuple en armes aux armées structurées, hiérarchisées, disciplinées, il y a un pas: je le franchirai. Il a fallu créer une armée nouvelle - celle des soldats de l'An II - pour sauver les acquis de la Révolution menacée par la coalition des rois. Il a fallu la grande armée des "bô doi" et le génie stratégique du général Giap pour remporter (dans une bataille classique) la victoire de Diên Biên Phu et obtenir l'indépendance du Viêt Nam. Il a fallu l'énorme effort militaire tout particulièrement de l'Armée rouge, pour écraser le nazisme, ce régime qui fut la quintessence de l'ignominie criminelle.

Sans doute l'application des méthodes de résistance non-violente a-t-elle été, dans certaines situations historiques, efficace. L'extraordinaire force spirituelle du Mahatma Gandhi a permis la décolonisation sans heurts des Indes (sinon les massacres qui accompagnèrent la Partition). Son disciple Martin Luther King a obtenu, grâce à elle, la fin de la ségrégation raciale avilissante en Alabama ou au Tennessee. Il convient de rappeler que, dans le premier cas, les militants non-violents avaient en face d'eux un adversaire relativement "civilisé" : les colonisateurs anglais au Indes (ainsi l'authentique relation d'amitié qui s'établit entre Gandhi, Nehru et Mountbatten) étaient pas des fascistes! Ils respectaient certains principes, ne fût-ce que ceux de leur propre législation. Quant aux militants antiségrégationnistes du Sud des Etats-Unis, ils pouvaient compter, eux, sur une opinion publique américaine au Nord, voire sur le gouvernement de Washington avec Kennedy, fortement hostiles à l'apartheid. N'est-ce pas, en revanche, s'illusionner que de croire pouvoir abattre le nazisme et le totalitarisme belliciste par les seules méthodes de la non-violence ?

La libération par les armes, certes, ne garantit pas ipso facto le triomphe de la démocratie! Victorieuse de l'Allemagne hitlérienne, l'URSS restait une dictature. Fallait-il que le combat valeureux des Algériens pour leur indépendance aboutisse au régime d'un parti unique corrompu?... On le voit une fois de plus, armes et armées ne sont que des instruments et des structures: les réponses aux problèmes des sociétés humaines ne sauraient être que politiques. Cependant la phase militaire apparaît hélas dans certains cas comme un préalable nécessaire. Ainsi, on peut imaginer qu'une rapide et vigoureuse intervention armée, sous l'égide de l'ONU, aurait été à même de stopper l'effroyable génocide du Rwanda. Une telle opération a réussi à mettre fin aux massacres interethniques en ex-Yougoslavie.

Des armées au service du maintien de la Paix

Revenons au GSsA. Ses buts sont de «faire avancer la cause de la Paix sur la terre» et le «vivre ensemble solidaire pacifique et constructif» (G. Tafelmacher). Là-dessus, nous sommes en plein accord. Nous divergeons quant aux moyens d'atteindre ces objectifs généreux. Pour le pacifisme intégral, les armes, outils au service de la violence, ne peuvent engendrer à leur tour que la violence, dans une spirale meurtrière sans fin. Pour ma part, je crains les illusions engendrées par l'angélisme. Et j'estime que, sous contrôle démocratique d'institutions nationales ou internationales, les armées peuvent servir à maintenir ou à promouvoir la Paix. Le métier des armes a peut-être trouvé dans ce nouvel usage sa véritable noblesse.

Or la suppression de l'armée suisse est l'objectif prioritaire du GSsA, comme son appellation même l'indique. Cet objectif n'est-il pas en contradiction avec la position du PST/POP dès 1943-44? Faut-il rappeler que le parti, depuis sa création, n'a cessé de revendiquer son attachement à une défense nationale populaire, aux structures démocratiques, indépendante des alliances politico-militaires telles l'OTAN, non atomique, et fonctionnant à un coût non exorbitant? Certes, la situation actuelle n'est plus celle qui prévalait à l'époque de la guerre froide: la division du monde en deux blocs antagonistes. Mais l'on ne saurait préjuger d'un avenir par définition incertain et s'interdire à priori toute défense du territoire, de la neutralité et des libertés suisses. Par ailleurs, notre armée pourrait se voir investie d'une tâche nouvelle: celle de participer, par des contingents de volontaires dûment formés, à des missions de maintien de la Paix, et en particulier de protection de populations civiles menacées? Missions non exclusives par ailleurs d'initiatives diplomatiques et de médiation où la Suisse, si elle le voulait, excellerait. Je n'occulte pas la difficulté de jauger la légitimité d'une intervention militaire: cette difficulté de l'appréciation politique ne saurait nous entraîner, aux côtés de l'UDC blochérienne, vers le repli sur une Suisse isolationniste et égoïste.

On peut donc, sans être taxé de traîneur de sabre belliciste, soutenir l'existence d'une armée suisse au service des valeurs démocratiques et de la Paix. Ce n'est pas dérogé aux idéaux du Socialisme que de s'inscrire dans la ligne du grand Jaurès(*), l'auteur de «l'Armée nouvelle». Et pour conclure, songeons au mot de Pascal: «La force sans la justice est tyrannique. La justice sans la force est impuissante.»

PIERRE JEANNERET

* Voir notre hommage dans Gauchebdo N°50 du 10 décembre 2004.


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Réponse personnelle à Pierre Jeanneret et son article
«Pacifisme, défense et promotion de la paix»

paru dans le dernier "Gauchebdo" n°26 du 29 juin 2007 dans lequel on s'en prend sans ambages au pacifisme des combattants pour la paix et on fait de leurs idéaux, des illusions. Au passage, on glorifie l'armée en trouvant dans son nouvel usage pacificateur, sa noblesse !

Puisque le débat a été ramené sur le bien-fondé et le rôle de l'armée que nous mettons en question, je tâcherai, dans la mesure de mes modestes moyens intellectuels, de le suivre et d'apporter les arguments qui motivent les tenants d'une promotion de la paix par d'autres moyens que ceux des armes. On cherche à trouver les limites du pacifisme et à le mettre en question mais ces arguments, que ne renierait pas la droite dure et sécuritaire, montrent qu'à aucun moment des limites ont été mises à l'armée. Et pourtant, on doit pouvoir mettre l'armée en question, comme on le fait avec le pacifisme, si nous voulons évoluer !

Que nous prouve le recours aux armes ?

En parcourant l'histoire, nous ne pouvons pas nous empêcher de constater un simple fait, soit qu'aucun recours aux armes dans toute l'histoire meurtrière des hommes a abouti à une période de vrai paix citoyenne ou de meilleurs relations entre les hommes, ni même à une amorce de démocratisation ou de liberté. Ces périodes d'après-guerre sont souvent des occupations militaires où les populations sous contrainte doivent intégrer des nouvelles règles pour survivre. En ne me tenant qu'à tes propres exemples, nous pouvons aisément faire le constat que la prise de la Bastille par les armes a été suivie par un grand déferlement de terreur et par la prise du pouvoir par le plus sanguinaire des dictateurs, un empereur auto-sacré qui a mis tout l'Europe ainsi que l'Afrique du Nord à feu et à sang sans que la démocratie fut pour autant établie, ni la liberté conquise. Une fois encore, ces guerres napoléoniennes ont été suivies par la restauration des monarchies et un recul de la démocratie naissante. La révolte de Spartacus contre le pouvoir esclavagiste romain par les armes l'a amené à être crucifié avec tous ses camarades et elle fut réprimée dans un bain de sang effroyable. Des historiens romains racontèrent que la route le long de laquelle a eu lieu ces crucifixions se transforma en un fleuve de sang et les milliers de corps exposés furent dévorés par les oiseaux de proies et les corbeaux.

La résistance armée des Camisards protestants contre l'intolérance autocratique louis-quatorzième a mis Louis XIV dans une telle colère qu'il a décide de détruire le pays, il ordonna d'incendier mas et hameaux, de déporter les habitants des villages de moins de 100 habitants vers le Canada et l'Afrique du Sud. Les derniers chefs Camisard comme Abraham Mazel ou Roland furent tué, d'autres se sont rendus et mis en prison. Les camisards n'ont pas obtenu la liberté de culte qu'ils demandaient et la répression religieuse continua jusque dans les années 1770 avec leur cortège d'exécutions, emprisonnements, galères, etc. Pour justifier les massacres et les déportations et en tirant la leçon de l'insurrection des camisards, le pouvoir poussa les protestants à la révolte armée en maintenant la répression au-delà d'un certain seuil de désespoir. Ce ne fut que sous l'impulsion d'Antoine Court aidé d'anciens camisards comme Bonbonnoux, Gaubert ou Corteiz, que l'église protestante se reconstituera sur des bases non-violentes.

Le soulèvement du ghetto de Varsovie en 1943 n'a offert aucune autre perspective que celle de mourir en combattant le pouvoir nazi sans avoir pu l'ébranler pour autant. La rébellion algérienne, ayant recouru aux armes contre le colonialisme français, a été bombardé, torturée, déportée. Suite à la décision du gouvernement français de rendre l'Algérie aux Algériens et d'arrêter l'état de guerre, un régime autocratique fut instauré. Au Pérou et en Colombie, le FARC a recouru aux armes et il s'est fait décimer par la troupe gouvernementale suréquipée par les USA qui ont pu ainsi justifier leurs interventions armées en Amérique du Sud. Dans l'ex-Yougoslavie, ce fut les grandes manifestations populaires qui ont renversé Milosevic et non les bombardements à l'uranium appauvri et l'occupation par des troupes de l'OTAN.

Particulièrement significatif, les américains ayant conquis leur indépendance par les armes, ont vécu par les armes comme en témoignent les guerres indiennes, la guerre civile, la guerre hispano-américaine, la conquête de l'ouest par le Colt45 et la Winchester, le deuxième amendement et les tueries dans les lycées, etc. Sans parler des guerres contre l'Irak et de l'Afghanistan, les plus grands échecs militaires de tous les temps (Jacques Beaud). L'énorme effort militaire des américains et tout particulièrement de l'Armée rouge pour écraser le nazisme, régime qui fut la quintessence de l'ignominie criminelle, a produit une des plus grandes dominations de tous les temps et a fait que des milliards des gens ont été soumis à l'arbitraire du pouvoir de l'industrie, de la finance et du politique, que se soit de la part de l'URSS ou des USA. La Rote Armee et les Brigades Rouges qui ont recouru aux armes pour lutter contre ce fléau, ont été embastillés et le pouvoir économique a pu renforcer son pouvoir au-delà de tout ce qui est concevable et a rendu toute opposition au capitalisme inopérant. Les altermondialistes souffrent encore aujourd'hui de l'option armée de ses prédécesseurs contestataires et même les anarchistes ne se sont pas relevés de leur épisode terroriste. Ce ne sont là que quelques exemples et ils abondent dans l'Histoire. Nous pouvons constater que tous les sursauts de l'humanité outragée ayant recours aux armes ont très mal fini et le plus souvent à l'avantage du pouvoir qui a utilisé ce recours aux armes pour justifier ses réponses répressives armées et sanglantes.

Nous pouvons donc tenir pour avérée la supposition que tout recours aux armes, outils au service de la violence et du pouvoir, ne peut engendrer à son tour que la violence, dans une spirale meurtrière sans fin. Pour ma part, je crains les illusions engendrées par les armes. Et j'estime que, même sous contrôle démocratique d'institutions nationales ou internationales, les armées ne peuvent en aucun cas servir à maintenir ou à promouvoir la Paix. Le métier des armes essaie de trouver dans ce nouvel usage qu'est la promotion de la Paix sa noblesse perdue. Le véritable angélisme serait de croire ou de faire accroire que l'on peut conquérir sa liberté ou sa dignité par les armes ou que l'armée aurait une quelconque "noblesse" !

Il ne s'agit pas du tout de jeter l'opprobre sur la révolte de Spartacus contre le pouvoir esclavagiste romain ou sur la résistance des Camisards protestants contre l'intolérance autocratique mais de mettre en perspective ces événements et de les comprendre par rapport à la mentalité de l'époque. Il s'agit surtout de comprendre que les solutions trouvées par nos ancêtres s'inscrivaient dans une logique où les différents se réglaient à coup d'épée, de pouvoir arbitraire et de mentalité élitiste car les hommes étant encore peu civilisés, très superstitieux, susceptibles et réactionnaires n'avaient aucune idée de ce que pouvait être les "droits de l'homme", l'autre était "respecté" uniquement s'il était soumis, affable, intégré et consentant. Malgré la longue tradition belliqueuse de l'homme, notre ère moderne, après l'expérience traumatisante de ses tragédies guerrières, a enfin permis aux hommes de comprendre que s'ils veulent survivre, ils doivent apprendre à vivre en paix avec tout le monde au prix d'une renonciation à la gloire facile de la guerre et de ses privilèges.

L'idée toute faite de l'homme que se fait l'armée !

Par contre, faut-il jeter l'opprobre sur l'armée? Oui, sans hésitation car l'armée repose sur une idée toute faite de l'homme postulant que seule la réponse armée arriverait au bout de sa nature agressive et résoudrait les problèmes de la violence des humains. Mais l'arme est la représentation la plus imagée du pouvoir, soit celui de détenir le pouvoir de vie ou de mort sur les autres. Et le progrès technologique a tout changé quant à l'utilisation de l'arme, rendant le pouvoir encore plus fort en lui donnant des possibilités infinies de riposte. Les armes n'ont jamais libéré les hommes, elles n'ont fait que de rendre la conquête de la liberté encore plus meurtrière et sans espoir. Tous les cas de tentative de libération par les armes se sont soldé par un échec retentissant allant jusqu'à donner à l'oppresseur, sous la pression de l'opinion publique, un "droit" à la guerre et à l'utilisation des armes les plus sophistiquées; la guerre contre le terrorisme (Palestine, Sri-Lanka, Birmanie, Indonésie, Pérou, etc....) nous démontre bien ce postulat.

Il y a un argument particulièrement retors qui est celui de tout confondre et d'associer les pacifistes à l'UDC blochérienne en suggérant que parce que nous refuserions le recours aux armes, nous chercherions en fait le repli sur une Suisse isolationniste et égoïste. Cela laisserait entendre que les valeurs démocratiques et de la Paix ne peuvent être défendue que par l'armée à l'exclusion de toutes autres considérations non-violentes, pacifiques et associatives. Il faut le dire, encore et encore, si on est réduit à prendre les armes, c'est que la situation s'est tellement péjorée que l'on n'a que cette solution pour se défendre. Mais à aucun moment est posée la question de savoir pourquoi la situation s'est pareillement dégénérée, qui l'a laissée se dégrader autant et pourquoi rien n'a été entrepris pour ne pas en arriver là. Au fond, tout se passe comme si tout a été fait pour que la situation sort de notre contrôle rendant le recours aux armes la seule solution possible. C'est comme si on avait tellement besoin de guerroyer que toute excuse serait justifiée et que par un pragmatisme le plus crasse, bombarder l'autre devient plausible et acceptable. Ce n'est pas s'illusionner que de croire pouvoir abattre le nazisme et le totalitarisme belliciste par les seules méthodes de la non-violence dans la mesure où ces méthodes seraient appliquées dès la naissance des conditions pouvant amener aux dictatures. Une fois la dictature fermement établie, il est certes trop tard pour ces méthodes mais peut être que cela arrange beaucoup de monde que de laisser les situations se pourrir pour faire valoir le recours aux armes avec un semblant de bonne conscience. La première guerre mondiale nous a amplement démontré que ce fut au summum des revendications ouvrières et de la contestation de l'emprise des magnats de l'industrie que fut déclarée la guerre mettant un arrêt subit aux grèves et autres troubles. D'ailleurs cela n'a pas marché aussi bien que prévu car dès 1918 tout de suite à la fin de la grande guerre, les grèves reprenaient de plus belle et elles furent toutes réprimées par la troupe au solde du pouvoir qui ne s'est pas fait d'état d'âme pour tirer dans la foule !

Mais ce qui m'étonne le plus dans cette argumentation est la glorification que l'on fait de l'armée à l'instar des généraux prompts à chercher toute justification de leur corporation et qui croient que l'armée peut promouvoir la paix. Cette façon de rechercher la "noblesse" de l'armée en la confiant des tâches de "maintien de la paix" est d'un angélisme qui frise le ridicule car en aucun cas l'armée peut-elle être "noble" rien que par la nature de sa tâche première sanglante et meurtrière qui est celle de "faire la guerre". Pour nous syndicalistes, altermondialistes, contestataires du système, l'armée a toujours été associée au pouvoir et seule la guérilla ou l'armée populaire égalitaire sans grades avait un début de noblesse et uniquement pour la tâche première de "libérer" les gens du pouvoir totalitaire qui les accable. Après avoir accomplie cette mission, elle devait se dissoudre et les participants devaient retourner à leurs activités premières, les uns dans des usines autogérées, les autres dans les forces de police populaires, les autres encore au sein de leurs familles et de leurs quartiers (voir les citations du sous-commandant Marcos)...

Ce qui m'étonne aussi est cette idée que parce que l'homme a toujours été violent et guerrier, il le restera toujours malgré toutes nos tentatives de changement. On apprend bien aux enfants de ne pas être agressifs et ils sont punis s'ils montrent ne serait-ce qu'un début d'attitude violente ou s'ils contestent l'autorité en la mettant en question. On leur apprend de ne pas réagir avec les poings et on leur enseigne à régler leurs différents d'une manière pacifique et respectueuse de l'autre. On passe notre temps à leur fixer des limites, à leur faire de la prévention contre leur violence et à envoyer les forces de l'ordre contre eux à chaque occasion de possible débordement. Et voici qu'une fois arrivés à l'age adulte, on les envoie à l'armée pour leur apprendre à tirer, à tuer, à réagir avec des armes à la main sous le fallacieux prétexte que l'homme serait fondamentalement mauvais et que de vouloir son changement serait de l'angélisme ou du pacifisme bêlant! Quel démenti de l'ordre social pacifié qu'on a essayé de les inculquer !

Expériences personnelles qui peuvent nous montrer un autre chemin possible

Je fus pendant quelques dix d'années associé aux problèmes de sécurité au sein des squats lausannois et pulliérans et j'ai dû résoudre bien des problèmes de violence venant non pas des participants internes des squats mais des gens de l'extérieur qui nous cherchaient noise pour nous "casser la gueule". Bien sûr que nous aurions pu réagir couteau contre couteau à crin d'arrêt, poing américain contre poing américain, matraque contre matraque pour "défendre" notre liberté et notre "démocratie" interne mais il a été décidé, dès le début de nos expériences en 1993, d'appliquer rigoureusement la consigne de la non-violence et de la résolution pacifique des conflits. Je peux te dire qu'à aucun moment nous avions eu à déplorer des rixes ou des violences et jamais la force armée de la police a dû intervenir car nous avons pu contrôler les incidents de sort qu'aucune escalade ne fut possible. On dégonflait la baudruche avant qu'elle ne pête et tout cela sans force ou arme ou attitude conquérante ou quérulante ou provocante. Je doute fort que tu puisses accuser les squatteurs d'être pétris d'angélisme, ou de faire dans le pacifisme bêlant au vu de leur agressivité atavique, de leurs réactions à fleur de peau et de leurs susceptibilités problématiques.

Rendre la justice par les armes, c'est comme rendre œil pour œil ou dent pour dent, cela a plutôt tendance à rendre sourd, aveugle et édenté et cela n'a jamais résolu les problèmes des hommes ni jamais apporté la paix !

Georges Tafelmacher
AGT ! - POP/GeM


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Réponse personnelle de Pierre !





------ Message d'origine ------
De : jeanneret.p@bluewin.ch [mailto:jeanneret.p@bluewin.ch]
Envoyé : mercredi, 11 juillet 2007 18:51
à : etafdelacote@hispeed.ch
Objet : pacifisme, etc.

Salut Georges,

Ton texte m'est parvenu. Comme tu as pris la peine de m'envoyer 3 pages (!), je veux au moins en accuser réception. J'avais préparé une réponse point par point, mais j'y renonce. Je ne veux pas perdre mon temps: le "dialogue" entre nous (sur ce sujet en tout cas) est un dialogue de sourds.
Laissons donc de côté le fond (il y des arguments auxquels je peux souscrire, d'autres que, comme historien notamment, je conteste résolument). Mais la forme de ton message ne permet pas un échange serein. Alors que tu fais preuve d'hyper-susceptibilité lorsqu'on se permet un propos qui ne te convient pas sur le GSsA (j'ai, quant à moi, admis que le terme "manipulation" était maladroit), tu n'hésites pas en revanche à caricaturer ou à déformer la position de ton "adversaire" pour mieux la combattre (ex. le terme "pacifisme bêlant", que précisément je récuse). Il y a au moins une forme de violence que le non-violent G. Tafelmacher ne refuse pas, c'est la violence verbale!!! Entre autres amabilités: je "m'en prends sans ambages au pacifisme" (?), je suis sur la ligne de la "droite dure et sécuritaire", je fais preuve de "fascination de l'armée", l'un de mes arguments est "particulièrement retors" (les autres sont donc simplement "retors"), un autre "frise le ridicule", etc. Il te faudrait admettre une fois pour toutes que celles et ceux qui ne partagent pas tes convictions - ou ta foi - ne sont pas nécessairement des imbéciles ou des salauds, ni des suppôts du complexe militaro-industriel yankee... Bollardière insistait sur le fait que, pour convaincre les autres de la justesse des thèses pacifistes, il est contre-productif de les insulter ou de les mépriser. Les conditions d'un dialogue serein sont l'écoute de l'autre et la tolérance, valeur fondamentale à mes yeux. Sinon, on bascule dans "l'intégrisme" verbal.
Je juge donc inutile que nous abordions désormais le sujet du pacifisme de l'armée.
Et surtout, arrêtons de faire monter les enchères. Cela risquerait de rendre problématique tout travail en commun dans le cadre du POP, et particulièrement dans celui, restreint, du comité. Il y a d'autres sujets sur lesquels - certes avec des approches et des sensibilités différentes - nous pouvons œuvrer ensemble de manière efficace.

Je te souhaite un bon été.

Pierre




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Pacifisme et PDT

La défense de l'armée suisse

Réponse de D.Künzi parus dans le Gauchebdo n°27 du 06 Juillet 2007

Dans votre édition du 29 juin, sous le titre «Pacifisme, défense et promotion de la paix», Samuel Schmid, chef de l'armée suisse, trouve un défenseur quelque peu inattendu en la personne de l'historien Pierre Jeanneret.

Celui-ci estime donc que «sous contrôle démocratique d'institutions nationales ou internationales, les armées peuvent servir à maintenir ou à promouvoir la Paix»; pour effacer toute ambiguïté, il déclare «soutenir l'existence d'une armée suisse au service des valeurs démocratiques et de la Paix (...)». Et de citer Jaurès l'auteur de «l'Armée nouvelle» ! Il ne s'agit pas de défendre une armée suisse idéalisée, mais celle qui existe en 2007.

Si l'armée suisse a bien une particularité, c'est celle d'avoir tué que des suisses...et je ne ferai pas l'injure de rappeler à votre historien le 9 novembre 1932 à Genève où l'armée a tiré sur une foule antifasciste, 16 morts et une centaine de blessés. Plus près de nous, il faut peut-être se souvenir des fameux exercices de Défense générale de l'armée suisse. Invariablement ceux-ci mettaient l'accent sur la répression des courants et partis progressistes helvétiques. Dans les années 80, l'un d'eux avait pour but l'interdiction du Parti du Travail, de la LMR, etc. Rien de neuf, c'est ce qui s'était passé pendant la mobilisation de 1939-1945 (interdiction du Parti communiste et des organisations à la gauche du PS, ainsi que de leur presse). Une vielle tradition helvétique !

Dans les années 90, le rapport d'enquête de la CEP 2 avait aussi mis en évidence, dans la foulée de l'affaire dite "des fiches", que les armées, aussi peu démocratique que secrètes, P-26 et P-27, devaient intervenir en cas de brusque changement politiques en Suisse, même s'ils étaient approuvés démocratiquement.

Pierre Jeanneret, à l'instar des cadres de l'armée qui ne parviennent plus à justifier ce gouffre à milliards, tente de nous convaincre d'une armée suisse humanitaire qui se rendrait à l'étranger pour des "missions de maintien de la Paix", où "la Suisse excellerait". L'armée suisse, dans son "Partenariat pour la paix de l'OTAN", cherche bien à se déployer à l'étranger (tentative d'achats d'avions de toute sorte, etc). Et elle met bien à disposition des soldats qui occupent l'Afghanistan. Mais si je suis bien renseigné, l'OTAN a pour but la défense des intérêts impérialistes de cette planète.

En conclusion, l'armée suisse dont nous parlons, reste un danger pour la démocratie, elle absorbe des milliards qui seraient plus utiles s'ils étaient affectés à la lutte contre la pauvreté en Suisse et dans le monde, et elle inutile pour défendre un pays entouré d'Etats qui ne lui sont pas hostiles.

Daniel Künzi
Genève


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Débat - «Pacifisme, défense et promotion de la paix»

Réponse de G.Tafelmacher parus dans le "Gauchebdo" n°28 du 13 juillet 2007

Débat - «Pacifisme, défense et promotion de la paix» paru dans le "Gauchebdo" n°26 du 29 juin 2007 dans lequel l'armée est relégitimisée et trouve dans son nouvel usage pacificateur, sa noblesse !

On cherche souvent à trouver des limites au pacifisme, mais ne faut-il pas s'interroger sur les limites de l'armée et du militarisme ?

Que nous prouve d'abord le recours aux armes ?  En parcourant l'histoire meurtrière des hommes, nous pouvons constater que ce recours n'a jamais abouti à une période de vraie paix citoyenne ou de meilleures relations entre les hommes, ni même à une amorce de démocratisation ou de liberté. La révolte armée de Spartacus contre le pouvoir esclavagiste romain fut réprimée dans un bain de sang effroyable et il a été crucifié avec tous ses camarades. La résistance armée des Camisards protestants contre l'intolérance autocratique royale a mis Louis XIV dans une telle colère qu'il a détruit le pays en incendiant mas et hameaux et en déportant ses habitants vers le Canada et l'Afrique du Sud. Dans l'ex-Yougoslavie, ce ne sont pas les bombardements à l'uranium appauvri et l'occupation par les troupes de l'OTAN qui ont renversé Milosevic, mais les grandes manifestations populaires. Les Américains ayant conquis leur indépendance par les armes, ont toujours vécu par la violence des armes comme en témoignent les guerres indiennes, la guerre civile, la guerre hispano-américaine, la conquête de l'ouest par le Colt45 et la Winchester, les tueries dans les lycées et le deuxième amendement. Sans parler des guerres contre l'Irak et de l'Afghanistan, les plus grands échecs militaires de tous les temps. L'énorme effort militaire des Américains - à côté de celui de l'Armée rouge - pour écraser le nazisme a produit les plus grandes dominations impérialistes qu'on ait connues, soumettant des milliards des gens notamment au Sud à l'arbitraire du pouvoir de l'industrie, de la finance et de la politique. Le recours aux armes de la Rote Armee et des Brigades Rouges a fini dans le sang, l'emprisonnement et le pouvoir économique a pu encore renforcer son pouvoir au-delà de tout ce qui est concevable. Les altermondialistes souffrent encore aujourd'hui de l'option armée de ses prédécesseurs contestataires et même les anarchistes ne se sont pas relevés de leur épisode terroriste.

Bref, le recours aux armes, outils au service de la violence et du pouvoir, ne peut engendrer à son tour que la violence, dans une spirale meurtrière sans fin. Les armes n'ont jamais libéré les hommes, elles n'ont fait que de rendre la conquête de la liberté encore plus meurtrière. Tous les cas de tentative de libération par les armes se sont soldés par un échec retentissant le plus souvent à l'avantage du pouvoir qui en profite pour se donner un "droit" à la guerre et de faire du recours aux armes, même les plus sophistiquées, la seule solution possible. La guerre contre le terrorisme appuyée par une politique répressive, armée et sanglante, nous démontre bien ce postulat. Ce n'est pas s'illusionner que de croire pouvoir abattre le totalitarisme par les seules méthodes de la non-violence, dans la mesure où ces méthodes seraient appliquées dès le début des conditions pouvant amener à la dictature.

J'estime que, même sous contrôle démocratique d'institutions nationales ou internationales, les armées ne peuvent en aucun cas servir à maintenir ou à promouvoir la Paix, parce que cela va à l'encontre de leur véritable nature. On veut nous faire croire que les valeurs démocratiques et de la Paix ne peuvent être défendue que par l'armée à l'exclusion de toutes autres possibilités non-violentes, pacifiques et associatives. Pourtant, on doit pouvoir mettre l'armée en question, comme on le fait avec le pacifisme, si nous voulons évoluer et promouvoir la paix par d'autres moyens que ceux des armes.

Promouvoir et maintenir la Paix : un prétexte

Les arguments présentés donnent une certaine légitimité à l'armée. Après la perte d'importance de la défense du territoire, le métier des armes essaie de retrouver sa "noblesse perdue" dans ces nouvelles missions que sont la promotion et le maintien de la Paix. Pour nous syndicalistes, altermondialistes, contestataires du système, l'armée a toujours été associée au pouvoir. Seule une armée populaire égalitaire sans grades ayant pour tâche unique et première la libération des gens du pouvoir totalitaire qui les accable, pourrait être légitime. Après avoir accomplie cette mission, elle devrait se dissoudre et les participants devraient retourner à leurs activités premières, "les uns dans des usines autogérées, les autres dans les forces de police populaires, les autres encore au sein de leurs familles et de leurs quartiers" (citations du sous-commandant Marcos).

Selon l'idée stéréotypée que se fait l'armée, l'homme a toujours été violent et guerrier et il le restera toujours malgré toutes nos tentatives de le changer. On apprend bien aux enfants de ne pas être agressifs et ils sont punis s'ils montrent des attitudes violentes ou s'ils contestent l'autorité en la mettent en question. On les apprend de ne pas réagir avec les poings et on les enseigne à régler leurs différents d'une manière pacifique et respectueuse de l'autre. On passe son temps à les fixer des limites, à faire de la prévention contre leur violence et à envoyer les forces de l'ordre contre eux à chaque occasion. Et voici qu'une fois arrivés à l'age adulte, on les envoie à l'armée pour les apprendre à tirer, à tuer, à réagir avec des armes à la main sous le fallacieux prétexte que l'homme serait fondamentalement mauvais et que tout changement serait de l'angélisme ou du pacifisme bêlant! Quel démenti de l'ordre social pacifié qu'on a essayé d'inculquer à nos chérubins !

Pour finir, il n'est pas correct d'associer les pacifistes à l'UDC blochérienne en laissant entendre que leur refus du recours aux armes amènerait le repli sur une Suisse isolationniste et égoïste. Au contraire, nous sommes pour une Suisse internationaliste, sociale et généreuse qui donne l'exemple en réglant ses différents pacifiquement.

Georges Tafelmacher
AGT ! - GSsA


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Débat - «Pacifisme, défense et promotion de la paix»

Réponse parue dans le "L'ESSOR" et le journal du GSsA

Débat - «Pacifisme, défense et promotion de la paix» paru dans le "Gauchebdo" n°26 du 29 juin. En réponse à nos questionnements de l'institution militaire, on cherche à relégitimiser l'armée en trouvant dans son nouvel usage pacificateur, sa noblesse !

La droite dure et sécuritaire ne supporte aucune limitation de l'armée alors qu'elle cherche à mettre des limites au pacifisme. Et pourtant, on doit pouvoir mettre l'armée en question et contester son emprise si nous voulons évoluer vers une société pacifiée et promouvoir la paix par d'autres moyens que ceux des armes.

Que nous prouve le recours aux armes ?

armeEn parcourant l'histoire meurtrière des hommes, nous pouvons constater qu'aucun recours aux armes n'a abouti à une période de paix citoyenne ou de meilleurs relations entre les hommes, ni même à une amorce de démocratisation ou de liberté. Par exemple, la révolte armée de Spartacus contre le pouvoir esclavagiste romain l'a amené à être crucifié avec tous ses camarades dans un bain de sang effroyable. La résistance armée des Camisards protestants contre l'intolérance autocratique royale a mis Louis XIV dans une telle colère qu'il a détruit le pays, incendiant mas et hameaux et déportant ses habitants vers le Canada et l'Afrique du Sud. Dans l'ex-Yougoslavie, ce ne sont pas les bombardements à l'uranium appauvri et l'occupation par les troupes de l'OTAN qui ont renversé Milosevic mais les grandes manifestations populaires. Les américains ayant conquis leur indépendance par les armes, ont vécu par les armes comme en témoignent les guerres indiennes, la guerre civile, la guerre hispano-américaine, la conquête de l'ouest par le Colt45 et la Winchester, les tueries dans les lycées et le deuxième amendement. L'énorme effort militaire des Américains et de l'Armée rouge pour écraser le nazisme a produit les plus grandes dominations impérialistes qu'on ait connues, soumettant des milliards des gens à l'arbitraire du pouvoir de l'industrie, de la finance et de la politique. Sans parler des guerres contre l'Irak et de l'Afghanistan, les plus grands échecs militaires de tous les temps. La Rote Armee et les Brigades Rouges qui ont recouru aux armes pour lutter contre le fléau néolibéral, ont été embastillés et le pouvoir économique a pu renforcer son pouvoir et a rendu toute opposition au capitalisme inopérant. Les altermondialistes souffrent encore aujourd'hui de l'option armée de ses prédécesseurs contestataires et même les anarchistes ne se sont pas relevés de leur épisode terroriste.

Nous pouvons donc tenir pour avérée la supposition que tout recours aux armes, outils au service de la violence et du pouvoir, ne peut engendrer à son tour que la violence, dans une spirale meurtrière sans fin et que tous les sursauts de l'humanité outragée ayant eu recours aux armes ont le plus souvent fini à l'avantage du pouvoir qui a utilisé ce recours aux armes pour justifier sa politique répressive et sanglantes et ses réponses armées. Nous pouvons craindre les illusions que peuvent engendrer les armes et la fascination que l'armée exerce sur les esprits impressionnables, car même sous contrôle démocratique d'institutions nationales ou internationales, les armées ne peuvent en aucun cas servir à maintenir ou à promouvoir la Paix, parce que cela va à l'encontre de sa véritable nature.

L'idée toute faite de l'homme que se fait l'armée !

L'armée repose sur l'idée toute faite postulant que seule la réponse armée viendrait au bout de la nature agressive des hommes et résoudrait les problèmes de la violence des humains. Mais l'arme est la représentation la plus forte du pouvoir car elle procure un pouvoir de vie ou de mort sur les autres. Les armes n'ont jamais libéré les hommes, elles n'ont fait que de rendre la conquête de la liberté encore plus meurtrière et sanglante. Tous les cas de tentative de libération par les armes se sont soldé par un échec retentissant le plus souvent à l'avantage du pouvoir qui en profite pour se donner un "droit" à la guerre et de faire du recours aux armes, même les plus sophistiquées, la seule solution possible. La guerre contre le terrorisme appuyée par une politique répressive et armée, nous démontre bien ce postulat.

Le refus du recours aux armes, contrairement à une fausse idée très répandue, n'est pas un acte de repli sur une Suisse isolationniste et égoïste. On veut nous faire croire que les valeurs démocratiques et de la Paix ne peuvent être défendue que par l'armée à l'exclusion de toutes autres possibilités non-violentes, pacifiques et associatives. Si on est réduit à prendre les armes, c'est que la situation s'est tellement péjorée que l'on n'a que cette solution pour se défendre. Mais à aucun moment ne s'est posée la question de savoir pourquoi la situation s'est pareillement dégénérée, qui l'a laissée se dégrader et pourquoi rien n'a été entrepris pour ne pas en arriver là. Au fond, tout se passe comme si on a tout fait pour rendre le recours aux armes acceptable. Ce n'est pas s'illusionner que de croire pouvoir abattre le totalitarisme par les seules méthodes de la non-violence dans la mesure où ces méthodes seraient appliquées dès le début des conditions pouvant amener aux dictatures.

Les arguments présentés par les généraux prompts à chercher toute justification de leur corporation, servent surtout à une "relégitimation" de l'armée. Le métier des armes essaie de trouver dans ce nouvel usage qu'est la promotion de la Paix et les missions de maintien de la paix, sa noblesse perdue. L'armée ne peut être "noble" parce que la nature de sa mission première est sanglante et meurtrière car elle est celle de "faire la guerre". Le véritable angélisme serait de croire que l'on peut conquérir sa liberté ou sa dignité par les armes ou que l'armée aurait acquise une "noblesse" en maintenant la paix. Pour nous syndicalistes, altermondialistes, contestataires du système, l'armée a toujours été associée au pouvoir et seule une armée populaire égalitaire sans grades pourrait être légitime et ceci que dans les situations désespérées où elle n'aurait pour tâche unique et première que la libération des gens du pouvoir totalitaire qui les accable. Après avoir accomplie cette mission, elle devrait se dissoudre et les participants devraient retourner à leurs activités premières, les uns dans des usines autogérées, les autres dans les forces de police populaires, les autres encore au sein de leurs familles et de leurs quartiers (citations du sous-commandant Marcos)...

L'armée se base sur l'idée que l'homme a toujours été violent et guerrier et il le restera toujours malgré toutes nos tentatives de le changer. On apprend bien aux enfants de ne pas être agressifs et ils sont punis s'ils affichent des attitudes violentes ou s'ils contestent l'autorité ou la mettent en question. On les apprend de ne pas réagir avec les poings et on les enseigne à régler leurs différents d'une manière pacifique et respectueuse de l'autre. On les fixe des limites, on fait de la prévention contre leur violence et les forces de l'ordre sont envoyées contre eux à chaque occasion. Et voici qu'une fois arrivés à l'age adulte, on les envoie à l'armée pour les apprendre à tirer, à tuer, à réagir avec des armes à la main en prétextant que l'homme serait fondamentalement mauvais et que de vouloir son changement serait de l'angélisme ou du pacifisme bêlant! Quel démenti de l'ordre social pacifié qu'on essaie de les inculquer !

Rendre la justice par les armes, c'est comme rendre œil pour œil ou dent pour dent, cela a plutôt tendance à rendre sourd, aveugle et édenté et cela n'a jamais résolu les problèmes des hommes et ni jamais apporté la paix. Travaillons, au contraire, pour une Suisse internationaliste, sociale et généreuse qui donne l'exemple en réglant ses différents pacifiquement !

Georges Tafelmacher
AGT ! - GSsA
PULLY


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LIENS

et bas de page




Exemple de pub pour les armes :

M-16 ...Selecting the weapon that will equip a country's Armed Forces is a crucial process with strong military and political implications. The best and most combat proven weapon in the world should therefore be chosen. The countless battlefields where our weapons have been successfully used, the U.S. Military and the Armies of more than 90 countries in the free world can confirm that only Colt is capable of offering a weapon that will have the capability to significantly increase the field readiness as well as the operational, tactical and strategic capabilities of a country's Armed Forces. Colt M4 Carbine is designed to surpass all the requirements for today's overall modern warfare strategy of tactical rapid deployment, mobility and increased firepower...




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Date de création : 08.07.2007  -  Dernière modification : 01.09.2008
Par :   Georges Tafelmacher   ©left 2007


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