Violeurs à 10 ans, comment punir ?
Le jour de Noël, trois jeunes àgés de 10, 12 et 13 ans et originaires de Turquie et de Serbie-Monténégro ont tenté d'abuser d'une fille de 15 ans à Bâle. La police les a simplement rendus à leurs parents.
Est-ce suffisant ?
L'avis de l'avocat genevois Charles Poncet.
MM : Que risquent, légalement, ces agresseurs en culottes courtes ?
Poncet : Pas grand-chose, selon notre système, il faut éduquer les 10, 12 ans, pas les emprisonner. Les délinquants sont pourtant de plus en plus jeunes. À croire qu'on devrait en revenir aux maisons de correction du XIXe siècle !
MM : Comment peut-on les punir ?
Poncet : J'ai trois filles, je réagis en père. Je serais partisan de peines très sévères, comportant la privation de liberté et un régime strict d'éducation dans un établissement où la vie soit dure et les punitions fréquentes.
MM : Doit-on accepter ces comportements comme une évolution de la jeunesse ?
Poncet : Non, absolument pas! Le viol et les agressions sexuelles sont intolérables !
MM : Ces cas sont-ils nouveaux, ou tout simplement plus médiatisés ?
Poncet : Le problème est nouveau. Or, nous sommes encore prisonniers des schémas permissifs des années soixante. J'ai personnellement vu des voyous rigoler en sortant du Tribunal de la jeunesse où des sociologues au crâne ovoïde s'étaient gravement interrogés sur les causes de leurs actes, au lieu de les punir sévèrement...
Propos recueillis par Jean-François Duval
Comme une litanie, on accuse l'éducation dite "permissive" d'être responsable de la soi-disante "déchéance" sociale. Dans l'espoir d'y remédier, depuis l'an 2000, on a renforcé les lois, durci les sanctions et punitions, augmenté les forces de police, instauré des règles sévères dans les classes, sanctifié la répression, justifié le recours à la violence d'état, criminalisé toute une série de comportements dont ceux rapportant à la contestation et pourtant, les "phénomènes de société" continuent à faire la "UNE" des médias et ne semblent pas diminuer pour autant. Pour contrer ces dérives, depuis l'an 2001, nous sommes policés, fliqués, surveillés, réglementés, sermonnés, et pourtant la violence continue d'augmenter.
Interrogez les parents, vous n'y trouverez aucun qui a promulgué une éducation dite "permissive" à leurs progénitures. Au contraire, il se trouve que plus de 40% des parents les ont donnés au moins une fois une baffe ou une fessée. Les parents dont on accuse d'être "permissifs" sont ceux qui ont de tels problèmes personnels qu'ils ont démissionné ou ont abdiqué ou ont déserté leurs foyers, ce qui n'a rien à voir avec les schémas permissifs des années soixante. Mais ils ne représentent qu'un tout petit pourcentage des "éducateurs" et il est pour le moins surprenant qu'ils ont pu influencer à ce point cette société qu'elle soit devenue aussi violente. Le plus piquant, nous ne savons rien des conséquences de l'éducation dite "traditionnelle" dans la montée de la violence actuelle.
© MM et G.Tafelmacher
«Retourner à la tradition»
Nos ancêtres ne connaissaient pas le téléphone portable mais savaient bien que l'humain couve en son tréfonds la méchanceté. Ne disaient-ils pas qu'il fallait à l'enfant maintes taloches pour en faire un être à peu près social? L'esprit du temps feint de croire que l'homme est bon et la société mauvaise. Réminiscence des idées de J.-J. Rousseau, le pédagogue qui abandonna ses enfants...
S'il y a quelque chose de pourri dans nos sociétés, c'est bien par la faute de l'homme. Dépouillé de sa dignité métaphysique, il se trouve entre la puissance démesurée de ses possibilités d'action et un manque total d'orientation éthique.
Pour rétablir l'équilibre, il faut revenir à certaines choses simples et fondamentales, revenir aux nécessaires hiérarchies sociales, réinventer un nouveau commencement. Que les enfants obéissent à leurs parents et écoutent leurs professeurs, éveilleurs de leur responsabilité personnelle. Que les parents redeviennent de véritables parents et les professeurs des enseignants dignes de ce nom et non point des "mecs cool" ou des "nanas sympas". Il faut aussi arrêter de croire à une histoire linéaire de type marxiste où l'homme, avec un grand H, serait par nature destiné à toujours s'améliorer.
Fadaise !
Que les politiques qui voient clair, qui pensent et marchent droit (il y en a), aient la possibilité de se faire entendre du peuple, et que celui-ci s'arrache à une torpeur mortelle pour vivre comme ses anciens, honnête et fidèle aux vraies valeurs, celles sans le respect desquelles il n'y a que malheur et désespoir.
La tradition, c'est l'héritage des ancêtres et sa continuation créatrice.
Edy Erismann, Les Venéresses, Bex
«En finir avec la tradition élitiste»
Monsieur,
Vous nous avez exposé dans votre lettre parue dans le 24heures du mercredi 07 décembre 2005 sous la rubrique "Vous avez la Parole", vos visions simplistes et étriquées sur l'homme et les nécessités de "combattre" sa soi-disante "méchanceté" par les taloches. Une telle opinion semble surprenante en ces temps où une nouvelle compréhension non-dichotomique du monde se fait jour et cette volonté de talocher les "pourris" met en avant les sempiternelles récriminations des nostalgiques désécurisés contre toute forme de pensée "rousseauiste" et sa prise de conscience.
Ces visions me paraissent être un combat d'arrière-garde liberticide. En effet, selon vous, l'homme générique serait le vecteur du désordre social chronique actuel alors que nous vivons dans une société faite de violence issue de l'héritage traditionnelle: politique de droite de contrainte et ses rapports de force entre les nantis et le peuple, concurrence économique, poids commercial disproportionné au social, déséquilibre entre les directions et les employés, entre magistrats et citoyens, système de propriété privé élitiste, moralisme ancestral, etc.
Vous nous demandez de vivre comme les anciens, honnêtes et fidèles aux vraies valeurs mais qu'en est-il réellement? Par l'éducation qu'ils ont reçue, nos anciens ont infligé au monde la guerre franco-allemande de 1870 (effroyable boucherie où la population de Paris a été bombardée, affamée et réduite au silence), la guerre de 14-18 (encore plus effroyable par sa mécanisation et ses gaz), la guerre 39-45 (holocauste et la bombe atomique), l'économie boursière et l'industrialisation totalitaire. Les valeurs que nos anciens nous ont transmises sont la loi du plus fort, le contrôle social absolu, l'élitisme, la subordination et la soumission complète des individus censés demeurer à plat ventre devant des autorités saoules de pouvoir. Ce sont ces valeurs qui nous valent les déboires présents et que nous devons terrasser si nous voulons continuer notre trajet sur cette terre ensanglantée.
Certains lecteurs se sont persuadés que l'être humain couve en son tréfonds la méchanceté et ils nous en donnent la preuve en nous assénant leurs contrevérités d'une méchanceté absolue, notamment celle de vouloir talocher les gens pour les faire entendre raison! Ce sont eux les "méchants" qui déversent leur hargne sur tout le monde.
Mais l'homme n'est ni bon ni méchant, il veut tout simplement vivre aussi bien qu'il le peut et sa soi-disante "méchanceté" n'est que le reflet de son formatage psychosocial et des pressions inouïes ourdies sur lui pour qu'il soit conforme à l'idéale sociale que certains veulent lui faire endosser malgré lui. Et la société en tant que telle n'est pas mauvaise, c'est la visée de certains hommes ambitieux qui cherchent à manipuler les contextes et les gens pour leur enrichissement personnel qui rend la modernité insupportable et révoltante.
Je vais faire paraître une réponse mise-au-point sous la rubrique "Vous avez la Parole" intitulée «En finir avec la tradition élitiste» en vue de rectifier l'image de l'homme auprès du grand public. J'espère que vous daignerez lire cette réponse qui est adaptée à vos exigences.
En vous remerciant de l'intérêt que vous portez à ma réponse, veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
du seul vrai "citoyen"
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Qui accuse, s'accuse
Monsieur,
Je vais vous répondre avec vos propres mots tirés de votre lettre de lecteur - fadaise !
Je ne sais pas où vous avez vu un "ruissellement d'haine" dans ma lettre mais votre lettre courante, ainsi que votre lettre de lecteur, elles en suintent! Vous m'accusez d'en avoir mais il me semble que c'est plutôt vous qui en êtes bien pourvue étant donné que vous avez réussi à placer ce mot plus de cinq fois dans une si petite note. Et puisqu'il en est ainsi, comptons le: celle de J.-J. Rousseau, des "mecs cool" et des "nanas sympas", de l'interprétation marxiste de l'histoire, de l'Homme, de la gauche-extrême, et tant d'autres...
Vous dites que vous ne faites pas l'apologie de la taloche et pourtant n'avez-vous pas écrit: «Ne disaient-ils pas qu'il fallait à l'enfant maintes taloches pour en faire un être à peu près social»? Cette petite phrase laisserait entendre que vous êtes d'accord que c'est ce qu'il faudrait pour maîtriser la "méchanceté" de l'Homme !
Vous avez écrit que ma lettre n'engage à aucun dialogue mais j'aurais quand même envie de vous faire remarquer que ce sont plutôt les vôtres qui claquent toutes les portes et surtout la dernière qui, en guise de réponse à la mienne, s'en prend à ma personne elle-même! Au lieu de chercher à me convaincre avec des arguments dûment charpentés, vous avez aligné un chapelet impressionnant de qualificatifs péjoratifs et dégradants contre ma personne alors qu'à aucun moment, je vous ai attaqué personnellement. En effet, vous ne m'avez épargné aucun jugement – "ruissellement d'haine", "avatar mai'68", références dépréciatives de mon lieu d'habitation et de ma qualité de "citoyen" ressenti comme "dangereux", mensonges grossiers, incapacité de lire, etc...
Finalement, vous devez vous relire avec un peu plus d'esprit critique car toutes les accusations et les jugements dont vous m'affublez se trouvent dans vos lettres et s'appliquent sans réserves à votre démarche première – juger toutes les personnes qui professeraient des "fadaises" rousseauistes ou marxistes. De plus, vous semblez en vouloir à l'esprit du temps mais ce ne sont ni les activistes soixante-huitards, ni les marxistes qui en sont les initiants mais belle et bien les top-mangers et les dirigeants économico-politiques avides de richesse et de pouvoir et actifs au sein même de cette société pour lesquels vous ne vous êtes pas méfié lorsqu'ils sont arrivés à quelque pouvoir! En effet, il s'avère que vous accusez l'homme générique d'être pourri mais cela semble exclure les autorités, les professeurs, les chefs d'entreprises, en bref – les "nécessaires hiérarchies sociales" et votre injonction consistant à "réinventer un nouveau commencement" pourrait par trop ressembler à l'homme nouveau hitlérien ou à l'idéal de Lénine si on n'y prend pas garde.
Permettez-moi de quand même vous faire remarquer que vous n'avez pas à craindre ou à vous méfier si j'arrivais à quelque pouvoir pour la simple et bonne raison que jamais je ne prendrais le pouvoir même si on me le donnait. Je tiens aussi à vous dire que si j'habite effectivement à Pully, ce n'est pas dans une zone "résidentielle" riche et cadenassée mais dans le petit hameau du Port où nous avons créé deux sociétés de défense locales pour assurer un développement concerté et harmonieux du quartier. Non seulement je parle tout à gauche mais, de plus, je "bouffe" (selon votre appréciation dépréciative!) à gauche ou plutôt, j'agis à gauche dans le cadre d'assemblées générales et de comités. Votre attaque contre ma fonction "politique" est donc abusive et n'est que donc qu'une attaque personnelle, une de trop !!
C'est à vous-même qu'il faudrait dire de changer de registre...
Avec toute ma considération...
«SOCIÉTÉ HUMAINE • Insupportable modernité»
On nous demande de vivre comme ces anciens, honnêtes et fidèles aux vraies valeurs, mais qu'en est-il ?
Par l'éducation qu'ils ont reçue, nos anciens ont infligé au monde la guerre franco-allemande de 1870 (effroyable boucherie où la population de Paris a été bombardée, affamée et réduite au silence), la guerre de 14-18 (encore plus effroyable par sa mécanisation et ses gaz), la guerre de 39-45 (holocauste et la bombe atomique) et l'industrialisation totalitaire.
Les valeurs que nos anciens nous ont transmises sont la loi du plus fort, le contrôle social absolu, l'élitisme, la subordination et la soumission complète des individus censés demeurer à plat ventre devant des autorités saoules de pouvoir. Ce sont ces valeurs qui nous valent les déboires présents et que nous devons terrasser si nous voulons continuer notre trajet sur cette terre ensanglantée.
Certains lecteurs croient que l'être humain couve en son fond la méchanceté et ils nous en donnent la preuve en nous assénant leurs contrevérités d'une méchanceté absolue, notamment celle de vouloir talocher les gens pour leur faire entendre raison! Ce sont eux les "méchants" qui déversent leur hargne sur tout le monde.
Mais l'homme n'est ni bon ni méchant, il veut tout simplement vivre. Sa soi-disant "méchanceté" n'est que le reflet de son formatage psychosocial et des pressions inouïes ourdies sur lui pour qu'il soit conforme à l'idéale social que certains veulent lui faire endosser malgré lui. Et la société en tant que telle n'est pas mauvaise, c'est la visée de certains hommes ambitieux – qui cherchent à manipuler les contextes et les gens pour leur enrichissement personnel – qui rend la modernité insupportable et révoltante.
© 24heures et G.Tafelmacher
La culture du respect !
Le libéralisme libertaire ambiant a placé l'individu au centre de tout.
L'individualisme domine : Je m'occupe de moi.
L'hédonisme prévaut : Je me fais plaisir.
Le culte du corps s'affiche : Je m'entretiens.
En résumé, tout ce qui ramène l'homme à sa finitude est refoulé.
Seul compte l'instant présent.
Le monde a changé de morale.
Le corollaire de cette évolution est la généralisation du relativisme.
Puisque tout choix est personnel, toute vérité est relative.
Les valeurs sont soumises au libre arbitre de l'individu.
Distinguer est devenu immoral, d'où le primat accordé à la tolérance, référence obligatoire.
Bousculer, changer, innover, tels sont les mots d'ordre à suivre.
Le conservatisme subsiste non à titre de credo, mais de péché.
Que pouvons-nous espérer d'une société qui survalorise les droits de l'individu au détriment de ses devoirs ?
Rien, le chaos !
Une culture de violence se développe sur ce terreau.
Ne cherchons pas midi à quatorze heures.
L'explosion de la délinquance est le fruit d'une société déstructurée par la mentalité individualiste, par l'esprit hédoniste, par le refus de l'autorité, par le flux de la rue, par le refus des normes, par la perte des repères, par le relativisme moral.
Substituer à cette culture de la violence la culture du respect devrait être la tâche primordiale des politiques, des éducateurs, des parents, des religieux.
Edy Erismann
1880 Les Venéresses/sur/Bex
Tout le paradoxe de notre époque est résumé dans ces quelques phrases. En effet, vous condamnez sans réserve notre époque en laissant entendre que derrière le chaos que vous décrivez, il y a le libertaire qui, selon vos percepts intégristes de la morale, serait le diable en personne. Vous créez ainsi l'idée que toute la faute de la dégénérescence actuelle de notre société reposerait sur les méfaits de quelques individus hédoniques ayant adroitement et machiavéliquement instillé dans la société leur perversité individualiste. Ainsi ce ne seraient pas les bons patrons "nestléiens", ou nos magnifiques entrepreneurs libéraux et radicaux "hayekiens", ou nos grands banquiers "landoltiens" ou nos politiciens de droite (et même de l'extrême-droite UDC) "blocheriens", ni les sublimes penseurs conservateurs "finkelkrautiens" qui ont mené notre société à l'état que vous décrivez dans votre lettre ornée de votre jugement discriminant de fin de monde mais quelques libertaires égarés qui auraient réussi à convaincre les masses et ses dirigeants de dériver vers un chaos programmé.
Une analyse plus poussée montrerait au contraire que tous les faits que vous dénoncez ne sont que la conséquence de l'application à la lettre de la théorie du "grand marché libre" que les milieux d'affaires, bancaires, industriels et de politique conservatrice nous ont consciencieusement inculqué depuis la fin de la deuxième guerre mondiale avec une constance et une détermination intentionnelles digne des manigances dictatoriales issues des obsessions déterministes du 19ième siècle conquérant où la croyance en le progrès technologique a envahi la totalité des mentalités de droite et, malheureusement, de gauche. Or dans votre prose chape de plomb et langue de bois du conformisme vertueux, nous ne voyons aucune référence à ces instances de droite qui ont, sans retenue aucune, formaté toute la société à leurs concepts et leurs valeurs basées sur le mérite, l'hiérarchie et l'autorité incontestée. La bourse et ses dérives ne sont pas une invention des libertaires ou de la gauche en général mais le résultat d'une concertation de la droite libérale et des conservateurs élitistes qui, pour asseoir un pouvoir certain et un contrôle social total, se prêtent à tous les intérêts inavouables.
Vous vous êtes coincé dans les rails de votre pensée-unique conservatrice où toute notre société est jugée selon vos modalités moralistes qui condamnent sans recours possible une seule classe spécifique que vous pensez être le vecteur de la violence sociétale que vous dénoncez tel un archange trompetant des hauts des cieux. Je ne vois nulle part dans votre démonstration l'élaboration d'une mise en accusation de la consommation alors que cette consommation est une invention bien de droite issue des milieux les plus conservateur en vue de maintenir les masses sous leur contrôle absolu. En effet, un individu, lorsqu'il est transformé en "consommateur", est facilement manipulable à souhait et sera d'autant plus influençable qu'il aurait peur de ne pas pouvoir pourvoir à la satisfaction de ses besoins car s'il ne peut les réaliser, il sera prêt à toutes les aberrations pour au moins conserver un minimum vital. Le problème n'est donc pas l'individualisme en tant que tel mais le fait d'avoir fait d'individus au demeurant autonomes et réfléchis, des sujets aliénés coupés de leurs êtres profonds et jetés sans ménagement dans le monde de la consommation et des marchés tout puissants.
La question devrait donc être – qui est derrière cette transformation des individus en consommateurs ?
Les libertaires et la gauche honnie ?
Non, mais un conglomérat de conservateurs avide de pouvoir et de richesses dorées.
Avez-vous dénoncé cela ?
Non, vous gardez bien de le faire alors qu'il est évident que la mentalité entrepreneuriale d'un Blocher a fortement contribué à l'instauration de cette mentalité de consommation et de toutes ses dérives que vous dénoncez avec tant de vigueur et de tournures de phrases emphatiques !
Il me semble que, avant toute tentative de jugement apocalyptique, nous devons énoncer quels sont les problèmes et les analyser sereinement pour poser les bases d'une compréhension de ce qui se passe pour ensuite formuler des esquisses de solution. Il ne s'agit plus de jeter des anathèmes, stigmatiser, trouver des ennemis, puis de condamner et de prendre des mesures ou de concocter des plans machiavéliques pour démolir l'autre mais d'analyser les causes des problèmes ce qui demande de les voir avec la plus grande objectivité, lucidité et distance, soit les bases du relativisme que vous avez injustement et sans égards aucuns condamné et voué aux feux infernaux.
Tout le problème est là – sur quelles bases allons-nous faire cette analyse et sur quels critères ?
D'abord psychologiques car il y a beaucoup de motivations purement psychiques dans nos comportements mais aussi sociologiques, l'influence de l'environnement n'est pas à négliger, ni l'importance des modes d'éducation que nous avons subies. Toute chose qui fait problème car peu sont les gens qui admettent qu'ils ont été façonnés par leur entourage et que beaucoup de leurs décisions ont pour bases des souffrances psychiques ou des tendances psychologiques. Au contraire, tout est fait pour minimiser ces aspects psychiques et pour rester sur des principes uniquement comportementaux. D'où l'aspect recourant des problèmes – le plus qu'on essaie "d'oublier" notre inconscient ou de nous forcer à "changer de comportement", le plus qu'il y a récidive; le plus qu'il y a punition, le plus qu'il y a répétition du comportement fautif – c'est le fameux cercle vicieux.
Quant à l'aspect sociologique, personne ne veut admettre que l'environnement bâti aurait une quelconque influence sur le comportement des gens, personne ne veut comprendre que naître et vivre dans une cité dortoir ou une banlieue sordide peut pousser au crime le plus fragile des êtres, personne ne veut comprendre l'enchaînement qui se produit lorsque pour se sentir autre, certains craquent et trouvent dans la délinquance le moyen de se sentir exister et survivre. Certes, toutes les personnes vivant dans les banlieues ne deviennent pas délinquants mais presque tous les délinquants ont quand même un passé lourd de vie dans ces conditions extrêmes.
Il y a aussi notre passé lourdement composé et posé sur ces bases de religion moraliste, de jugement binaire, d'éducation du bien et du mal, d'insistance sur "l'amélioration de soi", d'être "mieux" que les autres, de compétition entre les gens, de mise en concurrence, de glorification de la guerre et de la noblesse de la "trucidation" de l'autre pressenti comme adversaire, d'esprit olympique des trois marches, etc, etc...
Vous condamnez sans aucune réserve ou réelle compréhension l'individualisme alors qu'il est indispensable que l'homme trouve d'abord son "individu" et le cultive pour devenir un être solide capable de formuler un idéal de vie et de produire par son travail, une société cohérente et solidaire. La solidarité ne peut exister que si la personne devient un individu conscient et plein d'envies et de projets. L'individualisme deviendra alors le summum de l'accomplissement humain et, pour cela, nous devons nous sortir de la péjoration que vous faites de l'individualisme et qui nous a précipité dans la société de consommation qui a fait de l'individu un sujet de manipulation. Le vrai individualisme sous-entend un être construit et conscient et l'action commune n'est possible et n'a un sens que si l'être atteint une forme d'individualisme auto-construite et consciente !
Je veux en finir avec cette caporalisation de la pensée et ce mensonge prostré sous le poids de l'édredon étouffant de la pensée unique corporatrice, fabriquée par le politiquement correct conservateur et hautement moralisateur qui au lieu de nous aider à mieux comprendre notre monde, le juge et le condamne de cette manière si apocalyptique que nous ne pouvons que nous jeter dans les feux d'un enfer que vous et vos acolytes conservateurs ont allumé sous nos pieds fragilisés par des siècles d'autoritarisme totalisant. Il n'est pas étonnant qu'une culture de violence se soit développée sur ce terreau car nous pouvons maintenant affirmer sans doute aucun que l'explosion de la délinquance est le fruit d'une société déstructurée par la mentalité conservatrice, par l'esprit consommateur, par les abus de l'autorité, par le flux du pouvoir, par le refus de la conscientisation, par les repères inhibiteurs, par le moralisme et ses valeurs frelatées. Substituer à cette culture de la violence une vraie compréhension devrait être la tâche primordiale des politiques, des éducateurs, des parents, bref de tout le monde sans exception, sauf du religieux engoncé dans un respect enfantin du divin plus que suspect.
Finalement, vous devez vous relire avec un peu plus d'esprit critique car toutes les accusations et les jugements dont vous affublez les libertaires se trouvent dans votre lettre ci-dessus et s'appliquent sans réserves à votre démarche première – juger toutes les personnes qui professeraient des "fadaises de gauche". De plus, vous semblez en vouloir à l'esprit du temps mais ce ne sont ni les libertaires, ni la gauche qui en sont les initiants mais belle et bien les top-mangers à l'œuvre dans vos propres milieux et les dirigeants économico-politiques avides de richesse et de pouvoir et actifs au sein même de cette société pour lesquels vous ne vous êtes pas méfié lorsqu'ils sont arrivés à quelque pouvoir! En effet, il s'avère que vous accusez l'homme générique d'être pourri mais cela semble exclure les autorités, les professeurs, les chefs d'entreprises, en bref – les "nécessaires hiérarchies sociales" que vous semblez affectionner.
Une fois de plus, on ne peut que s'interroger sur votre soif d'interdits et vos ordalies apocalyptico-moralisatrices qui clôt la pensée et nous empêchent de faire le pas plus que nécessaire vers une humanité bien comprise que vous appelez pourtant de vos vœux, soit celle du respect, de la compréhension, de l'amour et de paix !
G.Tafelmacher
PULLY
De plus en plus...
Si l'UDC est jugée de l'extérieur, vulgairement, comme «un parti de vieux c...» (voir portrait d'Yvan Perrin du 31 mars), il y a un problème de communication. Plus finement, l'idée est couramment répandue de son caractère archaïque et multiforme. Économiquement et sociologiquement, l'UDC serait liée aux secteurs arriérés de la société, aux rapports sociaux et aux formes de développement condamnés par la dynamique du capitalisme ultralibéral.
«C... et caractère archaïque» servent essentiellement d'invectives à l'égard d'un adversaire idéologique. Pourquoi ne pas y ajouter "facho" ou "extrême droite"? Les poseurs de tuniques de Nessus, les caciques de légendes noires ne font pas dans la dentelle verbale. Refusons de vivre dans un monde d'illusions et de mensonges !
Ouvrons les yeux !
Que voyons-nous ?
L'extraordinaire ruse du système néo-totalitaire où nous vivons est d'avoir inventé les concepts de "politiquement correct" et de "pensée unique" et de les faire charger, sabre au clair, par de faux politiciens, expressions mêmes du conformisme idéologique.
S'il doit y en avoir, des c..., ne faudrait-il pas les chercher parmi ces derniers? Ils font attention de ne jamais aborder les questions centrales taboues, celle de l'immigration folle et sauvage, celle de l'islam conquérant, celle de la précarité croissante.
Edy Erismann
Les Venéresses
Concerne : votre lettre de lecteur parue dans le 24 Heures du mardi 14 Avril 2009
Monsieur,
Votre lettre ruisselle de haine et pèse très lourd de mensonges grossiers, vous êtes un citoyen dont je me méfierais s'il arrivait à quelque pouvoir.
Tout cela sent la haine des diplômés, la haine des discours moralisateurs, la haine des prêches citoyens, la haine des chaînes télévisées, la haine de l'information et la haine du droit-de-l'hommisme. Habitant Les Venéresses, je peux penser que vous faites partie de ces gens qui non seulement parlent tout à droite, mais bouffent tout à droite aussi.
Je vous conseillerais, si j'en avais l'occasion, d'apprendre à lire, les interprétations extensives sont toujours dangereuses. Votre lettre arrête et n'engage à aucun dialogue. Vous ruisselez de votre vérité puisque vous l'en avez fait votre droit absolu.
Ouvrons les yeux et posons-nous ces quelques questions :
Qui a promu ce système néo-totalitaire où nous vivons et qui a inventé les concepts du "politiquement correct" et de la "pensée unique" et qui sont ces faux politiciens, expressions mêmes du conformisme idéologique, qui les font charger, sabre au clair sinon les thuriféraires braillants d'une droite extraordinairement rusée ?
Qui pousse au dynamisme du capitalisme ultralibéral, aux rapports de force sociaux et aux formes de développement consommatrices sinon la mentalité droitière de tous les politiciens de droite ?
Et qui produit cette corruption cynique, cette baisse du niveau de culture générale, cet individualisme si honni, et qui veut de moins en moins de liberté de penser, de plus en plus de sûreté publique et de plus en plus de punitions des criminels sinon cette caste dirigeante de la société personnifiée par une droite allant du PDC centriste, en passant par la droite radicale-libérale, jusqu'aux tréfonds de la droite extrémiste UDC, soit la vaste majorité des politiciens ?
Questionnez les gens, j'en suis un. Être citoyen n'est plus possible. Alors que faire – vous ne pensez quand même pas que faire une guerre totale contre l'immigration folle et sauvage, contre l'islam conquérant, contre la précarité croissante, contre le "politiquement correct" et la "pensée unique", contre un monde d'illusions et de mensonges, va arranger les choses? Ce ne serait qu'une fuite en avant et qu'un détournement d'attention, un de plus !
Vous devez être un avatar de "l'UDC" ou de "l'extrême droite". Il faut changer de registre. Et puisqu'on en est au conformisme idéologique, qu'attendez-vous pour vous départir du vôtre ?
Relisez Alain Finkelkraut : «Il y a en France (aussi donc en Suisse) des gens qui se plaignent alors que personne ne les retient ici de force».
Avec toute ma considération...
G.Tafelmacher
PULLY
Près de deux tiers des Suisses pensent que les enfants d'aujourd'hui reçoivent une éducation trop permissive. Le sondage montre que même les plus jeunes (48% des 15-19 ans) partagent cet avis. À l'inverse, un tiers des personnes interrogées estiment que l'éducation est adaptée à notre époque...
Il y a quelque chose qui ne joue pas avec votre sondage «L'éducation des enfants est-elle assez sévère?» !
En effet, si 62% des Suisses pensent que les enfants d'aujourd'hui reçoivent une éducation trop permissive, on est en droit de supposer que ces 62% prodiguent une éducation "sévère" à leurs enfants ou aux élèves.
Or si cela était vraiment le cas, 62% des sondés auraient du trouver l'éducation assez sévère ou au moins bien adaptée à notre époque et seulement 33% la trouver trop permissive !
Ce sondage pour être cohérant, aurait dû avoir pour résultat un 62% des gens pour trouver l'éducation assez sévère. Mais puisque 62% la trouvent trop permissive, cela signifie, soit, qu'ils ne sont pas sévères tout en regrettant leur laxisme, soit que leur impression de permissivité est largement surévaluée. Et surtout, plus fort, puisque 48% des jeunes trouvent l'éducation reçue n'est de loin pas assez sévère, cela démontre que 52% des gens qui fustigent l'éducation trop permissive, ne sont eux-mêmes pas très sévère !
Ceci démontre bien comment on peut tromper le monde avec des résultats de sondages et les faire dire ce qu'on cherche à prouver, soit que l'éducation laxiste amènerait la violence...
G.Tafelmacher
PAUVRETÉ • Le néocolonialisme serait un moindre mal en regard de l'abandon dans lequel sont laissés les pays les plus pauvres.
C'est évident pour quiconque un peu attentif à l'actualité internationale: les pays qui souffrent le plus de la faim, de la soif, de la maladie, de la pauvreté, du chômage, des conflits, des catastrophes naturelles sont ceux du tiers-monde. Bob Geldof serait d'accord. Si certains pays pauvres, comme l'Inde et la Chine, ont bon espoir de rejoindre le club sélect des pays développés d'ici quelques décennies - à quel prix? -, d'autres, comme Haïti et le Mali, n'y arriveront tout simplement pas. Car la situation continue à se détériorer dans la majorité des pays pauvres, malgré une certaine aide des pays riches - qui s'avère parfois un cadeau des Grecs, comme ces dons en nourriture, conséquence des subventions indécentes versées aux agriculteurs des pays riches, qui poussent à la faillite nombre de petits agriculteurs, comme leur projet d'annuler la dette des pays les plus pauvres.
Pour espérer sauver les pays les plus pauvres, il faudrait répartir équitablement et durablement la richesse sur cette Terre mal foutue. Et pour ce faire, il n'y a pas d'autres solutions que l'union des pays les plus pauvres avec les pays les plus riches. Cela paraît utopique, mais y a-t-il une seule autre façon d'intéresser vraiment les pays riches au sauvetage de la moitié de la planète?
La Guadeloupe et la Martinique ressembleraient probablement à Haïti si elles n'avaient été maintenues rattachées à la France, vers 1800. De même, la Réunion ressemblerait probablement à Madagascar si elle n'était plus un département français d'outre-mer. Terre-Neuve, terre de pêcheurs, serait assurément plus pauvre qu'actuellement si elle n'avait joint le Canada, en 1949.
Il semble qu'il en a coûté des milliards à l'Allemagne de l'Ouest de raser le Mur de Berlin et qu'il lui en coûte cher encore aujourd'hui. Il semble qu'il en coûterait de même excessivement cher à la Corée du Sud pour absorber celle du Nord. Les Allemands de l'Ouest ont accepté de diminuer leur niveau de vie pour permettre à ceux de l'Est d'augmenter le leur, afin qu'un jour l'Allemagne soit la même pour tous, par solidarité. Il en irait éventuellement de même des Coréens.
Concrètement, chacun des pays riches solliciterait au moins un pays parmi les plus pauvres (un intérêt particulier serait porté aux pays insulaires, dont plusieurs risquent de disparaître dans les décennies prochaines, du fait de la montée des eaux). Bien entendu, les rapprochements se feraient d'abord entre des pays qui ont des atomes crochus. Les populations concernées seraient consultées démocratiquement. Si la réponse est concluante, commencerait alors un véritable travail de titan pour accroître durablement la richesse du pays pauvre. Non seulement l'union profiterait à ce dernier, mais aussi aux pays limitrophes, par ricochet.
Cela dit, un pays riche ne voudrait contribuer vraiment à l'essor d'un pays pauvre - et ainsi s'appauvrir lui-même - que s'il estime que ce pays pauvre contribuera un jour en retour à la richesse nationale. Pointeraient alors les dangers du néocolonialisme, auxquels les pays feraient face en instituant de sévères mécanismes de contrôle.
Mais, vaut mieux craindre le néocolonialisme qu'une mort imminente.
Des pays préféreraient conserver leur indépendance, et cela pour diverses raisons. Pour d'autres, cependant, le refus serait le fait d'élites corrompues, qui, contrairement à la population dans son ensemble, ne verraient pas d'intérêt à l'intégration.
C'est triste à dire, mais on est beaucoup plus solidaires de ses concitoyens que des citoyens du monde. Pour sauver la planète, il faut rapprocher et solidariser durablement les Terriens. L'union des pays les plus pauvres avec les pays les plus riches y concourrait. Au moment du G8, en écosse, il faut se poser la question: les dirigeants des pays riches ont-ils vraiment intérêt à ce que les pays pauvres s'en sortent? Je ne le crois pas, car ils se comporteraient autrement. Je ne serais même pas surpris qu'ils puissent un jour souhaiter que les populations des pays pauvres chutent drastiquement pour assurer la viabilité de leur propre population sur cette Terre surexploitée et bientôt trop petite.
SYLVIO LE BLANC, MONTRÉAL (QUÉBEC)
Monsieur,
Et on continue, sans répit, de transmettre à travers de campagnes effrénées relayées les médias, l'idée que seul les systèmes se posant au dessus des gens peuvent vaincre la pauvreté et sauver l'homme de lui-même. Cette perception complètement fausse et cette façon de poser le problème soulèvent des questions dont les réponses paraissent plus dangereuses que le problème soulevé.
Si l'on peut comprendre votre volonté de lecteur de chercher une solution au problème de la pauvreté du Tiers-monde, l'accent mis sur des solutions politiques du style "néocolonialiste" ne ferait qu'accentuer l'installation des désordres que nous observons dans ces pays pauvres, qui, loin d'être les attributs de l'anarchie ou d'une richesse mal distribuée, seraient simplement la conséquence du développement de l'envie de posséder de chaque individu personnifiée par la pensée-unique libérale et ses tendances de jouer sur nos aptitudes égoïstes. Une autre démarche qui chercherait à sortir de la société de violence issue des politiques néolibérales basée sur la concurrence économique, l'accroissement durable de la richesse des pays pauvres et les rapports de force, serait nécessaire. Elle ferait échec aux systèmes fomentateurs des déséquilibres sociaux régnant entre les dirigeants et les citoyens, entre les magistrats et le peuple, entre riches et pauvres, etc.
Je vais faire paraître la missive mise-au-point ci-inclus dans la rubrique "Courrier des Lecteurs" en vue de rectifier l'image du néocolonialisme auprès du grand public. J'espère que cette lettre sera adaptée à vos exigences.
En espérant pouvoir ainsi démolir la théorie "néocolonialiste" du développement, veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
Georges Tafelmacher, anticolonialiste et libertaire
OSL, POP - Gauche en Mouvement
Pourquoi s'arrêter en si bon chemin? Il faudrait pousser le bouchon encore plus loin !!
Si pour certains, le néocolonialisme est un moindre mal en regard de l'abandon dans lequel sont laissés les pays les plus pauvres, alors, selon la même logique, une dictature bien comprise serait aussi un moindre mal en regard de la pauvreté ou de la situation politique catastrophique de certains pays, comme l'a démontré les premières années du règne hitlérien où chacun avait droit à du pain et du travail, le début du communisme en Russie et en Chine qui a vaincu la famine et le sans-emploi ou la mainmise du polpotisme et du titoisme au Cambodge et en Yougoslavie qui a mis fin aux guerres civiles qui déchiraient ces pays !
Et pourquoi pas imaginer, en utilisant ce même type de raisonnement, de revenir à la royauté en se disant que cela vaut mieux qu'une mort imminente! En effet, l'autoritarisme d'un pouvoir centralisé, en la personne d'un souverain absolu, empêcherait les déboires d'un peuple livré à lui-même et sujet à tous les débordements en obligeant les gens à marcher droit.
Si dans un premier temps cela semblerait "mieux" marcher pour les populations concernées, il ne faut pas se leurrer car à la longue, le naturel revient au galop et on se retrouvera tôt ou tard dans des situations bien pires où le pouvoir absolu, la corruption, le despotisme et l'arbitraire ayant repris le dessus, le sort des gens sera encore plus sellé et les déséquilibres encore plus flagrants et meurtriers.
En fait, ce que vise ce "nouveau plan Marshall", à l'instar du précédant, c'est le maintien d'un contrôle social visant la disparition par enchantement de tous les problèmes individuels influençant par trop le tissu social et, par l'imposition d'un schéma politique réducteur faisant fi des psychologies individuelles, on maintiendrait un semblant d'ordre, une prospérité de faux-semblant, une croissance économique totalitaire et les privilèges acquises de la classe des dirigeants.
Par contre, nous pouvons retenir de l'idée de M. Le Blanc, qu'il faut «rapprocher et solidariser durablement les Terriens (...) par l'union des pays les plus pauvres avec les pays les plus riches» mais à la condition d'un respect des personnes, d'une revalorisation des individus en visant l'autonomie et l'autogestion, d'un autre concept de la vie que celui de la consommation et du tourisme, d'une autre économie que celle du néolibéralisme compétitif et conquérant et sous l'égide d'un contrôle populaire absolu sur toute forme de pouvoir et d'autorité, qu'il soit étatique, économique, pécuniaire, charismatique ou personnel.
Malheureusement, comme sont les choses de nos jours, c'est très loin la coupe des lèvres !
Georges Tafelmacher
- P U L L Y -
La société de contrôle - suite et certainement pas fin !
Monsieur le Professeur,
Le plus que j'avance dans la compréhension des phénomènes qui secouent la société des hommes, le plus que j'observe la domination de quelques uns sur le reste de la population considérée comme ignare, anarchique, violente et laxiste et qu'il faut, à tout prix, dompter. De plus en plus pour maintenir les gens sous contrôle, on cherche à mettre sur pied une contrainte et une pensée-unique pour asservir les gens et les faire se comporter selon des normes prescrites, selon des impératifs catégoriques. La capacité de récupération des dirigeants pour détourner les esprits et pour imposer leurs règnes et leurs lois, est sidérante. Certes, d'aucun pense qu'il faut des règles et des valeurs pour que la cohésion sociale se fasse mais il s'avère néanmoins que ces valeurs sont plutôt signes de la tendance sans cesse renouvelée de soumettre la société à une moralité castratrice, réductrice et intégriste. Ce qui permet de partager les gens entre les bons et les méchants selon la vieille dichotomie manichéenne et de les sanctionner selon de quel côté de la barrière qu'ils se trouvent. Les forts, les possédants, les charismatiques, les doués ont toujours marqué leur supériorité sur le peuple par l'imposition de mots clés saturés de valeurs civilisatrices tels: "solidarité", "amour", "charité", "démocratie", "liberté", etc. Combien de gens fusillés parce qu'ils ne faisaient pas preuve de solidarité, combien d'âmes brûlés au nom de l'amour, combien de gens punis par charité pour leur "bien", combien de victimes des bombes larguées pour imposer la démocratie et combien de morts au nom de la liberté ?
Le problème est que toutes les grandes théories humanistes ont été récupérées par la classe dirigeante qui a détourné ces grandes idées pour qu'elles deviennent des fonctions de contrôle social, des normes selon lesquelles on mesurera les gens et on les sanctionnera. Sous prétexte de trouver des solutions à nos problèmes de société, les autorités imposeront les éléments constitutifs de la contrainte sociale et de la pacification des populations qui serviront de moyen pour condamner la violence sans en chercher les causes, pour prévenir l'incivilité sans changer cette société compétitive et normative, pour casser les rebelles sans avoir à se demander contre quoi ils se rebellent et pourquoi! Lorsqu'on voit de quelle manière les théories éducatives moralistes sont reprises par les "autorités", policiers et autres magistrats par ce retour des valeurs d'autorité, d'hiérarchie et du droit de châtiment sur l'enfant "incivile", nous pouvons mesurer tout le danger que courent les individus désireux d'autonomie, friands d'indépendance, en lutte contre l'arbitraire autoritaire.
Comme la guerre qui a trouvé sa justification par la lutte contre le terrorisme, la lutte contre l'insécurité sociale consiste à criminaliser la violence des jeunes (comme si la violence n'était pas surtout le fait des grandes entreprises et leur politique de délocalisation, de la politique néolibérale et de sa restriction monétaire, etc.), bref, à instrumentaliser les problèmes de nos jours, pour que, par magie, rien qu'en psalmodiant des mots "magiques" comme dans un rituel – sécurité, police, justice, éducation – ces problèmes disparaîtront comme par enchantement. Et dire que même la pub a récupéré les "valeurs" sociales pour vanter les mérites du commerce équitable, de la conscience sociale des entreprises, de la bienveillance des entrepreneurs envers leurs ouvriers, des consommateurs "responsables" (comsom-acteurs) et d'autres fadaises de cet acabit, pour se faire encore plus d'argent !!
En fait, je postule qu'une société réellement humaine ne peut résulter que d'un accomplissement personnel et individuel mûri suite à une prise de conscience intense du soi intime de l'individu et de la révélation de son interaction au sein de la société dans laquelle il habite, et elle devrait être une suite logique de la construction holistique des individus et de leurs réalisations en tant qu'êtres humains pensants, agissants, sensibles et empathiques. De là naîtra la sécurité sociale. Et si notre société présente n'est pas "sûre", c'est qu'elle n'a pas réussi à se construire sainement parce que les forces d'oppression et de contrainte sont trop grandes. Une société ne se commande pas, ne s'impose pas, et elle ne peut pas être une référence auprès de laquelle les individus seront jugés inciviles ou pas, violents ou pas, intégrés ou pas !
Et pour bien me faire comprendre, je conclus en vous envoyant l'étude que j'ai fait sur le rapport sur l'extrémisme en Suisse sorti en Août 2004 et que j'ai envoyé aux politicien(ne)s concerné(e)s.
En vous remerciant de m'avoir lu malgré le fait que je ne suis qu'un "petit" artisan peu "intello", veuillez recevoir, Monsieur, mes salutations très chaleureuses.
P.S. – Lu dans le 24Heures de ce samedi 16-17 Avril 2005
«Les jeunes frappent plus fort» [comme si ces robocops, eux, ne frapperaient pas plus fort et ne tueraient pas (voir G8-2003 pont de l'Aubonne), comme si la justice, elle, ne frapperaient pas fort les "délinquants mineurs", petits jeunes désemparés par cette société qui exalte et exhale la violence dans ses formes économico-commerciales et ses manipulations publicitaires].
Décidément, nos gouvernants sont prêts à faire n'importe quoi pour instaurer un état policier et lorsque c'est le fait d'un ministre libéral, l'exercice est encore plus piquant. Se défendant de vouloir "tomber dans un état policier, C-L.R, cons d'état Vaud, fait tout pour nous prouver que les jeunes deviennent plus violent car "n'ayant pas été éduqués à craindre l'autorité" (sic et resic – il a expliqué tout cela à la radio sans aucune gêne ni remords ou questionnement !!). Sa solution serait de créer un vaste "département de la sécurité" où il y aurait "une chaîne de la sécurité" comprenant, dans un seul service, la police, l'ordre judiciaire et le service pénitentiaire. Il me semble que c'est exactement cela la définition même de "l'état policier", soit la fin de la séparation des pouvoirs (pour l'autocrate, notion horrible s'il en est !).
Mais le plus grave est cette instrumentalisation des crises d'adolescents face à cette société d'une violence inouïe pour que les "autorités" puissent maintenir leur pouvoir pour que la société puisse continuer à faire ses affaires et faire croître ses richesses. Cette façon d'imposer un état policier libéral est sûrement la plus grande conquête de cette racaille radicale-libérale que personne ose nettoyer au "Kärcher®". L'UDC à côté me semble presque enfantin, presque puéril mais c'est à lui que tout le monde pense lorsque qu'on parle de la montée de l'extrême droite et de la société de contrôle. Belle (enfin, si l'on le veut !) dérive en corner avec saisie de ballon magistrale.
La question se pose de savoir ce que nous pouvons faire pour dénoncer cet état de fait et comment y lutter contre...
Georges Tafelmacher
À propos de la controverse engendrée par les hauts salaires octroyés aux top managers
«C'est un malheur que les hommes ne puissent d'ordinaire posséder aucun talent sans avoir quelque envie d'abaisser les autres» : citation de l'écrivain Vauvenargues (1715 - 1747).
La gauche toujours à court d'idées a enfin trouvé un cheval de bataille: les salaires des top managers en Suisse. Cette inquisition a commencé par la fin de l'alphabet mais cela va certainement continuer; ce thème populiste est facile car il y a tellement de frustrés jaloux. Toute cette polémique sans s'interroger, bien sûr, sur la personnalité et les qualités des "accusés", sans mesurer la somme de travail exigée par des études, les stages l'étranger, la formation postgraduée, ainsi que les heures de réflexion consacrées à la gestion et surtout à l'avenir de l'entreprise, et cela aux dépens des loisirs, voire des vacances et de la vie familiale.
Relever les bas salaires et élever la condition de vie des plus défavorisés, personne ne le conteste, mais amputer les hauts salaires n'apporte rien. Bien au contraire, nos entreprises auraient de plus en plus de peine à recruter des cadres supérieurs – c'est déjà le cas pour nos universités – mieux payés dans les autres pays d'Europe.
Et comment tous ces envieux jaloux acceptent-ils de cautionner et de payer de leur poche, simplement en ouvrant leur TV, les salaires des vedettes du music-hall ou des sportifs plus de cent fois supérieurs à ceux de M. X. et Mme W ?
Michel Bonard, Grandvaux
Comment dévaloriser la pertinence des revendications des gens ordinaires...
Et on continue, sans répit, dans des lettres parus dans ce journal, de s'en prendre à la gauche et de traiter ses adeptes de toutes sortes de noms. La dernière en date: la jalousie envieuse des gens ordinaires envers les hauts salaires qui seraient, selon votre avis éclairé, des "frustrés jaloux" !
Vous laissez entendre qu'ils seraient les vecteurs d'une maladie sociale chronique, le "populisme facile", alors que nous vivons dans une société déséquilibrée issue des politiques de droite : concurrence économique, rapport de force entre les nantis et le peuple, poids commercial disproportionné au social, déséquilibre entre les directions et les employés, entre magistrats et citoyens, police suréquipée, etc.
Mais vous posez certaines questions aux quelles j'aimerais bien répondre.
Non seulement vous avez tout faux mais en plus en nous accusant de "populisme facile", vous commettez l'acte facile d'insinuation et de jugement condamnatoire sommaire. En effet, par nos indignations et nos objections, nous ne serions que des "frustrés jaloux" !
Mais il ne s'agit absolument pas de cela! Si la gauche se réfère aux hauts salaires octroyés aux top managers, c'est pour faire le constat qu'en même temps que ces gens s'apprêtent à mettre des travailleurs(euses) au chômage ou au travail temporaire sur appel à des salaires d'exploitation, ils se permettent pour toutes sortes de bonnes raisons, de toucher des salaires cent fois plus élevés. Où est la symétrie des sacrifices ?
Ce n'est pas la jalousie qui motive la gauche mais le contraste saisissant entre les recherches d'économies unilatérales dans la masse salariale où c'est l'ouvrier-ière qui doit consentir à des réductions de salaire pour cause de rentabilisation maximale et le train de vie de quelques "top managers", nouvelle élite autoproclamée, véritable instance dirigeante de cette société.
Que les gens ordinaires sans talents particuliers ou utiles à l'industrie puissent exister est un fait de société incontournable, nous sommes même la majorité. Mais la réalité est que ce sont eux qui sont abaissés par ces "personnalités" instruites, œuvrant aux dépens de leurs équilibres personnels et de celui de la société, qui se permettent de réduire nos sentiments de juste révolte à de la frustration envieuse.
Par contre, votre lettre démontre bien l'arrogance de ces gens qui par leurs jugements sommaires ("envieux jaloux") nous montrent que ce sont ces dirigeants qui sont à court d'idées. Il est toujours plus facile de s'attaquer à plus faible que soi et de faire passer les victimes du système d'exploitation libéral pour des "frustrés", dévalorisant ainsi la pertinence de leurs revendications.
En vous remerciant de l'intérêt que vous portez à notre endroit, veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
Georges Tafelmacher
Gauche en Mouvement
Le nombre de policiers ne fait pas tout. La police doit faire peur! Peut-être est-il temps de tourner la page aux niaiseries de la police "de proximité", qui se veut rassurante. Mais la police seule ne pourra rien faire si, derrière elle, la chaîne pénale est débordée. Encore un héritage de Mai'68 !
JACQUES-ANDRÉ HAURY
LAUSANNE
La doctrine libérale postule que les hommes doivent être libres, autonomes, responsables et qu'ils doivent atteindre cet état par des moyens respectant la dignité humaine et les droits de l'Homme. Or la peur est très mauvaise conseillère et ne fait que de renforcer le refoulement, la régression et les blocages psychologiques qui mènent au défoulement, à l'agressivité, à la violence et à la dépression. Donner l'injonction à la police de faire peur revient à lui donner un rôle répressif que seul les pays totalitaires peuvent se permettre et lorsqu'on voit comment la police fait peur au Tibet et aux USA, comment l'armée fait peur en Irak ou en Cisjordanie, cela m'étonne qu'une personne se réclamant du libéralisme puisse entonner les trompettes du maintien de l'ordre par la peur et la soumission contrainte à l'autorité.
Si nous voulons résoudre le problème de la violence dans nos sociétés dites libérales, il faudrait que nous devenons des êtres solidaires, altruistes, conscients, sensibles, éveillés, plein d'amour et de considérations pour ses prochains, empathiques et remplis d'un nouveau sens de l'individu dont l'épanouissement personnel, l'autogestion, l'autonomie individuelle et le sens de la communauté sont les seuls mots d'ordre. Seul un être réellement autonome et solidaire sera assez créatif, aimant, transcendant pour apaiser les sentiments échauffés et faire revenir les gens à de meilleurs sentiments. L'idée de "la police de proximité" part du principe que seule une police proche des gens puisse être efficace et servir à quelque chose. De là à traiter cette idée de "niaiserie" est une insulte au besoin des gens qui ont, à maintes reprises, préféré cette optique de la police à celle d'une super-gendarmerie supra-communale dotée de moyens pouvant contrer une guerre civile ou un soulèvement populaire...
Votre opinion sur l'héritage laissé par Mai'68 ne sort pas des caricatures dans lesquels on a trop tendance à l'enfermer. Votre accusation repose sur l'affirmation totalement fantaisiste que Mai'68 aurait abandonné l'idée de liberté pour celle de licence, vieille accusation que tous les ennemis de la démocratie ou de l'anarchie ont utilisé pour ramener l'ordre des dominants. Selon vous, la liberté prônée par le mouvement de Mai n'aurait été qu'une apologie du désordre et de l'absence totale de limites qui seraient donc responsables des manifestations actuelles de violence, de démagogie et de rejet de tous les repères. Mai'68 ne fut pas cela, c'était un mouvement qui luttait contre le discours autoritaire du pouvoir qui marquait toute la société en 1968. Mai'68 a tenté de nous rappeler cette vieille vérité démocratique que la liberté est toute à la fois individuelle et collective, inséparablement. Et cette liberté biface a un nom: l'autonomie, le fait de décider soi-même de ses propres lois. Or, par définition, l'autonomie n'est pas limitée de l'extérieur, si elle doit s'autolimiter, elle le ferait dans ses propres valeurs et non dans des commandements venus d'en haut ou de l'au-delà. Le mouvement de Mai a montré tous les jours son souci d'articuler ces deux dimensions, dans ses actions collectives, qu'il s'agisse des manifestations, des mobilisations, des grèves et dans l'invention d'un autre mode de subjectivation qui va de l'usage libéré de la parole au refus de tous les appareils, partis, hiérarchies syndicales, magistères, etc. Il s'agissait de montrer comment la liberté était possible à ces deux niveaux, comme capacité à penser et agir par soi-même d'une part, et comme inscription de cette pensée et de cette action dans un collectif d'égaux d'autre part. Vous faites preuve d'un dépérissement inquiétant de la pensée politique pour avoir si facilement oublier cette articulation entre liberté individuelle et collective, et pour avoir assimiler l'assemblée des hommes et des femmes libres à un refus d'une autorité extérieure ou à une simple licence méprisable. Mai'68 a encore quelque chose à nous dire aujourd'hui car ce mouvement a gardé intacte une petite flamme vivante, soit cet appel à lutter pour cette liberté. De Spartacus à la révolution de 1789 en passant par la chute du mur en 1989 et les protestations de Lhassa, l'élan de liberté de Mai'68 a toujours existé et même s'il a été parfois brisé, il a semé les germes d'un héritage que l'on ne doit pas oublier aujourd'hui.
Ce qui se passe de nos jours n'est pas un héritage de Mai'68 mais la conséquence d'un monde économique ultracompétitif, égoïste et rationnel, orienté vers la satisfaction immédiate des besoins par la consommation érigée en valeur suprême, soit l'antithèse de ce mouvement libertaire. La société de consommation a récupéré sans état d'âme tous les idéaux Mai'68 pour leur donner un sens commercial et faire marcher une économie de marché libérale assujettie à la consommation individualiste. Les adeptes du tout au marché le savent pertinemment bien car les publicitaires, qui ne peuvent être taxés de gauchistes soixante-huitards, emploient tous les idéaux véhiculés par ce mouvement pour vendre leur marchandise et faire tourner la machine. Il est pour le moins étonnant qu'on puisse venir après cela accuser les soixante-huitards d'être les seuls responsables du délitement social, de la violence, de la perte des repères et du manque d'éducation des jeunes alors que c'est plutôt le fait de la société de consommation que vous n'avez jamais renié ou critiqué ni même mis en accusation comme vous le faites pour l'héritage Mai'68.
G.Tafelmacher
PULLY
Cher Monsieur,
Votre courrier du 2 ct. m'est bien parvenu, et je vous en remercie. Vous n'avez pas complètement tort, mais je ne pense pas que nous serons totalement d'accord.
Je réaffirme que la police doit faire peur. Mais pas l'État! Dans un régime totalitaire, c'est l'État qui fait peur, et c'est tout différent.
S'agissant de Mai'68, vous ne parviendrez pas à me convaincre. Je reste persuadé que, globalement, l'héritage que cette révolution nous laisse est négatif. Non pas parce qu'il a contesté l'autorité des gens en place, mais parce qu'il a répandu le relativisme, c'est-à-dire l'idée que le vrai, le beau, le juste et le bien sont des valeurs relatives alors que je suis persuadé qu'elles sont absolues et que nous avons à les rechercher, en admettant que personne ne les détient a priori. Lorsque vous parlez d'autonomie (littéralement : règles que l'on se fixe à soi-même), en l'opposant aux règles extérieures, vous exprimez parfaitement ce relativisme.
Que ce relativisme ait contaminé toute la société, et en particulier les milieux économiques, non seulement je n'en disconviens pas, mais j'en suis hélas persuadé! Vous en donnez quelques exemples. La perte du sens des valeurs s'exprime par exemple dans le montant des salaires de certains dirigeants, et M. Ospel n'est seul.
Lorsque les valeurs que sont le vrai, le beau, le juste et le bien disparaissent de la civilisation, une seule demeure, celle du nombre, difficile à contester. En économie, c'est le chiffre d'affaires et le bénéfice. Et voilà l'effet pervers de Mai'68. Pour moi, M. Ospel est aussi un soixante-huitard.
J-A. Haury
LAUSANNE
du bon usage de la doctrine libérale...
Monsieur,
Votre réponse me permet de mieux comprendre comment vous utilisez la doctrine libérale pour toujours avoir raison. Mais qu'il me soit permis de vous répondre à mon tour en vous faisant remarquer que la doctrine libérale suppose un certain relativisme sinon elle tomberait dans la fosse des théories totalitaires qui ont émaillé notre trop longue histoire ensanglantée. En effet, le respect de l'autre commence par une compréhension de sa personne et de ses idées, d'une empathie envers lui et ceci suppose que l'on puisse l'entendre relativement bien. Lorsque des idéaux de beauté, de justesse, de bien et de vrai sont à ce point valorisés et deviennent des "valeurs", alors on peut mener une guerre sans merci contre tout ce que l'on croit être le faux, le laid, l'injuste et le mal et tuer le messager qui les propagerait. Il me semble donc que vous ne pouvez pas être un "vrai" libéral car votre sens des valeurs pêche par son côté par trop absolutiste. Et voilà l'effet pervers de la doctrine libérale édifiée en valeur. Pour moi, le libéralisme est une forme de relativisme par la nature même de sa formulation de l'idée de l'Homme qui n'a pas à être absolue mais empathique et compréhensible.
Quant à vos idées surprenantes sur la police qui doit faire peur, je me permets de vous répondre simplement: peu importe qui fait peur, régner par la peur est un acte totalitaire et la police d'un état se disant "libéral" ne peut pas faire peur, elle doit convaincre, susciter les envies de se remédier, être psychologique, etc. J'ai discuté avec mon commandant de police et il travaille tout à fait dans cette direction, il ne veut pas faire peur car pour lui, c'est tout à fait contreproductif et il craint que la peur du gendarme dresse la population contre ses policiers.
Car le problème n'est pas de savoir qui doit faire peur mais le fait de faire peur en tant que tel pour exercer son contrôle et son pouvoir. Que ce soit la police ou l'état, ce comportement de faire peur est totalitaire. D'après vos propres dires et déclarations déclamatrices, vous voulez que la police marche comme sous un régime totalitaire, ce qui pour un libéral, même passé dans le vert, est vraiment cocasse, voire, un comble...
Pour le reste de la discussion sur Mai'68, étant donné que vous pensez que M.Ospel puisse être un "soixante-huitard", je ne peux que vous conseiller de relire ma lettre au chapitre de comment l'économie a récupéré les idéaux de Mai'68 pour faire ses affaires. M.Ospel est issu d'un monde économique ultracompétitif, égoïste et rationnel, orienté vers la satisfaction immédiate des besoins par la consommation érigée en valeur suprême, à l'opposé du mouvement libertaire et il ne peut en aucun cas être considéré comme un "soixante-huitard". Votre démonstration laisserait entendre que les valeurs de Mai'68 seraient "le chiffre d'affaires et le bénéfice", chose absurde s'il en est !!
Mais le plus drôle est quand même votre réflexion sur les valeurs qui seraient devenues celles du nombre à cause du relativisme car, fondamentalement, une valeur est un nombre, c'est la quantification de l'importance que quelqu'un donne à un idéal ou à une notion. Par exemple, ce n'est pas le beau qui serait une valeur mais l'importance que vous donnez à cette idée, la place quelle prend dans votre vie et la passion que vous y mettez pour la défendre. Pour ma part, je défends avec passion et entrain la solidarité, l'autoconstruction, l'autonomie, la communauté et les autres, des notions qui ne sont pas pour moi des valeurs mais des idéaux...
Dans l'espoir d'être entendu, je vous prie, Monsieur, d'agréer mes salutations libertaires...
G.Tafelmacher
PULLY
«Barack Obama vient de réaliser la plus formidable démarche d'intégration des Noirs. Non en revendiquant des droits, mais par son seul mérite»
«Vous leur direz, aux autres, que j'ai fait zéro faute ?» Albion, petit élève immigré, n'était pas seulement fier d'être parvenu, une fois, à répondre à toutes les questions posées par la maîtresse; il voulait que ses camarades le sachent !
Lorsqu'ils parlent d'intégration des étrangers, nos spécialistes ne parlent que de leurs droits.
Et si l'intégration suivait un autre chemin? Et si l'intégration s'obtenait par la mise en valeur des efforts entrepris par les immigrés eux-mêmes, c'est-à-dire leur mérite personnel ?
Le 27 septembre dernier, Whitney Toyloy était couronnée Miss Suisse. La presse s'est plu à relever ses origines multiculturelles. Anne-Catherine Lyon a même jugé important de reconnaître son mérite en se rendant personnellement au Gymnase d'Yverdon pour féliciter la lauréate. Y a-t-il plus bel exemple d'intégration ?
Parmi les nombreuses camionnettes qui arborent, chez nous, le nom d'une entreprise, l'une a attiré mon attention: "Gashi Fils, plâtrerie-peinture". Ils sont venus de l'ex-Yougoslavie, ils ont eu le courage de se lancer; en 2006, ils ont créé une entreprise. Dira-t-on assez qu'il s'agit d'une intégration réussie, réussie par le mérite ?
Quant aux nombreux jeunes immigrés qui recourent à la violence, ou qui se livrent à des courses de vitesse au volant de leur bolide, ne cherchent-ils pas à démontrer qu'ils peuvent être les meilleurs dans une société qui ne leur en donne pas d'autres occasions? Parce qu'il ne suffit pas d'organiser de temps à autre des concours de beauté, ou des concours sportifs. C'est dans la vie quotidienne que le jeune immigré doit pouvoir démontrer ses compétences. Et cette vie quotidienne, c'est l'école.
Le malheur veut que, au moment même où le nombre d'enfants immigrés est le plus élevé, l'école publique ait décidé d'éliminer toute forme de compétition. Pas de note, pas de rang dans la classe, pas de concours. Et surtout, pas d'échecs! C'est tout le contraire qu'il faudrait. Un système qui valorise les réussites, qui récompense les mérites. Lorsqu'un apprenti "sort premier du canton", c'est non seulement lui-même, mais aussi toute sa famille, toute sa communauté qui s'en trouve honorée et, de ce fait, mieux intégrée.
On peut imaginer mille situations permettant à des individus de relever un défi, de démontrer qu'ils peuvent figurer au rang des meilleurs: seuls ceux qui méprisent les immigrés contesteront cette évidence. Au moment où la politique d'intégration fondée sur les "droits à" montre ses limites, nous affirmons que le mérite, c'est-à-dire la récompense de l'effort, constitue la clé d'une intégration réussie.
Un exemple? Barack Obama vient de réaliser la plus formidable démarche d'intégration des Noirs dans l'histoire des Etats-Unis. Non pas en revendiquant des droits, mais par son seul mérite. C'est que, à gauche comme à droite, l'Amérique récompense l'effort. II ne suffit pas d'applaudir: Obama nous invite à renouveler fondamentalement notre discours sur l'intégration. II est à craindre que nos penseurs de gauche, si présents dans les milieux de l'intégration comme dans ceux de l'école, ne soient pas très ouverts à cette remise en question.
JACQUES-ANDRÉ HAURY,
DÉPUTÉ ÉCOLOGIE LIBÉRALE
M. Jacques-André Haury nous a exposé dans sa réflexion parue dans le 24 Heures du mercredi 12 février 2009 sa vision sur l'intégration et la nécessité de «donner de la valeur à la compétition à l'école et ailleurs». Une telle opinion semble surprenante en ces temps où une nouvelle compréhension non-dichotomique du monde se fait jour et cette volonté d'intégrer les gens par le mérite met en avant les sempiternelles récriminations des nostalgiques désécurisés contre toute forme de pensée "rousseauiste" et sa prise de conscience. Selon lui, l'homme ne serait intégré que s'il est méritant, du pur calvinisme s'il en est !
Nous vivons dans une société faite de violence issue de cet héritage traditionnel: politique de droite et ses rapports de force entre les nantis et le peuple, concurrence économique, poids commercial disproportionné au social, déséquilibre entre les directions et les employés, entre magistrats et citoyens, système de propriété privé élitiste, moralisme ancestral, méritocratie, etc et la proposition de M. Haury ne fait que consolider ses aspects les plus terribles.
S'il faut être des Whitney Toyloy ou des Barack Obama pour être intégrés en Suisse alors que faire de toutes ces personnes communes et ordinaires, sans grande valeur et même pas les meilleures, justes normales quoi, qui apparaîtront aux yeux de nos grands juges sociaux comme pas assez méritantes pour "mériter" leur statut de citoyen ?
La valorisation des réussites et la récompense des mérites a un nom, c'est l'idéologie de la méritocratie. Jacques-André Haury assène ses affirmations sans aucune gêne et le problème est que forts de ses principes, lui et ses congénères pourront enfin discriminer les gens selon leur mérite et décider qui mériterait de vivre. Ce que M. Haury et consorts ne comprennent pas, est que cette idéologie date dès les débuts des civilisations et a été le fondement de toutes les injustices, guerres, persécutions, inquisitions et pogroms qui nous ont affecté depuis lors. C'est surtout le principe de base sur lequel l'élite, la noblesse, les prêtres et autres moralisateurs ont pu exercer leurs pouvoirs sur le monde et ses habitants.
En ces temps de crise, une nouvelle façon de comprendre l'homme est en train de naître et il est pour le moins inquiétant de constater que des intégristes élitaires persistent à prêcher le retour de cette idéologie du mérite en dépit de sa faillite évidente. Il serait temps de sortir de l'obscurantisme de la méritocratie en obligeant ses tenants de se remettre en question et de renouveler fondamentalement leur discours discriminant sur la société et les gens.
Notre survie en dépend !
G.Tafelmacher
Pully
«La banalisation est l'aboutissement naturel de l'idéologie égalitariste obstinément défendue par la gauche et si mal combattue par la droite»
Le même vendredi 20 mars, 24 heures nous apprend à quel point il est facile de se procurer de la cocaïne à Lausanne, et la Radio romande, dans son "Grand S", ouvre le débat sur la simplification de l'orthographe. C'est en réalité le même débat: convient-il de banaliser ?
Si les dealers se multiplient chez nous, c'est que la consommation de cocaïne s'est banalisée. Et s'il convient de simplifier l'orthographe, c'est que trop de gens ne savent plus écrire. Entre le "tout le monde sniffe", admis par un étudiant en médecine, et la "baisse de maîtrise de l'orthographe au cours des vingt dernières années", reconnue par la linguiste Marinette Matthey, la parenté de pensée est évidente: banalisation.
Pour la cocaïne, l'histoire est simple: le courant éducatif né dans la foulée de Mai'68 a proclamé l'enfant roi. Mort à l'éducation bourgeoise qui prétendait imposer à l'enfant des règles: qu'il se libère et fonde ses choix sur ses préférences immédiates, quelles qu'elles soient! Qu'il commence à fumer des joints: banal! Et si, un peu plus tard, il s'essaie à des drogues dures, banalité encore.
La maîtrisé de l'orthographe a subi le même cheminement: peu importe comment, il suffit que l'enfant s'exprime. Certes, l'école s'emploie toujours à lui enseigner la grammaire et l'orthographe, mais elle baisse les bras si l'objectif n'est pas atteint: banalité que tout cela. L'étape suivante consiste à dépénaliser les drogues et à admettre l'orthographe phonétique.
Nos sociétés pratiquent avec une belle hypocrisie à la fois la banalisation et l'indignation. Indignation justifiée lorsqu'une jeune fille se fait enlever et tuer par un pervers. Indignation en face de certaines pages de notre Histoire. Indignation face aux bonus versés dans certaines entreprises. Mais banalisation des dérapages successifs dont ces scandales ne sont que l'aboutissement.
Refuser la banalisation, c'est créer un ordre, établir une hiérarchie. C'est admettre qu'il y a un bien qui se distingue du mal, qu'il y a un vrai qui se distingue du faux, qu'il y a un juste qui se distingue de l'injuste, qu'il y a un beau qui se distingue du laid. Refuser la banalisation, c'est rechercher des vérités qui dépassent l'individu, et que l'éducation s'emploie à enseigner.
Le débat sur l'orthographe est révélateur: ceux qui la maîtrisent constitueraient une élite. Certains choisissent de supprimer les difficultés orthographiques pour supprimer les différences sociales. Nous préférons la démarche opposée.
Nous affirmons que, effectivement, ceux qui respectent les règles sont supérieurs à ceux qui les ignorent ou qui les méprisent. Nous affirmons qu'un être civilisé n'est pas l'égal d'un sauvage. Que la pédagogie (au sens étymologique) vise à élever l'homme, à le rendre supérieur au sauvage. Et que, si les inégalités peuvent choquer, c'est en civilisant le sauvage qu'il convient de les corriger, et non pas en banalisant la sauvagerie.
La banalisation n'est pas le fruit d'un hasard sociologique: elle est l'aboutissement naturel de l'idéologie égalitariste obstinément défendue par la gauche et si mal combattue par la droite.
JACQUES-ANDRÉ HAURY,
DÉPUTÉ, ÉCOLOGIE LIBÉRALE
Cette prose ahurissante nous donne enfin l'occasion de faire une analyse de texte en profondeur et de comprendre la mentalité des tenants du raisonnement bourgeois élitiste qui ne se lassent pas de fustiger les quidams sauvages qui ont la désobligeante idée de peupler cette terre et de vouloir se sortir des limbes de la société des bien-pensants moralistes, juges, condamnateurs et autocratiques qui se croient supérieurs car se supposant "éduqués" !
Mais quelle est la valeur d'une éducation qui permet à ces quelques privilégiés de rendre la vie si contraignante que seuls les plus intelligents puissent s'en sortir et s'enrichir et de créer une hiérarchie si détestable que seule une révolution systémique peut en venir à bout ?
Tout ce que dénonce le Docteur Haury est l'expression d'une volonté populaire qui cherche à s'affranchir des diktats, des impératifs catégoriques, du moralisme dichotomique et binaire et de la mise-en-case de toute une catégorie de la population désignée d'ignare, d'inculte, de mal-éduquée et de sauvage. La banalisation, par exemple, n'est qu'une tentative presque désespérée de la part des gens de se soustraire de l'autorité et du pouvoir hégémonique de la classe dirigeante en réduisant ses percepts à des élucubrations dissonantes sans importance propres à être jetées avec l'eau du bain !
Mais le vrai problème se situe entre les lignes. En effet, toute la théologie de la création d'un ordre et de l'établissement d'une hiérarchie, soit la croyance d'un «bien qui se distinguerait du mal, d'un vrai qui se distinguerait du faux, d'un juste qui se distinguerait de l'injuste, d'un beau qui se distinguerait du laid», était le fondement de l'impérialisme des pharaons, des rois et de tous les dictateurs qui ont sévi sur cette planète dont celui directement responsable de la mort de 55 millions de personnes entre 1933 et 1945.
«Les vérités qui dépassent l'individu»: c'est un des moyens de contrôle des plus perverse qui soit. Au nom de la vérité, combien de personnes ont été emprisonnées, torturées, déclarées fous, jugées, liquidées, ostracisées, déportées, massacrées, exploitées...?
«Civiliser le sauvage...pour le corriger»: le roi Léopold II lorsqu'il exploitait sans vergogne le Congo, tenait exactement mot pour mot ces mêmes idées et chacun peut constater ce qu'il advint de ce pays après quelques années de ce pouvoir esclavagiste soi-disant civilisant.
«Ceux qui respectent les règles sont supérieurs à ceux qui les ignorent ou qui les méprisent»: on a le droit de mépriser les règles qui dénaturent l'individu et le met à la merci des dirigeants. Il se peut que les règles ne soient que les moyens pour garder les hommes sous contrôle et, sous la bonne garde des cerbères gardiens de la civilisation tel ce Docteur Haury, obéissants et corvéables à souhait. Mais le plus grave est l'introduction de l'idée de "supériorité" qui permet au Docteur Haury de se placer au-dessus des gens et renforcer son côté dictateur de la pensée morale comme tout bon autocrate impérialiste et élitiste. Nous avons le droit de lutter contre des lois qui permettent à l'élite de régner sans partage sur un monde dominé. Nous avons le devoir d'ignorer des lois liberticides ou, du moins, de faire en sorte qu'elles seront inoffensives.
«Banalisation»: le plus grave est que par cette prose inspirée des affres du 19ième siècle, le Docteur Haury a réussi à banaliser la banalisation et à rendre inopérant ses exhortations, ce qui, en ce qui nous concerne, est une véritable victoire à la Pyrrhus !
Finalement, tout compte fait, le meilleur détracteur de la prose haurienne est le Docteur Haury lui-même car en ces temps du changement et de la prise de conscience de l'état du monde, ce genre de réflexion montre plus la déliquescence de son esprit que l'analyse cohérente de notre société qui, rappelons-le une fois pour tout, est le résultat du capitalisme matériel libéral basée sur la consommation et du règne dominant d'entrepreneurs individualistes mus par un besoin atavique de s'enrichir, fusse-t-il au dépend de la société entière. Cela n'a rien, mais strictement rien à voir avec l'esprit de Mai'68 qui lui, luttait corps et âme contre cette dictature de la pensée bourgeoiso-libérale. Si le Docteur Haury veut absolument trouver les responsables de la crise actuelle pour les pendre haut et court, alors qu'il les cherche parmi ses paires (pères !) et qu'il nous fiche la paix avec ses textes d'un autre âge proscrit, damné et complètement dépassé.
G.Tafelmacher
Pully
«Quant à la prétendue supériorité du bon "civilisé", on peut se demander si Joseph Gœbbels, docteur en philosophie, était civilisé»
À propos de l'article paru le 27 mars dans cette rubrique sur le thème «Cocaïne et orthographe», on ne peut qu'être d'accord avec M. Haury, qui laisse entendre que l'école a besoin d'un médecin.
Cependant, il me semble détecter une incohérence: on ne peut pas être contre la cocaïne et pour l'orthographe, du moment que l'école vaudoise, issue de Mai 68, finira par distribuer de la cocaïne aux élèves faibles en orthographe afin d'améliorer leurs performances et de les faire entrer ainsi dans l'élite de la nation.
M. Haury a appris l'orthographe dans un milieu scolaire stable, ce milieu étant le reflet d'une société stable, elle aussi. Presque tous les élèves étaient de langue maternelle française. Aujourd'hui, le brassage culturel et linguistique, que j'estime heureux et vivifiant, rend la tâche du corps enseignant bien plus ardue qu'il y a quarante ans, d'autant que l'usage du téléphone portable et de ses SMS gomme l'accentuation. En outre, l'enseignement de l'informatique "mange" du temps à celui de l'orthographe. Et l'affectivité joue un grand rôle dans sa maîtrise; les élèves de milieu perturbé ont souvent une orthographe déficiente.
M. Haury plaide pour l'établissement d'une hiérarchie.
Mais, que je sache, il y a aussi une hiérarchie de la bêtise, de la méchanceté, de l'ignorance, de la cupidité. Il convient donc de nuancer cette notion.
Quant à la prétendue supériorité du bon "civilisé", on peut se demander si Joseph Gœbbels, docteur en philosophie (donc au sommet de la hiérarchie intellectuelle), était civilisé, alors qu'il a été douze ans ministre de la propagande d'un régime qui a attisé la haine à l'égard des Juifs, des Tsiganes, des communistes, des socialistes et d'autres opposants. Pour les nazis sûrement, mais pour les autres? Et encore, qui, à l'époque des conquistadors, a muselé Las Casas, l'évêque courageux qui a, presque seul, défendu les Amérindiens? Une Eglise civilisée, complice d'un génocide. Qui a créé ou toléré Auschwitz, Mauthausen, Sobibor et bien d'autres encore? Des "civilisés" nourris de la musique de Mozart et de Beethoven. Qui dévore les ressources de la planète? Les Yanomamis de la grande forêt du Haut-Orénoque, donc des "sauvages", ne l'exploitent que pour couvrir leurs besoins essentiels, ce qui permet à la nature de se régénérer. Ils sont écologistes avant l'heure.
M. Haury attribue ce qu'on peut appeler le laxisme éducatif à la gauche, et à la droite qui le combat mal. Qu'il sache que l'auteur de ces lignes, membre d'un parti de centre-droite, a écrit un livre sur le général Guisan, qui n'avait pas la réputation d'être laxiste, mais a été proche des soldats (pourtant au bas de la hiérarchie) et pionnier de la démocratisation des études. Que M. Haury sache qu'il y a de plus en plus d'élèves perturbés par une situation familiale difficile, ou d'élèves dont les parents sont victimes des exigences professionnelles de la concurrence, de la performance, de la course au profit. M. Haury méconnaît cela: il est bien placé dans la hiérarchie du mépris.
Yves Delay,
PROFESSEUR ET MÉDIATEUR DE GYMNASE RETRAITÉ
À propos de la réflexion de M. Yves Delay intitulée «École, cocaïne, hiérarchie, etc.» (24 Heures du 3 avril 2009) :
Visiblement perturbé par mes propos sur la banalisation de la cocaïne et de l'orthographe, M. Delay se croit autorisé à établir un parallèle avec le Dr Gœbbels, dignitaire nazi de sinistre mémoire. La ficelle commence à sentir l'usure: dans la génération de M. Delay, professeur de gymnase à la retraite, les horreurs du régime hitlérien ont souvent été utilisées pour diaboliser tous ceux qui se permettaient d'exprimer un avis divergent. C'était tellement plus facile que d'aborder de face les questions posées.
Il est intéressant de savoir que le premier régime politique à avoir entrepris une lutte systématique contre le tabagisme est... le régime hitlérien, précisément. J'imagine que, dans sa carrière d'enseignant, M. Delay s'est employé à détourner les jeunes de la fumée: il ne viendrait pourtant à l'esprit de personne de le comparer à un dignitaire nazi.
Alors, de grâce, M. Delay, acceptez qu'une opinion vous importune et renouvelez un peu votre argumentation !
Je n'étais pas né en 1945, et c'est à la société d'aujourd'hui que je m'intéresse.
Jacques-André Haury,
Lausanne
D'autres pages sur ce sujet...
Sans minimiser la gravité de la plaie de la diffusion de la drogue dans notre société et sans considérer la baisse du niveau de maîtrise de l'orthographe comme un problème mineur, je reste abasourdie par la simplification le la situation exposée par M. Haury.
Selon lui, tout s'expliquerait par une banalisation de ce qu'il appelle la "sauvagerie", le non-respect généralisé des règles qui cadrent noue société. Les causes de cette déliquescence sont claires: c'est Mai'68 et l'idéologie égalitariste «obstinément défendue par la gauche».
Vitupérer la gauche fait sans doute partie du combat politique de M. Haury, mais quand la caricature est aussi grossière, c'est l'intelligence même du propos qui est entachée. C'est soit faire preuve de malhonnêteté intellectuelle, soit tomber dans la tentation simplification la plus crasse que de chausser des lunettes partisanes pour tenter l'expliquer un phénomène complexe: la dynamique des sociétés contemporaines et révolution de leurs valeurs, dont on ne peut nier la transformation, au-delà de toute déploration.
La société de consommation et le libéralisme à tous crins qui ne valorisent que l'individualisme, la quasi-déification du plaisir immédiat et de l'enrichissement personnel, terreau de l'hypertrophie du moi, sont des éléments aussi importants que la simple explication du non-respect des règles qui serait la cause de tous les maux.
Plutôt que de diaboliser Mai'68 en lui imputant toutes les dérives actuelles, ne serait-il pas plus logique de se demander pourquoi cette "révolution" a été possible? Ne faudrait-il pas analyser les raisons des malaises d'aujourd'hui en fonction de l'évolution des valeurs sociales plutôt que de diaboliser une cause unique qui serait, bien sûr, de gauche ?
Jacqueline Pellet,
Montreux
Georges Tafelmacher
Route du Port 22
1009 PULLY
Pully, le 7 avril 2009
Madame
Jacqueline Pellet
chemin de la Caudraz
1820 Montreux
Concerne: votre lettre de lecteur (lectrice) parue dans le 24 Heures du 06 avril 2009
«La simplification outrancière»Madame,
Je vous remercie pour votre lettre au 24 Heures du 06 Avril que j'ai fort apprécié surtout en ces temps où les voix critiques du système se font systématiquement malmenées car provenant du peuple donc de la "Gauche" et même fustigées car perçues comme destructrices. Alors quel plaisir j'ai eu en lisant vos lignes parues dans le 24 Heures de ce jour et de voir que nous ne sommes pas les seuls à s'insurger contre les affirmations discriminantes de l'élite de ce pays ou, du moins, de ceux qui se croient supérieures aux autres !
Effectivement, il n'y a pas d'autre façon de faire revenir ce Docteur Haury à de meilleurs sentiments que de le mettre devant les conséquences d'une domination hégémonique sur la société par une élite trop accaparée par sa survie et son pouvoir en ces temps de contestation populaire et mondiale, trop sûre d'elle au point de croire devoir sauver le monde alors que ce sont ses thuriféraires irresponsables et vociférants qui contribuent le plus à sa destruction !
Personnellement, je pense que la crise actuelle est la conséquence de ce genre de philosophie et qu'il est de notre devoir de dénoncer autant de fois qu'il le faut toutes les justifications hourdies par cette élite autoproclamée pour maintenir et chercher à prolonger son règne hiérarchique et morale sur nous, les sauvages ignares et incivils lies de la terre.
Qu'il existe des personnes qui soient dotées d'une grande intelligence, d'une énergie formidable, d'un esprit vif et inventif, soit! Mais cela ne leur donne pas le droit de s'imposer comme ils le font en monopolisant tous les discours, tous les podiums, tous les médias comme le fait ce Docteur Haury avec ses "OPINIONS". Cela ne fait pas d'eux les monarques de la société, ni les leaders incontestables et ils n'ont aucun droit d'exercer le pouvoir comme ils le font. Je prétends même que s'il y a des limites à fixer, ce sont pour ces gens là et non pour ces pauvres hères qui sont les victimes non reconnues de ce système d'exploitation et qui pètent les plombs parce que mal comprises, instrumentalisées, utilisées pour justifier le renforcement des forces de police, l'application de lois sécuritaires, et une excuse pour installer des caméras de vidéosurveillance partout...même dans un champ de blé-OGM à Pully !
Que ces personnes qui se croient si douées deviennent réellement responsables, qu'ils admettent qu'ils ne peuvent agir par dessus les gens, sans l'aval de la population et qu'ils cessent de vouloir imprégner la société de leur marque en édifiant de colossaux monuments en leur gloire, effigies de leur supériorité !
Que ces personnes admettent une fois pour tout que quelque soient les capacités des autres, que chacun soit le génie de sa vie, que chacun soit l'inventeur de son trajet, le pilot de son cheminement et que chacun ait le droit de se considérer comme important dans ses situations, dans ses opinions, dans ses choix de vie. Le docteur Haury a déjà désigné cela de "égalitarisme" et de "socio-constructivisme" qu'il s'est empressé de démolir avec une ferveur suspecte et une habilité certaine. Je pense que nous sommes trop sous la coupe de ce genre de personnage et je suis content de voir qu'il y en a d'autres que moi qui ne se prennent pas pour une élite et qui tiennent un discours qui met en perspective les agissements de cette supposée élite qui veut absolument tenir les rênes du pouvoir et qui se permettent de la critiquer avec autant d'audace, de verve et de phrases bien tournées. Merci encore pour votre "Lettre de lecteur" plus que bienvenue en ces temps de confusion totale et de tentative de reprise en main de la société par une élite ayant justement perdu la main !
Je profite aussi de cet envoi pour vous faire parvenir la lettre que j'ai adressée au bon Docteur Haury sachant qu'il ne la lira sûrement pas. Je ne fais non plus aucune illusion quant à sa parution dans un prochain 24 Heures car ces temps, j'ai déjà assez fait parvenir des lettres critiques à la Rédaction et, à la réception de ma dernière lettre, celle-ci m'a fait savoir que je ne dois pas exagérer !
Dans l'espoir de vous entendre plus souvent, veuillez agréer, Madame, mes salutations les meilleures.
Georges Tafelmacher
Face aux incivilités et à la violence de certains jeunes, dont le dernier exemple est l'agression de Vouvry, il faut peut-être rappeler une vérité politiquement incorrecte! L'importance, dans l'éducation, du rapport de force. Les parents doivent se montrer plus sévères envers les incivilités de certains jeunes.
Dans la société humaine, comme dans les hiérarchies animales ou végétales, c'est une composante inévitable qu'il faut intégrer pour tendre à un minimum d'harmonie.
Une éducation responsable ne peut se passer de cet élément qui, s'il doit privilégier l'écoute et l'exemple donné, doit inclure le fait qu'un enfant ou un adolescent entre dans un rapport de force avec l'autorité parentale, et que c'est normal et sain. La construction de l'être passe par cet entraînement à la vie adulte. Les parents qui nient cette nécessaire confrontation et l'importance d'imposer leur domination, tant qu'elle est justifiée, manquent à leur premier devoir éducatif. Il faut accepter de ne pas être toujours populaire auprès de ses enfants. Céder revient à donner le terrible signal qu'il n'y a pas de règles; l'absence de contraintes permet toutes les dérives et, surtout, le respect pour les parents va se diluer et se transformer en mépris.
Certains parents ont la chance d'être pourvus d'une autorité naturelle permettant de se faire respecter sans sanction extrême. Aussi quand le rapport de force se manifeste d'une façon exceptionnelle, il n'en sera que plus mémorable et salutaire. «Tu te rappelles, papa, le jour où tu m'as donné cette terrible claque...! Et comme elle était méritée !»
Jean-Daniel Jordan,
Lausanne
photo © KEYSTONE | Violence juvénile
À propos de la lettre de lecteur de M. Jean-Daniel Jordan intitulée «L'éducateur doit savoir s'imposer» (24Heures du 4 mars 2009) :
Face aux incivilités et à la violence de certains jeunes, une vérité politiquement incorrecte doit être rappelée! L'importance, dans l'éducation de l'écoute, de l'empathie, de l'accompagnement, de la compréhension et de l'exemple donné. Dans une société humaine normale et saine, ce sont ces composantes structurantes qu'il faut intégrer pour tendre à un minimum d'harmonie. Une éducation responsable ne peut se passer de ces éléments surtout si un enfant ou adolescent entre en conflit avec l'autorité parentale, comme dans les hiérarchies animales ou végétales.
La construction de l'être passe par cet apprentissage empathique de la vie adulte. Les parents qui nient ces éléments nécessaires et rentrent en confrontation en cherchant à imposer leur domination qu'ils croient justifiée, manquent à leur premier devoir éducatif. Il faut cesser de toujours vouloir imposer ses règles et ses rapports de force auprès de ses enfants. Céder à la tentation de la domination revient à donner le terrible signal d'un effet d'entraînement dans la logique de la violence. Ce n'est pas l'absence de règles ou de contraintes qui produit toutes les dérives mais les rapports de force, la croyance en sa suprématie. En dernière analyse, le respect pour les parents se dilue et se transforme en mépris lorsque l'enfant prend conscience de l'injustice des rapports de force et des sanctions extrêmes. La terrible claque n'est jamais salutaire ou méritée, elle ne peut que raviver l'esprit de rébellion ou de soumission totale à l'injustifiable rapport de force.
Et si le rapport de force était l'expression de la vraie violence et la claque son signe extérieur le plus abject ?
Et si tout le problème de nos jours n'était-il pas cette confusion savamment entretenue entre le rapport de force, l'autoritarisme et l'éducation ?
Et si l'attitude rebelle de certains jeunes n'était-elle qu'une saine réaction contre cet autoritarisme de domination ?
Rappelons "qu'éduquer" veut dire "conduire vers" et non pas imposer sa volonté ou sa domination ou ses rapports de force.
G.Tafelmacher,
Pully
Un policier tabassé, un mort dans une sombre histoire de racket, une jeune fille violée, un jeune mortellement poignardé à cause d'un regard provocateur: voilà qui allonge une liste inquiétante de faits se déroulant dans notre société en crise, en grande partie due au laxisme et au laisser-faire de nos autorités.
La violence est un comportement brutal, avec ou sans arme, envers une personne, qui doit être sévèrement puni. Qui fait usage de violence doit toujours être puni, car la protection face à la violence est un droit fondamental que l'État est tenu d'assumer pleinement pour protéger ses citoyens.
La permissivité de la génération de soixante-huit, la mollesse de notre Code pénal et l'irresponsabilité d'une majorité de notre classe politique qui prône la prévention comme seul remède, nous ont amenés à une situation grave et alarmante.
Il est donc urgent que notre société revienne en arrière et pose des limites et des repères clairs comme ont commencé à le faire plusieurs pays, notamment la Grande-Bretagne et les Pays-Bas. Et, dans ce contexte, nos autorités politiques doivent prôner et appliquer des sanctions plus dissuasives en reléguant au plus vite les jours-amendes devenus la risée des touristes de la criminalité et reconsidérer fondamentalement la notion du sursis. Par exemple, pour la vente d'héroïne, la peine minimale actuellement prévue est d'un jour-amende, soit théoriquement 1 franc.
Comme l'a très justement et dernièrement déclaré le procureur général de Genève, Daniel Zappelli: «quand la population augmente, on construit bien des écoles. Alors pourquoi pas des prisons ?».
Denis Rubattel
1042 Assens
Georges Tafelmacher
Route du Port 22
1009 PULLY
Pully, le 14 Septembre 2009
Monsieur l'officier
Denis Rubattel
Route de Saint-Germain 22
1042 Assens
Concerne: votre lettre de lecteur parue dans le 24 Heures du 14 Septembre 2009
«VIOLENCE • Il est grand temps de réagir !»
Monsieur,
Il ne se passe plus un jour sans qu'un quelconque moralisateur en mal avec son époque à laquelle il a lui aussi participé et a rendu possible l'avènement, vienne nous faire une moralisation instrumentalisée et même militarisée. Chaque fois, avec la conviction d'être dans son bon droit, on vient nous faire de la morale et prôner des méthodes fortes et des sanctions plus dissuasives pour soi-disant «résoudre des problèmes de société». Mais à aucun moment, on ne se donne la peine d'analyser la situation pour comprendre les causes de cette supposée montée de la violence et voir pourquoi on en est là. On se contente de fustiger certaines catégories de personnes et de les accuser de tous les maux comme si elles en étaient directement responsables.
Et on continue, sans répit, dans des lettres parues dans les journaux, à fustiger certains comportements et de traiter certaines personnes de toutes sortes de noms. La dernière en date: la stigmatisation de la génération de soixante-huit dont la mentalité serait, selon vous, responsable de la "situation grave et alarmante" actuelle.
C'est avec étonnement que j'ai lu vos fortes paroles extrêmement manichéennes dans votre lettre «Il est grand temps de réagir !» parue dans notre 24 Heures de ce jour. La chasse aux soixante-huitards semble être normale de nos jours mais vous dépassez les limites que vous vous êtes vous-même posé en laissant entendre que la génération de soixante-huit serait seule responsable de l'état de ce monde post'68 parce qu'elle aurait prôné le «Moi, je fais ce que je veux», le laxisme et la permissivité. Une telle opinion semble surprenant en ces temps où une nouvelle compréhension non-dichotomique du monde se fait jour et cette volonté de sanctionner des individus ressentis comme violents, met en avant les sempiternelles récriminations des "moralisateurs civilisés", nanti d'une mentalité de frappe qui fait des percées phénoménales de nos jours, contre toute forme d'individualisme ou de progrès social.
Je vais faire paraître la missive mise-au-point ci-inclus sous la rubrique "Courrier des Lecteurs" en vue de rectifier l'image de la génération soixante-huit auprès du grand public. J'espère que cette réponse sera adaptée à vos exigences.
En vous remerciant de l'intérêt que vous portez à notre endroit, veuillez agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
Georges Tafelmacher
Cette tendance à vouloir profiter de chaque fait divers pour condamner la génération de soixante-huit devient carrément suspecte car cela cache les vraies raisons de l'état de notre société.
Et si c'étaient plutôt les intoxications graves par la pollution, les métaux lourds, les agents conservateurs, les plastiques, les micro-ondes, la radiation, les conditions de travail démentielles qui nous ont amenées à cette "situation grave"? Et si ces actes de violence n'étaient que les symptômes d'une dégradation mentale, amenée par une industrie trop axée sur la compétitivité, le profit, les gains de part de marché, qui a fait fi des principes de précaution ?
Mais le plus grave est d'utiliser ces faits divers pour revenir à la société de répression et de sanction d'antan qui a montré ses limites et a basculé dans des régimes autoritaires et la guerre.
Ce ne sont pas des prisons qu'il faut construire mais des quartiers conviviaux, participatifs et des villes à taille humaine où il fait bon vivre.
Nous ne pouvons plus revenir en arrière, nous devons avancer. Et s'il y avait des limites à fixer, elles seraient doubles: celles qu'il faudrait imposer aux industries pour qu'elles arrêtent de produire n'importe quoi, n'importe comment au nom de la productivité, de la modernité et celles qu'il faudrait imposer aux moralisateurs pour qu'ils cessent de prôner leur société de contrainte et de fustiger la génération de soixante-huit, qui n'est pas, loin s'en faut, responsable de la dégradation actuelle.
À moins que les capitaines d'industrie ne soient, eux aussi, issus de la génération soixante-huit !
G.Tafelmacher,
Pully
Moins de promesses et plus d'efficacité
Nous vivons dans un monde extrêmement imparfait, dans lequel un nombre considérable de personnes vivent dans la difficulté et parfois le dénuement extrême. À la veille d'une nouvelle année, j'aimerais penser que ce monde-là peut devenir meilleur.
Mon premier vœu est aussi un devoir auquel nous ne pouvons nous soustraire: que les moyens consacrés à l'aide humanitaire et au développement atteignent leur cible, soient engagés avec le maximum d'efficience et le souci d'atteindre des objectifs clairement identifiés. Moins de promesses et plus d'efficacité, c'est ce que nous devons à celles et ceux que nous prétendons aider.
La crise fait peur, elle entraîne l'angoisse du lendemain. Les crises ne durent pas, elles finissent par se résorber. Mais la crise que nous vivons, pénible sur bien des points, porte avec elle quelques signes d'espoir. L'un d'entre eux est tout récent: les entreprises, privées et publiques, n'ont jamais offert autant de places d'apprentissage. C'est peu de chose? Non, c'est un bon signe, au contraire. Cela signifie que les employeurs sont conscients de leurs responsabilités et qu'ils sont capables de s'engager.
Mon second vœu sera donc de voir ce mouvement se poursuivre une fois la crise passée. Les entreprises de notre pays montreront ainsi leur responsabilité citoyenne, celle qui permet de durer !
Quant à mon troisième vœu, il est en forme d'espoir. Nul ne peut prédire l'avenir mais je souhaite que nous trouvions toutes et tous la force de donner le meilleur de nous-mêmes en 2010. Aucune structure étatique ne remplacera jamais l'engagement individuel, l'esprit de service et la volonté de participer pleinement à la société dans laquelle nous vivons.
MARTINE BRUNSCHWIG GRAF, Conseillère nationale libérale
Messieurs Mesdames de la rédaction du LE COURRIER
Je viens de lire dans le FOCUS paru dans votre édition du "LE COURRIER" de ce 30 décembre 2009, les vœux formulés par ceux (et celles !) qui font l'actualité et j'ai été estomaqué d'y voir figurer ceux d'une personne qui a le plus personnifié l'esprit "commercial, bancaire et entrepreneurial" du temps soit la libérale Martine Brunschwig Graf !
Tout son discours suinte le néolibéralisme à plein nez et fustige entre les lignes les structures étatiques censées justement venir en aide au nombre considérable de personnes vivant dans la difficulté et parfois dans le dénuement extrême. "L'engagement individuel" qu'elle prône va toujours dans le sens de son acceptation élitiste et exclut de fait toute personne démunie, abattue, déprimée, en proie aux tourments de notre époque plus que tordue car pour l'appliquer, de nos jours, il faut être d'une autre trempe et d'une mentalité d'entrepreneur. Les problèmes de nos jours dépassent de loin les seules possibilités "individuelles" pour leur résolution et nécessitent la collaboration de tous les citoyens en vue d'une refondation des bases sur lesquelles s'édifie notre monde.
Je vous prie, si cela vous êtes possible, de faire publier cette lettre ci-dessous pour quand même apporter la touche nécessaire pour que Martine BG, elle, soit mise devant ses responsabilités quant à l'état dans lequel se trouve notre monde et de comprendre dans quel mesure elle a participé à l'avènement de celui-ci !
En vous remerciant pour votre travail formidable de démontage des assertions néolibérales et pour vos tentatives de repenser notre monde selon des termes plus humanistes, holistiques et fraternels, recevez donc, à mon tour, mes vœux les plus chaleureux pour cette nouvelle décennie 2010 !
Georges Tafelmacher
PULLY
VœUX - Georges Tafelmacher est choqué par la présence dans nos colonnes d'un texte de Martine Brunschwig Graf dans l'édition du 30 Décembre 2009.
Que vient faire Martine Brunschwig Graf dans cette aérophage de personnalités orientées de gauche et humanistes désirant nous apporter son lot de raisons pour garder l'espoir pour l'an 2010 et qui veulent nous souhaiter la bonne année ?
Il est pour le moins choquant de lire de la part d'une personne qui a le plus fait pour que le monde soit dans l'état qu'elle déplore et qu'elle considère comme imparfait (comme s'il s'agissait d'un phénomène indépendant des agissements des activistes néolibéraux !), les recommandations mêmes qui ont mené notre monde à cet état d'imperfection. Martine Brunschwig Graf souhaite que ce monde-là devienne meilleur mais en préconisant les mêmes recettes qui l'ont mis dans l'état où il se trouve, elle ne fait que renforcer les tendances qui font que notre monde perdure dans son imperfection !
En moins de cinq paragraphes, Martine Brunschwig Graf a réussi à introduire son idéologie néolibérale et cela dès le titre d'accroche (plus d'efficacité) et dans chaque paragraphe, elle nous assène son credo idéologique – pour un monde "meilleur" (économiquement s'entend !), pour un maximum d'efficience et le souci d'atteindre des objectifs clairement identifiés, pour des entreprises de notre pays et ses employeurs qui durent, pour l'engagement individuel et pour la volonté de participer pleinement à la société dans laquelle nous vivons !
Mais qu'elle est cette société dans laquelle nous vivons sinon celle que Martine Brunschwig Graf et consorts ont patiemment construit pendant plus d'un demi-siècle? C'est la société de consommation qui, à présent, a démontré l'étendue de son incapacité à tenir le moindre de ses promesses! Et c'est à cette société-là que Martine Brunschwig Graf souhaite que nous y participions "pleinement" alors que, pour s'en sortir, il faudrait que nous changions complètement de paradigmes et que nous sortions de la logique prédominante !
Je ne comprends pas pourquoi vous avez publié les vœux de cette dame libérale à moins que ce soit pour faire un contraste saisissant avec les propos forts d'Anne-Cathérine Menétrey* ou de d'Hélène Küng* et pour donner la mesure de l'abîme qui les sépare de la pensée-unique du discours néolibéral de l'archi-libérale Martine Brunschwig Graf.
Et moi qui espérais que les gens comme Martine Brunschwig Graf montrent enfin une vraie responsabilité citoyenne, un véritable esprit de service, une réelle compréhension des raisons de cette crise et un engagement individuel empathique et altruiste dépassant l'obsédante réussite matérialiste, consommatrice, individualiste et égoïste !
Georges Tafelmacher, PULLY
La crise ?...
On plie un peu l'échine, on fait le dos rond, on rentre en soi-même, dans la consternation, surtout les dimanches soir de votation quand on a perdu sur des histoires d'armements ou de minarets. Mais le lendemain déjà, la rue est noire de manifestants, et la résistance s'organise.
Copenhague, haut lieu de la capitulation dans les salons pour VIP, est aussi le haut lieu, dehors, dans l'espace public, de la contestation et de la détermination. La foule brandit ce qu'il lui reste d'espoir, de colère, de volonté.
Quelque douze millions de personnes dans le monde ont signé une pétition pour exiger des mesures immédiates en faveur du climat. Il y a des forces vives dans ce pays! Il y a des gens qui s'engagent, qui remuent ciel et terre pour que les mots "solidarité" ou "justice" gardent leur sens et leurs couleurs. La société civile prend sa revanche sur la mondialisation: des quatre coins du monde affluent les mots d'ordre de résistance. Pas un seul naufrage de migrants en Méditerranée, pas en seul charter de déboutés en direction de l'Afghanistan ou d'ailleurs qui ne déclenche une avalanche de protestations électroniques.
Bien sûr, cela ne suffit pas pour les sauver de la mort ou du malheur. Est-ce que ça suffit pour croire encore qu'un autre monde est possible? Je ne sais pas, mais ça donne envie de ne pas laisser tomber, de redresser la tête. Sans cette pression populaire, des milliers de migrants auraient été expulsés, en plus de ceux pour qui on n'a rien pu faire. Sans cette pression populaire, jamais les dirigeants de nos pays industrialisés n'auraient émis l'idée d'introduire une taxe sur les transactions financières ou un impôt musclé sur les bonus des banquiers. Tant que les mouvements sociaux tiennent le coup et que des forces jeunes prennent le relais, le monde ne perd pas complètement la boule.
ANNE-CATHERINE MENÉTREY-SAVARY, ex-conseillère nationale Verte
Pourquoi lutter ?...
Parce que renoncer serait encore pire! Mais attention, prudence dans le maniement de ce carburant parfois très destructeur qu'est l'espoir. À cultiver: une forme de lutte ou d'espoir "à basse énergie", "à combustion lente", qui ne s'enflamme pas trop vite pour ne pas redescendre trop brutalement.
«Point n'est besoin d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer»: cette devise attribuée à un marathonien d'une guerre de libération (Guillaume le Taciturne, pour les Pays-Bas au XVIe siècle) illustre bien cette prudence. Un autre marathonien de la résistance et de l'espoir envers et contre tout, le chanteur Johnny Clegg en Afrique du Sud, le disait ainsi: «Demain est toujours trahi par trop d'espoir affiché aujourd'hui».
Ne pas d'abord espérer. Ne pas d'abord promettre, surtout pas. J'ai espéré à m'en rendre malade, j'ai cru au plus-jamais-ça, au développement juste, à l'avenir meilleur, entre autres.
Ne pas d'abord espérer, juste entreprendre, commencer par un bout – et rejoindre celles et ceux qui ont déjà commencé – et continuer. Ce que j'apprécie dans Le Courrier, c'est qu'il nous raconte ce que d'autres tentent, avec un bon dosage de lucidité, d'analyse et d'espoir. L'énergie du mot "espoir" peut se convertir en "courage". Est-ce une énergie renouvelable? Oui. Elle peut se nourrir de presque rien en apparence, de petits bonheurs bas-seuil, une rencontre, des retrouvailles, un grain de raisin, un peu de vent, quelques mots, une colère, un article engagé, et cette folie format poche qu'on appelle "confiance".
HÉLÈNE KÜNG, Directrice du Centre Social Protestant
«Collégien ou politicien, boucher ou homme de Dieu, tout le monde est désormais attaché à son ordinateur comme le fœtus au corps de sa mère»
Voilà une première décennie du XXIe siècle derrière nous. Que faut-il en retenir? Les paniques planétaires! Le terrorisme, bien sûr. Les pandémies aussi, aviaire et porcine. Le climat qui tourne de l'œil. Plus la crise économique et financière.
Mais, si l'on y regarde de plus près, ce qui a vraiment changé ces dernières dix années, ce ne sont pas les risques eux-mêmes: en effet, depuis que les hommes sont sur la terre, ils s'entre-terrorisent régulièrement; les maladies nous ont toujours accompagnés; le climat en a vu d'autres; et, pour ce qui est des crises économiques, depuis le fond des temps, elles reviennent avec une régularité de métronome.
Non, ce qui est vraiment nouveau, c'est l'omnicommunication. Si les attentats du 11 septembre 2001 s'étaient produits sans qu'il n'y ait ni télévisions, ni téléphones, ni internet, ils n'auraient été que d'horribles incidents locaux, dont les marins nous eussent informés six mois plus tard, comme cela se passait au temps de la colonisation des Amériques.
Mais là, non. Nous étions en direct, soufflés, bouleversés, traumatisés jusqu'à la mœlle. Nous criions, les yeux pleins de larmes: «Nous sommes tous Américains !»
La particularité de l'omnicommunication est qu'elle nous est tombée dessus comme un orage fou. Certes, nous en avons vite saisi les avantages, l'intérêt et l'amusement - songez aux e-mails, à Wikipédia, à Facebook, à l'iPhone et à un million d'autres trucs marrants à notre totale et immédiate disposition.
En revanche, nous n'avons pas encore eu le temps de réfléchir au phénomène global, pour en évaluer les avantages et les inconvénients. D'autant moins le temps que ce phénomène continue à changer de visage et de nature à la vitesse grand V.
Alors, vite, entre deux orages fous, un bilan d'étape en deux points.
Primo: je suis soûlé par notre addiction à l'omnicommunication. Collégien ou politicien, boucher ou homme de Dieu, gouvernants ou militaires, tout le monde est désormais attaché à son ordinateur comme le fœtus au corps de sa mère.
Avantage: nous sommes reliés en permanence à tout ce qui vit sur cette terre, c'est génial !
Risque: le jour où quelqu'un trouvera le moyen de détruire les réseaux physiques indispensables à cette omnicommunication, nous serons des milliards à nous trouver en manque horrible, et le monde pourrait bien s'arrêter de tourner.
Deuzio: je suis fasciné par la formidable liberté individuelle que nous donne l'omnicommunication.
Avantage: la liberté justement de savoir tout ce que nous voulons savoir à la seconde où nous voulons le savoir, et de dire à la terre entière ce que nous pensons de tout et de rien, sans aucune espèce de retenue.
Risque: que cette liberté absolue ne nous conduise à une anarchie si totale qu'un jour proche, à bout de souffle, étrillés, épuisés, nous en appelions à un régime (planétaire?) d'ordre sec et dur, dont le premier geste – hautement symbolique – pourrait être de détruire les réseaux physiques, histoire de nous calmer radicalement.
Impossible ?
Dans un monde qui a connu le nazisme, le fascisme, le maoïsme, rien n'est impossible, je le crains.
Claude Monnier - © 24Heures
Or donc, pour M. Claude Monnier, l'anarchie est à mettre dans le panier des régimes destructifs qu'a connu le monde, soit le fascisme, le nazisme, le maoïsme !
Mais quand donc votre chroniqueur invité comprendra-t-il enfin que l'anarchie n'est pas la liberté absolue et ne conduira pas vers l'essoufflement et l'épuisement, ni vers un étrillage social ou de nouvelles dictatures ?
Quand donc comprendra-t-il que l'anarchie c'est l'esprit de résistance à l'oppression, une réaction permanente dans un monde aux formes de contrainte variées. C'est une lutte contre l'aliénation religieuse, contre l'aliénation politique et le pouvoir totalitaire et contre l'aliénation humaine et ses contraintes d'une morale abstraite et comportementale qui menace d'étouffer l'originalité de l'individu. C'est un mouvement d'idées et d'action qui, en rejetant toute contrainte extérieure à l'homme, prône la vie en commun sur la base d'une volonté individuelle d'autonomie où l'humain parvient à sa pleine conscience et compréhension de son être. Du principe d'autonomie de la volonté individuelle, on aboutirait à une union librement consentie supérieure à celle d'une union obtenue par la force ou la contrainte. L'ordre et la justice, dont on ne nie aucunement la nécessité pour la cité, reposeraient sur un contrat librement conclu entre tous ses membres dont les clauses, profitables à tous les contractants, sont observées librement.
Ce n'est pas l'anarchie qui mènera à un régime d'ordre sec et dur mais la folie consommatrice fruit d'un système entièrement basé sur le néolibéralisme dont le moteur est la pensée-unique basée sur la concurrence, l'élitisme, l'enrichissement matérialiste et l'omnicommunication !
Georges Tafelmacher, Pully
«Va donc s'ouvrir un temps de pagaille anxiogène et dangereuse»
II y a une quinzaine de jours déjà que les États-Unis se sont retirés des opérations militaires aériennes directes en Libye. Une décision sage, qui pose néanmoins un sacré problème. Nos sociétés humaines, comme nombre de sociétés animales, ont en effet besoin - même si cette évidence nous reste douloureusement en travers de la gorge - d'un ou de plusieurs «mâles dominants» - ou plus exactement d'une, de deux ou trois nations «dominantes» orientant le jeu planétaire et prenant sur elles de flanquer des coups, mortels parfois, aux autres nations qui se risquent à dévier trop de la route tracée.
Après la fin de la guerre froide, durant laquelle deux nations «dominantes», les États-Unis et l'URSS, ont, à travers leur conflit bien net et bien ordonné, fait marcher la planète plus ou moins droit pendant une cinquantaine d'années, les États-Unis se sont retrouvés seuls pour mener à chef cette mission «biologique».
Hélas pour eux, le rôle de «dominant» est épuisant, plus encore depuis que la mondialisation en a élargi le champ géographique et qu'eux-mêmes croulent sous les dettes. Les États-Unis, aujourd'hui, n'en peuvent plus. Ayant déjà l'Irak, l'Afghanistan et le Pakistan sur le dos, il eût donc été absurde qu'ils s'engagent durablement en Afrique du Nord. Il y a un ennui, toutefois: devenus ainsi raisonnables, ils ne font plus peur.
En politique internationale, le «mâle dominant», quand bien même il effraie et énerve tout le monde, oblige les autres nations à bien réfléchir avant de faire quoi que ce soit risquant de provoquer une pagaille généralisée. Les nations «dominées» savent en effet que, si elles se comportent mal, le «mâle dominant» n'hésitera point à leur faire passer un très mauvais quart d'heure. Cette tension primaire maintient dans le monde un certain ordre, une certaine lisibilité, permettant à chacun de voir à peu près où vont les choses.
Mais lorsque le mâle dominant cesse de dominer, comme cela est le cas aujourd'hui, chaque nation se met à faire ce que lui dictent ses émotions immédiates, ses coups de pif, sans plus tenir compte de l'effet systémique de ce qu'elle entreprend. S'installe alors l'anarchie, au sens premier du terme: absence de commandement.
Tout, alors, se met à bouger en même temps, plus rien ne tient, ni principes, ni mœurs, ni institutions; des crises éclatent partout, et personne ne sait plus à quel saint se vouer - c'est le cas de le dire, vraiment. Une pagaille anxiogène et dangereuse, destinée à durer tant que n'émergera point un nouveau «mâle dominant».
La Chine, dites-vous? Oui, peut-être, un jour. Mais pour le moment elle ne domine guère; j'en veux pour preuve qu'au Conseil de sécurité de l'ONU, où elle a pourtant un droit de veto, elle s'est prudemment abstenue de prendre part au vote de la résolution sur ni principes, ni mœurs, ni institutions; des crises éclatent partout, et personne ne sait plus à quel saint se vouer - c'est le cas de le dire, vraiment. Une pagaille anxiogène et dangereuse, destinée à durer tant que n'émergera point la Libye...
Pas très macho, ça.
Claude Monnier ©24h
M. Claude Monnier a décidément une vision très anachronique et élitiste de l'organisation sociale où ce serait aux «mâles dominants» de maintenir la cohésion sociale et le respect absolu du tracé de la route. Il semble regretter l'époque bénie où des nations «dominantes» régissaient la planète au détriment des populations !
Pire, selon lui, sans ces dominants, nous les individu-e-s, serions livrés à nos pires tendances et nous nous massacrerions parmi comme de vulgaires enragés. Cette vision de la société traduit un manque de confiance en l'homme et procède d'une attitude très pessimiste de la vie !
Selon la vision humaniste de l'anarchie, le commandement ne peut être l'apanage réservé aux seuls «mâles dominants» car il devrait être assumé par la globalité du corps social où l'autogestion, les assemblées générales participatives et les contrats entre les individu-e-s remplaceront avantageusement ces lois imposées par une élite aux commandes de cet ordre inique favorable aux seuls nantis. Certes le prix à payer pour passer d'une société infantilisée et dirigée à une société autogérée par l'autonomie et la participation de tous et toutes à la construction sociale, sera lourd. Malgré cela, cette position sera autrement plus positive et responsable que la perpétuation de cette société de grand frères autoproclamés qui nous dicte sa loi du plus fort et nous promet un futur désespérément plombé, hiérarchisé et belliqueux où la guerre sous toutes ses formes est le seul point de repère, la seule façon de régler nos problèmes humains.
Bref, l'anarchie n'est pas l'absence de commandement mais le lieu où le commandement est équitablement partagé par tous les membres du corps social.
Georges Tafelmacher, Pully
Quel grand coup, quel savoir-faire, quel courage... Ils devaient sans doute se prendre pour la bande à Bonnot les casseurs zurichois du 1er mai.
Chapeau en moins, cagoule en plus. De simples casseurs à la petite semaine que la presse s'empresse de qualifier d'anarchistes. Le Larousse définit l'anarchisme par «doctrine politique qui préconise la suppression de l'État et de toute contrainte sur l'individu». Il n'est nulle part fait mention de lanceurs de cailloux, de chahuteurs, ni de têtes vides qui inventent des jeux du niveau de leur intellect. Bakounine doit se retourner dans sa barbe...
Pourquoi appelle-t-on ces petits frappeurs des anarchistes? D'où est sortie cette qualification reprise par toute la presse? Léo Ferré, qui était anarchiste, lors d'une tournée sur des plages françaises annonçait sa chanson «les anarchistes» par une question: Y a-t-il des anarchistes dans la salle? Indubitablement quelques bras se levaient et Ferré de ricaner: «Ah, ah, ah, vous croyez qu'il suffit de lever le bras pour être anarchiste»...
Mais la meilleure définition reste sans doute celle de Malraux. «Et le Christ? C'est un anarchiste qui a réussi. C'est le seul !»
Nina Brissot
Quelle ne fut pas ma surprise de lire dans votre journal votre réflexion sur l'anarchie qui, à contrecourant de la dérive "politiquement correcte" du moment, nous montre que l'anarchie ne peut pas être réduite à quelques énervés jetant des briques dans des vitrines.
Votre éclairage démontre à qui veut comprendre qu'il y a une confusion voulue et volontaire quant à la définition exacte de cette philosophie où n'est présentée que ses aspects violents concernant le débarras des tyrans politiques, économiques, domestiques et le refus d'une autorité abusive mais jamais ses autres aspects constructifs que sont l'autonomie, l'autogestion, la participation citoyenne, les assemblées générales participatives, le travail indépendant, les contrats librement consentis entre les individus, la société sans patrons, etc...
Il est quand même piquant de constater que les bombes larguées d'un chasseur "Étendard" militaire pour déloger un tyran sont socialement acceptées mais qu'un pétard mouillé d'avertissement contre les dirigeants trop forts crée un émoi qui permet aux autorités de renforcer la sécurité, de faire passer des lois liberticides "anti-terroristes", d'augmenter les dépenses militaires, de justifier la surveillance politique, d'installer des caméras vidéos, de fliquer la population, de criminaliser les catégories de gens qui dénoncent les injustices, avertissent des dangers écologiques, luttent contre la domination d'une élite aux commandes, protestent contre les pensée-uniques, s'opposent aux menées d'une clique au pouvoir qui se croient maîtres du monde.
Mais le monde appartient à tout le monde, quel qu'il soit, où qu'il vit, quelque soit sa situation et nous devons apprendre à vivre dans le respect absolu de l'autre, à faire confiance aux autres, à les comprendre et à les considérer comme des partenaires valables dans la construction d'une société viable où l'économie est rendue à sa partie congrue et ne serait plus le seul moteur du progrès.
L'anarchie descend de la pensée libertaire qui à son tour a donné le libéralisme. Mais ce libéralisme a été tellement détourné de ses aspects originaux qu'il est devenu une oppression à son tour. La culpabilisation de l'anarchie s'ensuit de cette volonté de maintenir le pouvoir et de casser tout ce qui devrait nous pousser à plus d'autonomie, de bonne volonté entre nous et, surtout, à construire la société ENSEMBLES.
Ils ne sont pas fous nos dirigeants, ils savent très bien le danger que l'anarchie peut présenter pour eux – la perte de leur pouvoir et de leur ascendance sur la société, la peur de ne plus être l'élite !!
Georges Tafelmacher, PULLY
«La Suisse est le seul pays à présenter des statistiques du chômage supérieures à la réalité.» - Christophe Reymond
Fédération patronale vaudoise - Lors de l'assemblée générale de la Fédération Patronale Vaudoise (FPV) tenue au Rolex Learning Center de l'EPFL, Christophe Reymond, secrétaire général, a lancé quelques pavés dans la mare.
C'est dans un lieu tourné vers le futur, avec un invité de marque en la personne de Patrick Aebischer, président de l'EPFL, au cœur des start-up et des chefs d'entreprises de demain, que 1a FPV a tenu ses assises. Dino Venezia, président, a relevé l'importance dès questions de formation et le soutien des patrons à l'initiative populaire «École 2010» considérée comme une réponse concrète aux aspects du système scolaire vaudois défaillant. Il a présenté l'orateur invité, Serge Enderlin, journaliste et écrivain qui, dans un exposé à la fois soutenu, mais ponctué de clins d'œil humoristiques, a développé sa vision des questions énergétiques sous l'angle des enjeux géopolitiques. Une histoire dans l'air du temps...
Dynamisme de l'économie vaudoise
Partant de l'extraordinaire réussite économique helvétique, par comparaison à nos puissants voisins, Christophe Reymond a rappelé que la petite Suisse a échappé à la crise économique mondiale. Un privilège qui, a-t-il rappelé, est aussi dû au fait que les autorités fédérales n'ont pas cédé à la panique en 2009. Entendez par là que «la Confédération et les cantons n'ont pas débloqué les milliards de francs que réclamaient la gauche et les milieux syndicaux pour soutenir la conjoncture», a encore relevé Christophe Reymond. Poursuivant, il a dénoncé le système de calcul statistique du taux de chômage, basé sur des chiffres de l'an 2000, date du dernier recensement de ta population. La réalité du chômage, toujours selon M. Reymond se situe à 4,7% et non 5,5% comme publié. Restant dans le domaine des chiffres, il a relevé une augmentation de 30'000 postes de travail dans le canton depuis 2005 et 1'200 places d'apprentissage. Un PIB en augmentation de 20%. Le canton compte 130'000 étrangers actifs et 18'000 frontaliers.
Les vertus
Selon Christophe Reymond, le monde économique doit cultiver le partenariat social, le goût du travail et la confiance. Dénonçant au passage l'initiative pour le SMIC «parce que tout salaire minimum légal constitue un barrière à l'entrée sur le marché du travail». Glorifiant le goût du travail, il a néanmoins dénoncé les théories fumeuses sur le partage du travail et fustigé le nouvel impôt sur le travail qui une fois de plus «solliciterait le monde du travail». Enfin, passant à la confiance, le secrétaire général a violemment dénoncé l'idéologie de la peur, devenue stratégie. «On ne serait pas créatifs et entreprenants si l'on était de ces esprits chagrins et timorés qui passent leur temps à dénoncer l'injustice, pleurnicher sur les malheurs du monde, suer la jalousie, trembler devant l'apocalypse écologique».
Tout un programme à méditer...
Nina Brissot
Réaction de l'artisan aux «grands» de ce monde qui n'arrêtent pas d'imposer leur idéologie mille fois retords car inhumaine et pour contrer cette hégémonie du futur formaté par les entreprises de demain.
En tant que petit indépendant ayant œuvré dur toute sa vie dans un métier demandant énormément de créativité, d'esprit d'entreprise, d'efforts et de sacrifices et beaucoup d'entregent avec une clientèle exigeante, les propos de M. Christophe Reymond, secrétaire général du Centre Patronal, m'ont non seulement frappé profondément mais surtout, sa façon de dénigrer tous nos efforts loyaux pour rendre ce monde un peu moins bête et autodestructif, m'ont éclairé sur la véritable nature de ces messieurs qui se croient si au-dessus de nous !
J'ai longuement médité son programme et je suis arrivé à la conclusion que vraiment, il y a un énorme problème dans la conception que ces messieurs se font de la vie en général et du monde du travail en particulier. Il veut rapporter sur nos toutes petites épaules toute la faute de l'état du monde alors que cet état a été soigneusement préparé de longue date par les mêmes qui viennent à présent fustiger les victimes de ce système !
NON, nous ne sommes pas des «esprits chagrins», nous voulons simplement un monde dans lequel TOUTE personne puisse vivre et s'épanouir et nous en avons assez de ces gens qui passent leur temps à fustiger toutes ces personnes qui cherchent à les rendre conscients des résultats de leurs idéologies économiques et sociales et des conséquences de leur activisme économique.
L'apocalypse écologique des dirigeants économiques vaudois
Or donc, pour le Centre Patronal et son secrétaire général Christophe Reymond, toutes les personnes qui dénonceraient les injustices sociales et qui prendraient conscience des malheurs du monde en vu de contrer «l'apocalypse écologique» que nous préparent nos dirigeants affairistes et industriels avec leur économie conquérante et ses 100'000 produits chimiques répandus dans notre environnement, ne seraient que des «esprits chagrins», des timorés qui suent la jalousie, qui ne seraient ni entreprenants ni créatifs et qui pratiqueraient l'idéologie de la peur !
Il faudrait que ce monsieur se regarde d'un peu plus près car à l'écouter, il sème la peur de la ruine de «notre» économie en «dénonçant violemment» la soi-disante «stratégie» qu'opéreraient ces personnes qui en ont assez de vivre sous l'emprise de la domination des «valeurs» absolues du «goût du travail», de la compétitivité à tous les étages, et surtout, de cette mentalité «patronale» qui sévit de plus en plus dans les sphères dirigeantes. Mais le plus grave est de laisser entendre que nos peurs face aux problèmes environnementaux réels seraient des «fausses peurs» et que nos réactions ne seraient qu'une «stratégie» idéologique alors que ce monde est devenu très dangereux par l'activisme politique de ces individus qui se croient à la barre de notre économie.
J'ai vraiment l'impression que par ses diatribes accablantes, il ne fait que de s'accuser lui-même car nous pouvons nous aussi à notre tour dénoncer les injustices de sa vision du monde, les stratégies qu'il déploie pour assurer sa domination et ses pleurnicheries sur les dangers que nous ferions supposément subir à «son économie» !
À méditer avant qu'il ne soit trop tard !
Georges Tafelmacher
artisan à PULLY
«Récemment la Télévision romande a montré un film dont les premières séquences évoquaient le calvaire d'une enseignante des États-Unis, sans cesse défiée, insultée et agressée par ses élèves.»
Une rare situation de violence qui touche, semble-t-il, peu les écoles de Romandie! Et pourtant, le lendemain de la projection du film, quelques potaches de nos contrées ont cru bon de s'imprégner de l'esprit agressif de leurs condisciples américains en chahutant – c'est un euphémisme! – leurs professeurs.
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Réaction de l'ancien écolier aux «grands» moralisateurs de ce monde qui n'arrêtent pas d'imposer leur moralisme mille fois retords et l'hégémonie de leur activisme comportementaliste.
Rien ne prouve que ce soit le laxisme qui amène la violence.
L'expérience démontre, par contre, que c'est la violence qui engendre la violence. En effet, selon des études américaines sur les jeunes en prison pour des actes de violence, 80% de ceux-ci ont subi pendant leur enfance coups, gifles, viols, injures. La violence qu'on commet sur autrui est la conséquence de la violence qu'on a subi soi-même enfant. De plus, nous vivons dans une société d'une violence inouïe où la compétition acharnée, la concurrence sans limites, la résolution des conflits par des bombardements "ciblés", la pollution industrielle et le néolibéralisme darwinien règnent en maître.
Associer la violence au laxisme est une façon commode d'éluder les vraies raisons des déchaînements de violence. Si vraiment nous voulions lutter contre la violence, alors occupons-nous d'abord de la violence domestique, puis de la violence sociétale qui, elles, sévissent depuis bien avant le laxisme.
Ne laissons pas l'arbre du laxisme cacher la forêt de la violence car le problème est infiniment plus complexe et sa résolution doit dépasser le moralisme comportemental proposé par les adeptes de la manière forte, des punitions et autres sanctions qui, elles, sont d'autant de forme de violence.
Et quand est-ce que nos moralisateurs se décideront de lutter contre les causes collectives et sociales de la violence et de dénoncer les conditions sociales qui rendent violent ?
G.Tafelmacher, Pully
Les émeutes survenues l'été dernier à Tottenham, banlieue londonienne, ont suscité incompréhension et inquiétude dans le monde entier. Logiquement, les policiers et les citoyens de notre canton se sont demandé si de tels débordements sont possibles en territoire vaudois.
Mon propos n'est pas de me livrer à des réflexions politiques ou sociologiques pour déterminer les causes de ces événements, dont la police n'a pas la responsabilité. Cela dit, on ne peut s'empêcher de penser - sans que cela ne justifie d'une quelconque manière un tel déferlement de violence - que le sous-emploi des jeunes, la fracture sociale et la perte de valeurs et de références doivent être pris en compte dans l'analyse.
Tottenham étant plus connu pour son équipe de football que pour sa guérilla urbaine, je me permettrai aussi une incursion dans le milieu du sport en question, dont les dérives, particulièrement en Angleterre, mettent en évidence des différences de salaire à l'intérieur d'une même communauté qui ne contribuent en tout cas pas à un apaisement social. Comment certains gamins, sortis des rues anglaises, peuvent-ils passer à moins de 20 ans, grâce à un don ou à un talent parfois supposé, du statut de no future à celui d'une vedette gagnant plus de 100'000 livres sterling par semaine sans susciter la jalousie et la révolte de ceux qui n'ont pas eu leur chance ?
Certes, on ne peut comparer les réalités de la banlieue londonienne avec celle de la Suisse et de ce canton, notamment sous l'angle des perspectives offertes aux jeunes. Il est néanmoins permis de dégager un certain nombre d'enseignements du traitement que les autorités anglaises ont réservé à ces affaires et à leurs auteurs. Point commun des émeutes de ce type, l'élément déclenchant est souvent un comportement policier malheureux, maladroit ou mal compris, comme cela s'est vérifié en Angleterre ou auparavant dans les banlieues françaises. Il est certaines circonstances dans lesquelles ce comportement est inévitable et où la malchance a sa part, mais la police doit en permanence s'interroger sur les répercussions que peut avoir telle ou telle prise de décision en termes d'ordre public.
Le timing de ces événements interpelle également. Coïncidence ou non, les émeutes ont été précédées de peu par des révélations sur la connivence de policiers et de journalistes dans un scandale qui a discrédité Scotland Yard. Mais, surtout, les événements ont remis sur la table la question de la vidéosurveillance en tant que moyen de prévention de la criminalité, considérée trop rapidement par certains comme ayant définitivement fait la preuve de son inutilité et de son inefficacité.
Je souhaiterais que l'on sorte du strict terrain de la prévention et que l'on analyse cette problématique aussi à la lumière des possibilités accrues voire exclusives d'identification qu'elle permet après la commission des infractions. Soyons très clairs: sans vidéo, sans images, il n'y aurait jamais eu un taux d'identification des auteurs aussi élevé que celui qui est intervenu à Tottenham.
Le recours à ce moyen de preuve souvent incontestable a eu deux effets, que les opposants ou les sceptiques devraient méditer. D'une part, il a mis à mal le sentiment d'impunité dont les casseurs etles pilleurs ont cru pouvoir bénéficier en étant noyés dans la masse, l'image ayant permis d'identifier les auteurs et d'individualiser les comportements. C'est là un grand succès des autorités policières et judiciaires britanniques. D'autre part, la vidéosurveillance a permis de déférer extrêmement rapidement les auteurs devant les tribunaux - au demeurant servis par une procédure de comparution immédiate qui fait hélas défaut en droit suisse - là où, sans images, il aurait fallu des semaines voire des mois pour pouvoir le faire.
Le commandant de la Police vaudoise, Jacques Antenen, n'a pas dû lire le livre de George Orwell «1984», ou, s'il l'a lu, n'a rien compris à son message final, soit l'avertissement implicite contre la surveillance des citoyens par écran interposé.
Bien sûr que dans un premier temps, l'ordre peut être, à la rigueur, rétabli ou renforcé avec les moyens modernes de vidéosurveillance mais très vite, des parades seront trouvées pour les contourner et cela non seulement les rendra inefficaces mais illusoires laissant même l'impression d'un formidable coup d'épée dans l'eau.
La réflexion de Jacques Antenen a bien commencé avec son début d'analyse sur les possibles raisons de la violence sociétale mais sa conclusion n'est qu'une pique contre les opposants de la vidéosurveillance et une apologie pour nous convaincre que celle-ci pourrait résoudre le problème de la violence. Mais cela n'est qu'un procédé purement mécanique faisant fi des angoisses existentielles qui poussent certains aux extrémités d'un tel désespoir que pour eux la violence serait un échappatoire à un destin funeste composé de chômage, manque de perspectives, boulots mal-payés et à l'appel, conséquences de notre société à deux vitesses et de son évolution néolibérale.
La violence de cette société n'est pas dans les stades, elle est dans cette vision de la société inféodée aux intérêts du patronat, des grands pouvoirs économiques et des riches. Au lieu de comprendre les vraies raisons de la violence et d'agir en conséquence, des dirigeants tel Jacques Antenen, s'en prennent plutôt aux hooligans en les rendant seuls coupables de cette violence alors qu'elle est induite par notre modernité déchaînée.
G.Tafelmacher, Pully
Au lieu de fustiger le "socioconstructivisme", M. J-A. Haury ferait mieux nous offrir une définition correcte de ce terme.
Alors qu'est-ce que c'est que le "socioconstructivisme" sinon les modalités des différents fonctions de la construction de la société. En effet, c'est une conception qui envisage la réalité sociale et les phénomènes sociaux comme étant "construits", c'est-à-dire créés, objectivés ou institutionnalisés et, par la suite, transformés en traditions. Le constructivisme social se concentre sur la description des institutions, des actions en s'interrogeant sur la manière dont ils construisent la réalité et ne fait que décrire comment les frontières et les règles des sociétés, invisibles mais puissantes, sont créées, transformées, institutionnalisées et transmises aux générations futures. Ce qui fait que le libéralisme, le néolibéralisme et le capitalisme sont aussi du "socioconstructivisme" et doivent être soumis aux critiques au même tarif !
La construction de n'importe quelle société c'est du "socioconstructivisme". La lettre de M. J-A. Haury doit être prise pour ce qu'elle est – un réquisitoire qui condamne une certaine analyse sociale !
G.Tafelmacher, Pully
- - -
(...)
Dès lors que Monsieur Haury nous parle de "socioconstructivisme" dans sa lettre, l'intérêt de la mienne est d'apporter une rectification de ce terme et contrer la péjoration que M. Haury en a fait (sans parler de la supposée "influence pernicieuse" des travaux de M. Jean Piaget sur l'école vaudoise !). Le socioconstructivisme n'est pas, comme il l'a laissé entendre, une contamination pernicieuse, ou une aberration, ou une illusion psychologisante et encore moins un reproducteur d'inégalités. Il est donc parfaitement abusif de voir en le socioconstructivisme toutes les causes de nos malheurs !!
Pour cette raison, l'intérêt de nos lecteurs est d'accéder à une meilleure connaissance de ce terme et mettre fin à toutes ces allusions visant à reléguer le socioconstructivisme à une aberration. Il n'y a rien d'abstrait dans cette démarche même si le sujet initial était la pédagogie vaudoise !
Le "socioconstructivisme" n'est pas, comme il l'a laissé entendre à maintes reprises et à d'autres occasions, une construction de la gauche pour faire tomber la droite, ni une contamination pernicieuse, ou une aberration, ou une illusion psychologisante et encore moins un reproducteur d'inégalités de départ. Il est donc parfaitement abusif d'attribuer au "socioconstructivisme" un concept de gauche alors que toute construction de n'importe quelle société est du "socioconstructivisme" !!
La lettre de lecteur de M. J-A. Haury doit être prise pour ce qu'elle est – un réquisitoire contre la gauche (et accessoirement une sacré pique contre Jean Piaget !) – et il faudrait qu'il prenne ses responsabilités quant à ce qu'est devenu notre société qui est tout autant la "faute" de cette droite "consommatrice" que de ses thuriféraires enferrés dans la construction d'une société de consommation libérale !
GPT
Je me demande si tout cela a un sens et si ces lettres de lecteur peuvent contribuer à la prise de conscience générale de la trop grande importance que l'économie et la consommation ont pris dans nos vies et de la conséquence sociale d'avoir tout traduit en monnaie sèche et sonnante, où la société est considérée uniquement sous son aspect monétaire !
Malheureusement, étant donné les forces en présence, je doute que nous ne puissions donner un autre sens que celui de la consommation à nos vies et je crains que nous sommes allés trop loin dans le matérialisme réconfortant et qu'il sera très difficile de trouver un mode "anarchiste" du "vivre-ensemble". Il me semble que nous sommes devenus des consommateurs trop bien formatés qui ne peuvent plus vouloir aucun autre comportement que celui de consommer, que cela soit des produits de consommation de masse, des plaisirs d'achats, ou autres...
Chaque fois que j'entends ce discours libéral de la "libre consommation" et de cette volonté de traduire les besoins sociaux des gens en actes de consommation qui deviennent ainsi les fondements de l'économie néolibérale, un dégoût profond me montent des tripes et me fait une nausée qui ne me lâche pas. Notre radio nationale RSR1 passe son temps à nous convaincre de consommer et presque toutes les nouvelles ne sont que des "publi-reportages" faites pour vendre des produits et, surtout, faire accepter la conception même de l'acte de consommation. Le premier acte de révolte à faire, serait d'arrêter d'écouter cette propagande !
Le pire étant qu'autour de moi, la plupart des gens trouvent que la consommation c'est "normal", que ce qu'il faut c'est d'être "consomm-acteur" et savoir "lire les étiquettes", ce qui pour moi est l'insulte suprême car si un consommateur devient "acteur" par une prise de conscience salutaire, il cesse d'être "consommateur" pour redevenir simplement humain !!
Ces lettres de lecteur sont ma participation dans la lutte pour une société réellement humaine, empathique, respectueuse, aimante, consciente, constructive, participative, holistique, et elles promeuvent une réelle valeur de changement de société visant à nous faire passer d'une société "darwinienne" où la loi du plus fort est la règle, à une société basée sur la solidarité, l'entraide et la pleine capacité de ses membres de réellement vivre leurs vies, en somme une société libertaire, anarchiste mais dans son sens noble et non pas destructif comme aimeraient le faire propager ces exploiteurs éhontés que sont ces patrons macabres qui sous prétexte de "progrès social" nous vantent les mérites de l'irradiation et des 160'000 produits chimiques épandus dans notre environnement qui, bien sûr selon eux, «n'ont aucun effet sur la santé» !!
Comment lutter contre ces personnes malfaisantes qui se croyant "justes", appliquent des méthodes totalitaires pour faire régner leur ordre maléfique ???
La réponse n'est pas encore trouvée malgré tous les efforts de nos loyaux défenseurs de la veuve et de l'orphelin pour instaurer une logique sociale acceptable et qui correspond vraiment à la volonté de tous les citoyens de vivre "bien" !!
Nous devons sortir nos philosophes anarchistes* du placard dans lequel ils ont été enfermés pendant cette longue décennie où nous avons été écrasés par cette horrible "guerre contre le terrorisme" qui trouve son apogée même chez ce Obama qui nous a pourtant promis la paix et l'esprit de changement et de coopération. Et ne laissons plus ces dirigeants politiques, économiques et industriels en paix en les confrontant à la réalité des conséquences de leur choix de société néolibérale...
D'où l'importance de ces lettres de lecteur !
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* Relisons "Histoire de l'anarchisme" par Jean Préposiet (1926-2009) : Historien de la philosophie, il a contribué à l'historiographie spinoziste internationale grâce, notamment, à Spinoza et la Liberté des hommes (Gallimard) et Bibliographie spinoziste (Belles Lettres). Chez Tallandier, il est l'auteur de "L'Histoire de l'anarchisme". Jean Préposiet a enseigné à l'université de Besançon.
une lettre de félicitation d'un lecteur à une de mes lettres de lecteur
Pas un jour sans qu’une catastrophe se produise dans le monde. Cette terre où nous vivons est en souffrance; atteinte par le productivisme débridé et sans fin. L’humanité et le monde des vivants sont à la peine.
De trépidations en trépidations, le mal s’accroît: par des canicules à répétition, par des extinctions de masses, par des océans saturés de plastique, par la destruction des poumons verts que sont les forêts primaires. Mais la liste doit s’arrêter là, car elle est loin d’être terminée.
Nous avons besoin, d’une planète où il fait bon vivre pour toutes les espèces. Notre oxygène est vital, notre eau doit être buvable. L’économie de marché connaît nos besoins pour mieux les exploiter. Le dieu marché a colonisé les esprits; les lois du marché ne connaissent pas d’autres lois que celles de la concurrence et du profit. Le marché est devenu un dogme religieux, où il n’y a pas d’autre solution. Tout se joue dans les bourses, cela montre l’opacité du fonctionnement des marchés financiers, qui sont devenus des casinos à l’échelle planétaire. De cela, on pourrait croire que nos vies sont devenues des variables d’ajustement structurelles.
Ainsi il est facile de penser que le monde économique joue à la roulette russe avec la nature et nos vies. Cela doit changer, pendant qu’il est encore temps.
Mais de temps nous n’en n’avons plus beaucoup, il ne faut pas se résigner face à l’adversité. L’humanité dans son histoire a dû faire face à de nombreux périls, qu’elle a pu surmonter. La lutte pour une cause juste entretien l’espoir d’un changement bénéfique pour tous.
Thierry Cortat, Delémont
Ainsi, à en croire certains («24 heures» du mardi 15 décembre), la pandémie actuelle ferait chanceler l’idéologie «libérale-radicale». Rien n’est plus faux! Croire que la situation extraordinaire d’aujourd’hui mettrait en défaut le libéralisme est totalement inexact !
Que postule en effet le libéralisme? La liberté sous toutes ses formes, que ce soient la liberté d’organiser sa vie, la liberté de faire ses choix personnels, la liberté de pensée et la liberté d’expression, tout comme la liberté économique.
Le libéralisme ne postule pas l’abstention totale de l’État; il lui confère en particulier l’organisation institutionnelle, l’État de droit, permettant précisément la vie en commun dans la paix et l’ordre publics. Et sur le plan économique, tout en postulant la liberté d’entreprendre, il accepte que l’État intervienne pour assurer des mesures de police; ces mesures visent en particulier la santé publique, la bonne foi en affaires ou la paix publique, et forment ainsi les conditions-cadres de l’activité économique.
Pour le surplus, l’État doit s’abstenir d’intervenir dans l’économie, mais laisser s’épanouir la concurrence, soit le fait de pouvoir faire valoir ses atouts, d’être créatif, de rechercher les meilleures organisations et les meilleurs créneaux commerciaux, tout en prenant des risques quant au choix de l’activité économique dans laquelle on veut s’engager. L’État n’a alors pas à intervenir sur les choix opérés, sur la détermination des prestations offertes, sur le mode d’organisation des entreprises, car ce sont les acteurs économiques qui dictent leur propre conduite et qui répondent des réussites ou des échecs de leurs choix.
Il en va tout autrement quand on se trouve dans une situation de catastrophe. (...) Dans une telle situation, il n’y a aucune contradiction à voir des libéraux demander à l’État d’exercer en quelque sorte le rôle de l’assureur général et de veiller à la solidarité nécessaire pour maintenir des structures et des entreprises qui, jusque-là, n’avaient pas eu de problèmes particuliers.
Il en irait tout autrement si on demandait à l’État de soutenir des canards boiteux. En l’occurrence, les aides doivent pouvoir être données aux entreprises victimes de la situation globale et des décisions sanitaires de l’État, pour autant bien sûr qu’on vérifie la viabilité desdites entreprises. Ceux qui verraient une contradiction entre le libéralisme et l’intervention de l’État dans une telle situation n’ont rien compris au libéralisme.
Claude Ruey
Réponse
Selon M. Claude Ruey, le libéralisme n’est pas prêt à disparaître ni à se faire dépasser.
Or, le problème n’est pas le libéralisme en tant que tel mais le fait qu’il est devenu une idéologie hégémonique où l’économie aura pris le pas sur tous les autres facteurs sociaux. De plus, le libéralisme n’a pas le monopole du cœur, ni celui de la liberté, ni celui de la responsabilité individuelle, comme si ce seraient des «valeurs» de droite, reléguant la Gauche à n’être que des adorateurs de l’État. La plupart des partis politiques, dont les Socialistes, ont à leurs frontons la responsabilité individuelle comme valeur mais associée à la nécessité d’un «vivre-ensemble» citoyen où chacun aurait son mot, sa voix et sa voie.
Le problème n’est pas le libéralisme mais ce que certains en ont fait, réduisant la population à des acteurs par trop influencés par l’économie de la consommation érigée en dogme absolu. Ce libéralisme là a permis l’avènement des plus forts, des plus intrigants, des plus entreprenants où le simple quidam n’a d’autres mots à dire que de courber l’échine et d’accepter ce qu’on lui donne en pâture.
Le libéralisme, dans sa forme actuelle, doit être dépassé et être remplacé par un véritable engagement citoyen où les habitants seraient directement responsables du développement de ses rues, de ses quartiers et, au final, de ses villes par la tenue d’associations de quartier, où les entreprises seraient aux mains de ses ouvriers en autogestion, où la participation et la collaboration auront pris le pas sur cette concurrence acharnée qui sévit depuis bien trop longtemps et qui a marqué de son sceau infâme la société dans son entier.
Georges Tafelmacher
Dossiers préparés par
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