L'initiative populaire «pour une Suisse sans nouveaux avions de combat» a été déposée par le "Groupe pour une Suisse sans armée" le 1er juin 1992; elle a recueilli 181'707 signatures valables en à peine trois mois de récolte. De plus, une pétition portant le même texte et munie de 318'000 signatures a été déposée. L'initiative vise à instaurer un moratoire en matière d'acquisition d'avions de combat, entre le 1er juin 1992 et le 31 décembre 1999. Il ne s'agit donc pas seulement d'empêcher l'acquisition de 34 F/A-18, cette acquisition a été à l'origine du lancement de l'initiative, mais surtout de mettre en question la nécessité même d'acquérir des avions de combat.
24 Heures du lundi 14 Juin 1993
Nouveau Quotidien du 12 Juillet 1993
MONSIEUR LE RÉDACTEUR
L'argumentation pro-F/A-18 repose sur des scénarios catastrophes ourdies par des âmes paranoïaques. Ces conjectures sont des spéculations lugubres sur un avenir conditionné par une vision pessimiste du monde qui procède d'une certaine conception manichéenne de l'homme, d'un certain jugement discriminatoire, d'une soi-disante réalité basée sur la compétitivité, l'agressivité commerciale et la guerre sous toutes ses formes. Pour justifier une Politique de Sécurité armée, on met en avant toutes sortes de menaces, on fait peur aux gens en les faisant croire que le monde est dangereux, imprévisible. C'est une forme particulièrement perverse de démagogie. Si le monde est réellement aussi dangereux, instable et menaçant que le pensent les pro-F/A-18, à supposer l'avènement de tels scénarios, la guerre du future risque d'être du genre guerre civile totale où on se battra clan contre clan, quartier contre quartier. Dans ces conditions, le F/A-18 ne sera d'aucune utilité.
L'avenir ne sera que ce qu'on construit au présent et rien d'autre. Si, au présent, nous construisons des scénarios de guerre, nous aurons la guerre. Si, au contraire, nous nous efforçons de construire une société où les peuples s'entendront dans une joie de vivre, nous aurons la paix. En ces temps de changements, nous devons construire la paix par une Politique Globale de Paix en investissant notre argent et nos énergies pour apprendre à vivre en paix avec nos voisins. Nous devons contribuer à diminuer les menaces en aidant les pauvres des pays du monde à prendre en main leurs destins et à vivre pleinement leurs présents si nous ne voulons pas que notre monde sombre dans des situations de guerre catastrophique.
Puisque les adversaires dés initiatives GSsA Stop F/A-18 ont voulu transformer la votation du 6 juin en un plébiscite pour l'armée, nous pouvons donc déduire que, le soir du 6 juin, les antimilitaristes et les pacifistes ont marqué une grande victoire. Car les 43% de oui à l'initiative sont devenus, par le fait de l'argumentation des pro-F/A-18, 43% de non à l'armée, chiffre en nette augmentation par rapport aux 36% de la votation "Suisse sans armée" de novembre 1989.
Plus grave, d'après l'argumentation militariste, il y aurait en Suisse plus d'un million de traîtres à la patrie, de mauvais citoyens irresponsables, prêts à déstabiliser notre pays et à affaiblir ses institutions. Cette discrimination et criminalisation des gens sont un gâchis et l'on ne peut prétendre gouverner dans ces conditions.
Il serait temps de mettre sur pied une véritable stratégie de prévention des guerres, de résolution pacifique des conflits, d'éducation à la non-violence. Surtout i1 faut que nous apprenions à vivre en paix avec nous-mêmes et nos voisins si nous ne voulions pas que notre monde sombre dans des situations de guerre civile où le F/A-18 ne serait d'aucune utilité.
Si en voulant la paix nous préparons la guerre, nous aurons la guerre et pas la Paix. Si, au contraire, nous nous efforçons de construire une société où les peuples s'entendront dans une joie de vivre, nous aurons la paix. En ces temps de changements, nous devons construire la Paix par une Politique Globale de Paix en investissant notre argent et nos énergies pour apprendre à vivre pleinement nos présents en prenant en main nos destins et en construisant une société solidaire.
Georges Tafelmacher, Pully
extrait de l'Avant-propos d'un document de travail devant démontrer la nécessité pour la Suisse de se procurer de nouveaux avions de combat modernes
En octobre 2003 le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) a rendu public le 1er numéro de la Air Power Revue. Déclarée comme un document de travail, celle-ci devrait démontrer la nécessité pour la Suisse de se procurer de nouveaux avions de combat modernes. Que l'armée veuille acheter de nouveaux avions n'est pas une surprise, surtout depuis que le Blick a révélé l'existence de la liste d'achat des voeux du Conseiller fédéral Samuel Schmid.
L'Air Power Revue montre pourtant aussi d'autres éléments. Ainsi, des avions-candidats sont mentionnés. Bien plus explosif est pourtant un autre thème : "La capacité d'ouvrir le feu depuis les airs."
Le DDPS aimerait, d'ici 2007, une décision positive du Parlement sur cette affaire. D'ici 2010, les 54 Tiger-Jets vieillis devraient être remplacé par des avions de combats modernes. Les 33 machines coûteraient environ 4,5 milliards de francs suisses. Ici se situe justement la raison de la panique qui se fait déjà sentir chez les militaires de haut rang. La Confédération veut économiser des milliards ces prochaines années. Où devrait-on dès lors prendre l'argent nécessaire pour l'achat de ces avions de combat ? Une solution serait de vendre du matériel militaire qui n'est plus utilisé. Entre autres, les Tigers F-5, les chars à troupe M-113 et les chars blindés Leopard.
Pourquoi la Suisse a "besoin" de nouveaux Jets
Une des raisons avancée de se procurer de nouveaux avions militaires est la nécessité d'avoir la capacité de défendre de manière permanente notre espace aérien. Aujourd'hui, l'armée ne disposerait pas de cette capacité alors que nous avons acheté 34 F/A-18 en 1993 pour 3,5 milliards de francs et qu'ils étaient censés "couvrir" nos besoins de défense aérienne jusqu'en 2012 !
La démence
La question est inévitablement: pourquoi avons-nous besoin d'un tel "service"? Logiquement, pour garantir la souveraineté aérienne de la Suisse. Mais la réponse n'est pas vraiment logique. Si l'on part du principe qu'on entend par souveraineté aérienne le contrôle des vols civils, les Forces aériennes doivent se poser la question pourquoi ce travail ne peut être accompli avec quelques Tiger. Mais s'il s'agit de protéger notre espace aérien d'avions ennemis, se pose une autre question. À quoi devraient servir 66 avions contre la flotte aérienne de milliers d'avions, par exemple, de l'Allemagne ou de l'Italie ou même de l'OTAN si ces pays se mettent en guerre et décident de nous envahir ?
Capacité d'ouvrir le feu depuis les airs
Cette définition irritante du militaire ne signifie rien d'autre que le fait que les Forces aériennes suisses doivent être à présent prêtes à atteindre des cibles au sol depuis les airs. Avec ce voeu du DDPS, un nouveau chapitre de l'armée suisse s'ouvre. Jusqu'ici, nos avions ont été exclusivement armés de systèmes qui permettaient le combat avec des cibles volantes. D'après la volonté de l'armée, ceci devrait maintenant changer. En fait, cette évolution débuta déjà dans les années quatre-vingt-dix lorsque les F/A-18 ont été achetés. Cet avion a été spécifiquement conçu pour l'utilisation sur des porte-avions et est prévu tant comme avion d'interception que comme bombardier léger.
L'OTAN vole avec les F/A-18
«La défense autonome est terminée» dit une citation du Commandant de corps Keckeis (NZZ am Sonntag, 4 janvier 2004, page 7). Les nouveaux avions devront être "euro-compatibles" et puisque le F/A-18 équipe la majorité des forces aériennes européennes, il serait "sage" de le recommander !
Le pays a besoin d'un nouveau jouet
Pour rester au top de le technologie et pour protéger l'espace aérien, après la votation populaire de 1993, 34 avions de combat du type F/A-18 ont été achetés. D'après la doctrine de l'époque des Forces aériennes, les avions n'auraient dû être utilisé que pour la surveillance de l'espace aérien. L'expérience a pourtant montré que les F/A-18 ne disposaient pas de bonnes spécificités pour les combats aériens. Les réacteurs sont trop faibles pour les énormes bolides. Cette réalité laisse apparaître que les F/A-18 sont inflexibles et inertes.
Perspective
Savoir comment on peut combattre l'achat de ces 33 nouveaux avions militaires va être une question lancinante ces prochains temps au GSsA. Ces dernières semaines, le thème a déjà été abordé. Quatre variantes sont aujourd'hui imaginables :
– votation au Parlement ;
– référendum financier ;
– référendum sur l'armement ;
– moratoire sur l'achat d'avions militaires.
Globalement, on peut dire les choses suivantes sur ces variantes: les référendums et le moratoire nécessitent une modification constitutionnelle. Nous devrions ainsi réunir 100'000 signatures. Que nous en sommes capables, nous l'avons déjà prouvé à trois reprises, mais cela nécessite un énorme engagement. Par ailleurs, le temps devient serré, car d'après les planifications du DDPS le Parlement devrait voter en 2007. Du lancement de l'initiative jusqu'à l'établissement des diverses lois, on peut compter environ cinq ans.
Votation au Parlement
Un jour ou l'autre, l'affaire "avions militaires" parviendra au Parlement. Le moyen le plus efficace d'empêcher l'achat de ces avions est certainement une large coalition opposée dans les deux Chambres. Ce qui pourrait paraître légèrement utopique au premier abord est pourtant pour le moins possible. L'extrême droite a montré, dans le passé récent, de la résistance contre les achats d'équipements qui sont d'après eux prévus pour les engagements à l'étranger. D'ailleurs, depuis les élections de 2003, nous avons un "représentant-GSsA" au Parlement, par la personne de Jo Lang.
Référendum financier
Le but d'un référendum financier est de donner la possibilité au peuple de s'exprimer sur les dépenses de la Confédération. Il serait ainsi possible de soumettre au peuple toutes les dépenses de la Confédération. Avec 30'000 signatures nous pourrions voter sur l'achat d'avions militaires. Dans ce cas-ci, on aspirer à l'horrible alliance rouge-verte et UDC. L'extrême droite serait certainement aussi intéressée à un tel instrument. Un référendum financier pourrait pourtant avoir un effet boomerang. De facto, on pourra aussi utiliser un tel référendum contre les dépenses en faveur de la formation ou du social.
Référendum sur l'armement
Un référendum sur l'armement serait, pour le GSsA, un instrument puissant [...]. Ainsi, il serait possible de demander un référendum sur chaque nouvelle acquisition de l'armée avec 30'000 signatures. L'opposition à cette possibilité pourrait certainement être extrêmement grande. L'armée ne permettra certainement pas que nous puissions nous opposer à l'achat de chaque lacet de chaussure. Un argument des opposants pourrait certainement être celui des coûts élevés de toutes les votations. Ceci a bien évidemment encore d'autres défauts : nous devrions à chaque fois trouver 30'000 signatures.
Moratoire sur l'achat d'avions militaires
De nombreuses citoyennes et citoyens pourraient tomber de leur chaise en apprenant que la Confédération doit économiser partout, mais a suffisamment d'argent pour acheter de nouveaux avions militaires. Un moratoire sur l'achat de nouveaux avions militaires pourrait, pour cette raison, avoir un certain succès devant le peuple. On pourrait également étendre ce moratoire sur d'autres dépenses futures de l'armée. Je pense ici particulièrement aux avions de transport ou encore aux hélicoptères armés (de légers avions de transport et de tels hélicoptères sont également sur la liste de voeux du DDPS, mais ont été enlevés du budget pour des raisons d'économie). Pour le GSsA, cette solution a pourtant un problème : un moratoire étant en principe limité dans le temps et, d'ici une dizaine d'années, il faudrait trouver une nouvelle solution.
Groupe de travail "avions de combat"
septembre 2003 - octobre 2003
Un nouvel avion pour les militaires ?
Le Parlement se met à douter. Kaspar Villiger, lui, poursuit sa quête, au risque de tout perdre – ambiance politique de l'époque !
Promu président de la commission de la politique de sécurité de la Chambre haute, le conseiller aux États Otto Schoch sera l'un des animateurs des futurs débats militaires au Parlement. Et le premier de ces débats à venir lui cause d'infinis soucis: le F/A-18, le chasseur américain qui doit parfaire la maîtrise militaire du ciel helvétique, est-il indispensable à notre armée? La question est légitime pour un parlementaire consciencieux comme le radical Otto Schoch. Mais en la posant plus ou moins en ces termes à Kaspar Villiger l'autre jeudi lors d'une réunion discrète de la commission, il a plongé le chef du Département militaire dans des abîmes de perplexité. Kaspar Villiger croyait être arrivé aux dernières étapes du long processus qui doit aboutir à l'achat de trente-quatre F/A-18. II va soumettre l'objet au Conseil fédéral avant Noël et compte sur la bonne volonté du Parlement pour que ce dernier approuve au début de l'année prochaine un crédit de trois milliards et demi de francs. Et voilà que les sénateurs s'interrogent, qu'ils laissent entendre que la décision pourrait tout aussi bien être prise en 1993. «Je suis d'avis qu' il faut très très bien étudier cette histoire...» dit Otto Schoch. Et pour ajouter au désarroi de son camarade de parti et conseiller fédéral, il suggère quelques pistes de réflexion: ne devrait-on pas envisager de nouvelles stratégies de défense pour notre aviation, par exemple avec d'autres pays européens, par exemple avec l'OTAN ?
Il est des semaines où tout va mal. Kaspar Villiger le mal aimé, le mal élu, sait qu'il est des hésitations qui tuent. Et que si le Parlement n'achète pas tout de suite l'avion, c'est le principe même de l'achat qui sera sérieusement remis en cause. Il se défend donc, insiste. «Je ne voudrais pas entrer dans l'Histoire comme le ministre de lu Défense à qui l'on reprocherait d'avoir trop peu prévu...» disait-il récemment dans une interview. La passe d'armes de jeudi dernier n'est qu'un épisode d'un formidable renversement de situation qui est en train de s'opérer. Lors des entretiens de Watteville que mènent les partis gouvernementaux, le Parti socialiste a formulé à nouveau son opposition à l'achat d'un chasseur, mais la surprise est venue des autres partis: ils souhaitent, comme Otto Schoch, qu'on étudie encore, que l'on discute notamment de l'ensemble de la politique de sécurité. À l'évidence, ils cherchent les moyens dilatoires pour repousser l'heure du choix.
Le nouveau Parlement, issu du scrutin d'octobre, n'est pas davantage enthousiaste. Les derniers sondages montrent qu'une majorité de députés est opposée à l'achat du F/A-18. Le clivage gauche-droite qui se marque systématiquement dans les affaires militaires est ici effacé. L'opposition court à travers tous les partis. Flavio Cotti lui même, révèle l'hebdomadaire dominical "SonntagsBlick", ne trouverait pas de bon goût de proposer l'acquisition des avions au moment où les partis discutent précisément d'un programme minimal de gouvernement. Il y a dix jours, Melchior Ehrler, directeur de l'Union suisse des paysans, osait jeter l'opprobre sur une telle dépense, disant tout haut que l'on serait mieux inspiré de soutenir les agriculteurs que d'acheter des F/A-18. Les paysans en colère, piliers de la défense nationale, osent égratigner l'alliance sa crée avec l'armée. Quant à Helmut Hubacher, président de la commission de sécurité du Conseil national, il s'est jeté sur l'ultime offre du constructeur du F-16: la firme General Dynamics a fait savoir qu'elle serait prête à vendre trente-quatre appareils pour deux milliards et demi, c'est-à-dire un milliard meilleur marché. «Nous allons examiner la proposition de plus près», dit-il. Dans le même temps, les revues américaines spécialisées font état des critiques des militaires de la Navy qui ne souhaitent pas piloter des F/A-18 : ils les trouvent trop lents ! Preuve que l'heure est grave: la "Neue Zürcher Zeitung" a publié samedi dernier un long plaidoyer en faveur de l'avion, démontant soigneusement les critiques. L'achat du F/A-18 est une question existentielle pour notre défense nationale, prévient-elle.
C'est sans doute aussi une question de survie politique pour Kaspar Villiger. Aux durs de l'état-major, aux ennemis de la réforme de l'armée, il a toujours pu faire valoir son combat indéfectible pour l'avion. «Acceptez ma réforme, leur proposait-il, et je me battrai pour vendre le F/A-18 aux politiciens.» Si le Parlement n'exauce pas ce vœu le plus cher, il n'aura plus grand-chose à porter à son crédit. Kaspar Villiger serait comme le roi nu.
André Crettenand
L'HEBDO - 12 DéCEMBRE 1991
Message - du parlement
Des explications - du Conseil Fédéral
Critiques - Décolleront, décolleront pas ?
Liens - aux A R M E S
"Le DDPS" les militaires veulent quatre milliards pour 33 avions
"Basler Zeitung Tages-Anzeiger" Nouvel avion pour les Forces aériennes
"Le ciel s'éclaircit" pour Ueli Maurer !
"On clôt un programme d'armement" réussi et économe
"Federation of American Scientists" Military Analyses Network
"Military Analyses Network" pour tout savoir sur le F/A-18 !
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